Le partenariat laïcs-religieux dans les établissements scolaires congréganistes se développe depuis une quarantaine d'années et est appelé à faire un nouveau pas. La relecture de cette période fait entrevoir plusieurs enjeux, l'un pour la société et l'autre pour l'Eglise:
 1. Relever le défi de l'éducation dans un contexte nouveau sur un fond de changements rapides de la vie en société.
2. Trouver de nouvelles formes de communion, de formation et de partage  des responsabilités dans l'Eglise née de Vatican II entre tous les acteurs de sa mission.
3. Mieux transmettre les charismes fondateurs.

Une nouvelle étape se dessine, caractérisée par un partage spirituel  plus profond entre religieux et laïcs et plus de travail en équipe. 
Les laïcs sont devenus davantage porteurs de l'héritage spirituel, les religieux n'étant plus les seuls à transmettre les charismes d'origine ; ils reçoivent aussi des laïcs ce qui leur est propre.
Ironie (et chance) de l'histoire : dès l'origine, les "collèges jésuites" se sont développés à la demande et grâce au partenariat des autorités des villes ou régions qui s'y sont impliquées.Cela a rendu possible un chemin original et fécond en matière d'éducation. Après des siècles de "pouvoir" des religieux dans des établissements scolaires, la période récente présente un vrai renversement de situation. Cette nouvelle donne fait redécouvrir au réseau jésuite et ignatien l'intérêt d'un vrai partenarait où chacun existe réellement; elle les invite à vivre leur identité propre de manière renouvelée. Ce sont des laïcs, et non plus les religieux, qui sont en charge de la marche des établissements. Ils sont amenés à incarner sur le terrain l'esprit des fondateurs et veulent s'en nourrir davantage,  ce qui transforme leur propre manière de se percevoir. Les congrégations, quant à elles, s'efforcent avec une grande pauvreté en moyens humains et souvent sans prise directe sur le quotidien des établissements, de transmettre leur charisme propre par la formation et la co-responsabilité effective à tous les niveaux. Ce faisant, elles voient leur identité propre transformée.
Tout ceci ne va pas sans tensions ni résistances  chez les uns et les autres.
La passion commune pour la mission d'éducation a permis aux partenaires de surmonter peurs  et incompréhensions. Le partenariat se caractérise souvent  aujourd'hui par une joie profonde à travailler et à se former ensemble, à se connaître dans des espaces de convivialité de plus en plus nombreux. La connaissance commune des sources, la prière et l'échange plus gratuit s'inscrivent de plus en plus largement dans ces espaces. En bien des endroits, on est passé de la collaboration plus ou moins imposée par les événements à un partenariat voulu et à une communion à la même source spirituelle.
Déjà considérablement institutionnalisé, ce partenariat se cherche encore. Il est sage probablement de ne pas  vouloir tout fixer trop vite et de laisser encore mûrir dans un dialogue confiant les formes de ce partenariat.
 
Comment poursuivre ce chemin ?
Il s'agit encore de faire confiance à l'intuition fondatrice d'Ignace de "chercher et trouver Dieu en toutes choses.". Les outils ignatiens restent d'une grande efficacité pour apprendre à lire comment le Seigneur vient nous rejoindre dans ce partenariat au service d'une mission commune.
La relecture dans la durée fait apparaître la confiance vécue et donne la joie de l'accueillir comme un don de Dieu. Continuer à lire ensemble ce que Dieu fait déjà crée un climat de confiance et ouvre à l'accueil des différences pour poursuivre ensemble l'oeuvre engagée. L'Esprit appelle à s'enrichir mutuellement  des manières - diverses selon les états de vie -  de vivre une même spiritualité. Ce chemin d'écoute mutuelle va se transcrire dans des projets éducatifs rénovés, des projets d'établissements et des "manières de procéder" pédagogiques.
La formation à la spiritualité, par ce partenariat, des nouveaux arrivants dans nos réseaux est un défi actuel majeur. La manière, en formation, de vivre et de partager une même ligne spirituelle peut permettre ou non à ceux qui sont loin de l'Eglise d'accéder à une expérience de vie intérieure et leur donner l'occasion
d'approcher la foi en Dieu.
Il est urgent de consentir à de nouvelles recherches ensemble. (Exercices adaptés, mise à disposition et expérimentation d'outils, temps de connaissance commune) pour favoriser ce partage de l'héritage spirituel.
Le partage d'expériences a nourri le réseau des premiers "collèges" : il est plus que jamais nécessaire pour poursuivre le chemin.
Ce partenariat dans les établissements  peut modestement éclairer et enrichir d'autres lieux d'Eglise : on peut y lire en filigrane le visage du Partenaire qui souhaite faire réussir notre humanité.

Jean-Paul Lamy