Extase, rapt, transport, pointe de l'esprit, jouissance, union bienfaisante, fusion bienheureuse, ligature des facultés, ravissement, torrent, transformation, mutation, lumière fluente, abîme, fond sans fond… Les inventions linguistiques et conceptuelles des mystiques pour décrire l'indescriptible transport de la joie amoureuse émerveillent et leur précise crudité ne trompe pas. Si les mystiques racontent le plaisir radical de l'union à Dieu, c'est bien d'une expérience humaine qu'il s'agit, dont l'analogie avec l'amour physique n'échappe ni à celui qui la vit, ni à celui qui la lit.
Mais qu'est-ce que le plaisir si étrange des mystiques pourrait apporter à notre connaissance de la sexualité humaine et de sa jouissance ? Jacques Lacan (1901-1981) écrivait au sujet des mystiques qu'il ne s'agissait en rien, dans leur transport, d'une « affaire de foutre ». Il avait raison de mettre en garde contre les ricanements grivois de lecteurs pressés d'interpréter