Après la haine, la culpabilité, la violence, Nicole Jeammet, psychologue et collaboratrice de Christus, s’attaque à la place de la sexualité dans nos vies. Comme à son habitude, au lieu de cas cliniques, elle se fonde sur des oeuvres littéraires — ici contemporaines et plutôt féminines, car ce sont avant tout les femmes qui ont vu leur sexualité bouleversée par leur récente maîtrise de la contraception. Cette nouveauté a engendré un fait culturel majeur : « La relation sexuelle, hors lien matrimonial et hors procréation, est vécue comme une relation humaine porteuse de sens. » Nicole Jeammet nous entraîne alors dans une enquête d’autant plus intéressante qu’elle s’appuie sur des ouvrages qui ont fait, il y a peu, grand bruit, en les confrontant, in fine, au Cantique des Cantiques.
L’auteur analyse d’abord La vie sexuelle de Catherine M. de Catherine Millet et Les particules élémentaires de Michel Houellebecq, afin d’illustrer la « sexualité sans visage ». Dans les deux cas, il s’agit de la mise en scène d’une sexualité plurielle, où le corps de l’autre comme le sien propre sont réduits à de pures machines à jouir. Cette indifférenciation, selon Nicole Jeammet qui se base toujours sur les textes eux-mêmes, serait due au fait que les parents des héros n’ont jamais su, au sens fort, les reconnaître.
Moins tragique, la « sexualité papillonnante », analysée ici à travers Dans ces bras-là de Camille Laurens, s’affirme aussi comme une revanche contre des parents et grands-parents indifférents à leur progéniture. L’héroïne, qui « n’attend des hommes que l’amour », ne se sent vivre qu’en se rendant jalouse d’éventuelles rivales, ou mieux, en supposant qu’elle rend celles-ci jalouses — unique cinéma fantasmatique capable de l’aider à « sortir de l’engluement du même ».
Nicole Jeammet s’attarde moins sur la « sexualité totalisante » vue à à travers Passion simple et Se perdre d’Annie Ernaux et, en passant, Belle du Seigneur d’Albert Cohen. Car il s’agit là de l’« amour fou », plus connu, plus universel, « qui se confond avec un désir absolu d’appropriation » du partenaire. Pour ce faire, les héros sont prêts à tout, dussent-ils se perdre en des relations sadomasochistes, vampirisantes.
Toutes ces non-relations, insiste Nicole Jeammet, sont portées par un désir sexuel si absolu qu’il est impossible à combler, car dissocié d’un « sentiment amoureux fort, durable et constant ».
Une telle opposition, l’auteur pense la résoudre à travers le Cantique des Cantiques où elle voit à l’oeuvre, à la suite de Ricoeur, l’« amour de mutualité ». Il n’est rien dit des parents, mais ici l’amour de soi-même, condition de l’amour de l’autre, laisse à penser que les modèles ont été fiables. À partir de là, Nicole Jeammet montre éloquemment combien, à l’opposé des exemples précédents, les amants du Cantique réconcilient à merveille « amour, sexualité et tendresse ». Mais n’est-il pas inquiétant qu’elle n’ait pu trouver aucun roman contemporain pour illustrer cet amour-là ?
L’auteur analyse d’abord La vie sexuelle de Catherine M. de Catherine Millet et Les particules élémentaires de Michel Houellebecq, afin d’illustrer la « sexualité sans visage ». Dans les deux cas, il s’agit de la mise en scène d’une sexualité plurielle, où le corps de l’autre comme le sien propre sont réduits à de pures machines à jouir. Cette indifférenciation, selon Nicole Jeammet qui se base toujours sur les textes eux-mêmes, serait due au fait que les parents des héros n’ont jamais su, au sens fort, les reconnaître.
Moins tragique, la « sexualité papillonnante », analysée ici à travers Dans ces bras-là de Camille Laurens, s’affirme aussi comme une revanche contre des parents et grands-parents indifférents à leur progéniture. L’héroïne, qui « n’attend des hommes que l’amour », ne se sent vivre qu’en se rendant jalouse d’éventuelles rivales, ou mieux, en supposant qu’elle rend celles-ci jalouses — unique cinéma fantasmatique capable de l’aider à « sortir de l’engluement du même ».
Nicole Jeammet s’attarde moins sur la « sexualité totalisante » vue à à travers Passion simple et Se perdre d’Annie Ernaux et, en passant, Belle du Seigneur d’Albert Cohen. Car il s’agit là de l’« amour fou », plus connu, plus universel, « qui se confond avec un désir absolu d’appropriation » du partenaire. Pour ce faire, les héros sont prêts à tout, dussent-ils se perdre en des relations sadomasochistes, vampirisantes.
Toutes ces non-relations, insiste Nicole Jeammet, sont portées par un désir sexuel si absolu qu’il est impossible à combler, car dissocié d’un « sentiment amoureux fort, durable et constant ».
Une telle opposition, l’auteur pense la résoudre à travers le Cantique des Cantiques où elle voit à l’oeuvre, à la suite de Ricoeur, l’« amour de mutualité ». Il n’est rien dit des parents, mais ici l’amour de soi-même, condition de l’amour de l’autre, laisse à penser que les modèles ont été fiables. À partir de là, Nicole Jeammet montre éloquemment combien, à l’opposé des exemples précédents, les amants du Cantique réconcilient à merveille « amour, sexualité et tendresse ». Mais n’est-il pas inquiétant qu’elle n’ait pu trouver aucun roman contemporain pour illustrer cet amour-là ?