THÉRÈSE DE LISIEUX AU RISQUE DE LA PSYCHOLOGIE
Préf. J. Arènes. Presses de la Renaissance, 2010, 208 p., 18 euros.
 
Les temps où psychanalyse et théologie ferraillaient à qui mieux mieux semblent aujourd’hui révolus. Et le « cas » Thérèse de Lisieux aura été au coeur de cet affrontement : plus qu’un armistice entre des disciplines jadis arrogantes, c’est la convergence de deux logiques de l’humain qu’illustre cet ouvrage, de l’humain unique et nullement fragmentable, en dépit de ses disparités et tensions intérieures. Les deux approches ne sauraient se hiérarchiser, l’une, centrale, toisant l’autre, périphérique. Toutes deux sont centrales (comme dans un ovale), et cependant inabouties et scellées d’incomplétude. Entre elles deux subsiste un écart, un hiatus ineffaçable, faille ou fissure qu’on devine fondatrice, car c’est le lieu inappropriable d’où émerge la puissance du désir. Expérience d’une souffrance (sans jouissance, précise Denis Vasse) que l’on tente d’adoucir par les puissances de l’imaginaire : illusion, dira-t-on, et pourtant nécessaire – rappelle Maurice Bellet – à l’« invention » du désir. Ce n’est que dans un deuxième temps que seul l’amour supporte l’incomplétude et consent sans artifice à l’impérissable mais constitutive blessure. Chacun de ces dix-huit regards portés sur Thérèse est présenté, ses mérites et son intérêt exposés, avec autant de clarté que d’honnêteté. Le maître d’oeuvre, Jean Clapier, tente de pallier les limites et insuffisances de chacune de ces tentatives en s’inspirant de sa propre lecture théologique : le lecteur en sera sans doute rasséréné, mais était-ce bien nécessaire ? Thérèse, de toute façon, s’en sort haut la main, en sa singularité irréductible.