L’extrême simplicité de Jésus traversant sa Passion, jusqu’au dénuement total du lavement des pieds et de la Croix, met aussi à nu la complexité des hommes et des pouvoirs qui le tuent. Le geste le plus beau croise la lâcheté la plus vile. On préfère alors s’enfuir dépouillé de tout, comme le jeune homme chez saint Marc.

« Il était aussi suivi d’un jeune homme enveloppé d’un drap à même la peau. Ils l’attrapèrent ; mais lui, relâchant le drap, leur échappa tout nu » (Mc 14,51-52). Dans ce personnage mystérieux propre à l’évangile de Marc et au-delà des questions qu’il éveille (pourquoi apparaît-il ici ? quel type de disciple représente-t-il ? que signifie cette toile de lin qu’on lui arrache ? annonce-t-il l’autre jeune qui apparaîtra plus tard dans le sépulcre ? etc.), il nous est possible de contempler une métaphore de Jésus lui-même qui, dépouillé de tout, traverse libre et nu sa Passion.
Il connaissait les préceptes qui accompagnaient la célébration de la Pâque : « […] La ceinture ajustée, les sandales aux pieds, un bâton à la main […] » (Ex 12,11) et il s’est préparé pour la vivre (« il s’est disposé », dirait Ignace) comme ce roi de la parabole qui, avant de se lancer dans le combat, s’est assis pour calculer sur quelles forces il pouvait compter (cf. Lc 14,31).
Pouvons-nous en savoir plus à ce sujet ? « Savoir » n’est pas le verbe adéquat, pas plus ne le seraient « constater » ou « vérifier » : le mode d’approche doit être plutôt une lecture contemplative des actions et des paroles de Jésus qui précèdent chez Marc le récit de la Passion, en nous disposant nous aussi à les recevoir, à les habiter et à en être atteints. Et l’on doit attendre patiemment, au cas où elles nous offriraient quelque indice quant à la manière dont Jésus se disposait, se simplifiait, sur ce qu’il laissait en arrière, sur les convictions et attitudes qu’il renforçait pour que les seuls ceinture, sandales et bâton l’accompagnent dans son voyage.

 « Il entra à