« Dire le chapelet ? allumer un cierge ? caresser la roche de la grotte à Lourdes ? Très peu pour moi ! » Nous sommes parfois tentés de considérer la piété populaire avec méfiance. Or, la piété populaire n'est-elle pas riche de beautés et d'une force évangélisatrice. Cette manière de vivre la foi passe par le corps et se vit en fraternité, ose dire sa joie et ses peines. Elle recèle des trésors qu'il s'agit d'honorer : « Les expressions de la piété populaire ont beaucoup à nous apprendre et [...] elles sont un lieu théologique auquel nous devons prêter attention » (Evangelii Gaudium, 126). La piété populaire est d'abord un vécu à partager qui donne le goût de contempler ces manifestations colorées de la foi.

L'expérience spirituelle est ici celle d'une capacité spontanée à s'appuyer sur Dieu, de qui vient tout secours ; c'est pourquoi la piété populaire tient une grande place dans le cœur des pauvres qui savent d'expérience combien nous sommes tous vulnérables. Si elle est l'apanage des cœurs humbles, la piété populaire n'est cependant pas la foi des ignorants, c'est la foi du peuple ; elle émane de lui et le constitue comme communauté ecclésiale, elle édifie l'Église. Cette piété est l'expression d'un élan en quête de la Source de la vie. Les évangiles attestent qu'en Jésus, qui s'adresse de la même façon aux puissants et aux petits, Dieu accueille cet élan et l'enrichit.

L'Église est appelée à laisser cette foi du peuple se déployer, tout en se prémunissant contre certains risques. Un premier apparaît dans le développement de rites qui ne sont plus référés à l'Évangile ou au Christ ; il apparaît nécessaire d'opérer un discernement. Un autre risque touche à l'unité lorsque, derrière ces pratiques, diverses sensibilités religieuses s'opposent ; ce qui devrait être le lieu de la communion, à savoir la célébration ensemble d'une même foi en Dieu, devient alors source de divisions. La piété populaire, quand elle reste fidèle à l'Esprit, est riche d'un immense potentiel de sainteté.