L'inquiétude est le lot quotidien, obsédant, de ceux qui n'ont rien ; démunis, exclus, oubliés ou méprisés, la lutte quotidienne pour survivre est incessante ; uouver les moyens de satisfaire les besoins de chacun et particulièrement des enfants se vit dans une inquiétude permanente. Il y a là d'abord une question de justice que doivent assumer le prochain et la société. Faire justice, pratiquer la solidarité, de sorte que cette tension permanente, inhumaine et insupportable, devant l'avenir bouché, soit soulagée. Mais une telle inquiétude — du manger et du boire, du vêtir et se loger — habite le coeur de chacun, et pas seulement des plus pauvres : le sermon sur la montagne (Mt 6,25-34) et, à sa suite, la spiritualité de saint François invitent à trouver le repos face à cette inquiétude : « Ne vous inquiétez pas du lendemain. »
C'est du lendemain aussi que, sur un autre plan, le responsable est inquiet. Soucieux du destin de sa communauté, il affronte l'avenir qu'il sait dépendre, au moins en partie, de la qualité et de la pertinence des décisions à prendre. Fût-elle prise à l'aide d'un grand nombre de conseillers, la décision reste un pari. Prendre une décision, c'est avancer vers l'inconnu de l'avenir. Et souvent, l'inquiétude liée à cette responsabilité se traduit précisément en indécision. Comment trouver le repos, la sérénité, dans les décisions face à l'inconnu de l'avenir ?
L'inquiétude accompagne aussi l'itinérance. Le migrant, le réfugié, le déplacé vivent douloureusement l'insécurité de leur position, les aléas de leur mobilité, la quête de droits accordés de manière souvent arbitraire. Leur vie est inquiète, et ils aspirent de tout leur être à trouver un lieu où se poser, sinon se reposer.
Plus existentielle, et par là plus caractéristique de l'expérience humaine, l'inquiétude domine également le coeur de l'homme comme insatisfaction quant à son être même : elle vient de n'être point là où l'on pense, où l'on désire, où l'on imagine pouvoir être. On voudrait être plus fort, meilleur, aimer davantage. C'est l'esprit qui est ici inquiet, sans savoir comment trouver le repos. Cette inquiétude-là est constitutive de notre humanité.
Qu'elle soit liée aux besoins, à l'affrontement à l'avenir, à l'insécurité ou à cette profonde insatisfaction qui définit la condition humaine, l'inquiétude accompagne le mouvement, la mobilité de l'être qui le caractérise comme vivant: Le mort est immobile, et n'est plus inquiet (Jb 3,13-19 !). L'inquiétude est essentiellement, étymologiquement en tout cas, « non-repos » : « m-quiét-ude ». Le repos serait donc le contraire de l'inquiétude : trouver le repos délivre de l'inquiétude. Mais quel repos ? Lequel libère de l'inquiétude ? Et s'il nous en libère, est-ce en la supprimant, en la faisant cesser ?
 

La porte d'entrée du repos


La Bible nous raconte qu'après leur sortie d'Egypte les fils d'Israël ont « séjourné » au désert avant d'atteindre le pays de la promesse. Après être nés gratuitement à la liberté (une liberté nue, absolue), il a fallu un long temps, celui d'une génération au moins, pour qu'ils apprennent à vivre libres, à reconnaître et à maintenir vivant le fondement de cette liberté. Le désert est un temps dur, un temps d'errance de faim et de soif, de conflit et d'amertume, de tentation et de découragement. Temps de l'éducation (Os 2 ou 11), où le peuple apprend à ne dépendre que de Dieu seul, à ne compter que sur sa parole et sa promesse.

« Ils erraient au désert, dans les solitudes, sans trouver le chemin d'une ville à habiter ; ils avaient faim, ils avaient soif (...) et lui les a délivrés, acheminés par un droit chemin, pour atteindre la ville à habiter » (Ps 107,4-7). La fin de leur errance est le pays promis, où ils vont pouvoir habiter, demeurer, s'installer. Le pays est le lieu du repos, où chacun pourra vivre sous le figuier et l'olivier : « Sur des prés d'herbe fraîche, vers les eaux tranquilles, tu me fais reposer » (Ps 23).

Habiter en paix. Tel est aussi le repos atteint par le roi David — après avoir été longtemps poursuivi, traqué, sans cesse harcelé par l'ennemi — « quand le roi habita sa maison et que YHWH lui eut accordé le repos face à ses ennemis » (2 S 7,1). La promesse de Dieu à David ouvre à la paix la perspective d'une durée et d'une stabilité. Habiter sa maison en est toujours la symbolique. Le repos et la paix sont établis fermement sur la solidité de la royauté davidique, objet de la promesse. Le repos après le temps d'errance au désert, c'est habiter le pays promis ; le repos après les luttes et les guerres de David, c'est la solidité et la stabilité de la demeure La promesse de YHWH de donner le pays inclut d'y habiter en paix et dans le repos. Mais alors, le serment du Ps 95 ne vient-il pas mettre cette promesse complètement en cause : « Dans ma colère, je l'ai juré : jamais ils n'entreront dans mon repos » ?
La Lettre aux Hébreux a bien perçu le paradoxe et en discute longuement (3,7-4,13). Elle remarque d'abord que ce ne sont pas tous les fils d'Israël qui entrèrent dans le repos de la terre promise, mais seulement ceux qui, par la foi, écoutèrent la parole de YHWH. Et surtout, elle affirme : « Dieu de nouveau fixe un jour, un aujourd'hui, disant en David après si longtemps : " Aujourd'hui, écouterez-vous sa voix ? " [Ps 95,7] (...) Un repos, celui du septième jour, est réservé au peuple de Dieu. » Chaque jour, tout aujourd'hui, est le moment favorable à la décision de foi, par laquelle on entre dans le repos. On n'entre pas naturellement, après l'errance, dans le repos du pays promis ; on n'entre pas naturellement, après le combat, dans le repos de la paix stable ; on n'entre dans le vrai repos que par la porte d'entrée d'une décision de foi, en réponse à la promesse toujours actuelle, en chaque aujourd'hui de Dieu. Et le repos dans lequel on entre ainsi est meilleur que celui du pays ou de la paix : c'est le repos du septième jour, du sabbat. Nous allons y revenir.
Aujourd'hui toujours valable de la promesse... L'aujourd'hui qui ouvre les premières paroles de Jésus à la synagogue de Nazareth résonne lui aussi comme une promesse : aujourd'hui ouvre l'ère messianique, l'année de grâce de la part du Seigneur (Le 4,21). Or, à la suite de cette première annonce de l'Evangile, la vie de Jésus n'est pas de tout repos, tant s'en faut ! Elle est itinérance, sans lieu où reposer la tête, sans tanière où se réfugier. Serait-ce que la promesse de l'Evangile ne vise pas le repos ? En fait, les lieux et les moments de repos pour Jésus apparaissent clairement : c'est l'hospitalité qu'on lui offre et dont il fait une fête, c'est la conversation à laquelle on l'invite et dont il fait une quête de la vérité. Le repos à la suite de Jésus, c'est demeurer sans s'installer, habiter sans être chez soi, aimer sans s'attacher. Paradoxalement, à la suite de Jésus, le repos peut être aussi trouvé dans le mouvement.
 

Le repos du sabbat


La prescription du jour du sabbat dans le Décalogue ne revêt pas la forme négative du commandement 1. Ni interdit (« tu ne... pas ») ni impératif (contrairement à ce que proposent souvent les traductions), la prescription du sabbat commence par un verbe à l'infinitif : « Observer... » (Dt 5,12), ou : « Se rappeler... » (Ex 20,8). Peut-être pourrait-on rendre cette tournure par : « Il convient d'observer... », ou bien : « Il faut se rappeler... » Si, pour atteindre la visée du Décalogue qui est de tenir vive la liberté initialement reçue, il y a des choses à proscrire, des chemins interdits (ceux qu'indiquent les commandements), l'obligation du sabbat et celle de l'honneur à rendre aux parents sont d'un autre ordre : un chemin ouvert, « infini », où l'on progresse par la régularité et la persévérance, par l'intention entretenue.
Le jour du sabbat se caractérise par la cessation du travail, en tant que celui-ci est une servitude, selon la version de Dt 5 ; c'est ce qu'exprime la motivation de l'obligation : « Tu te souviendras que tu as été en servitude (...) c'est pourquoi YHWH ton Dieu t'a commandé de garder le jour du sabbat. » La même motivation est invoquée lors de renonciation des lois de la libération des dettes et de la libération des esclaves (15,15), qui sont fort proches de l'obligation sabbatique. Sortir de la servitude du travail, de la servitude qui s'immisce dans les rapports économiques ou sociaux, telle est la visée première du sabbat. C'est une question de justice. Et la voie de cette sortie, dans sa dimension sociale et politique, commence par l'observance du septième jour pour chacun et chacune, par la cessation hebdomadaire du travail. C'est ainsi que tous (« ton fils, ton serviteur, ta servante... ») et chacun entrent dans le repos.
Si la version du Décalogue en Ex 20 procède du même point de départ et possède la même visée que celle du Deutéronome (« C'est moi YHWH qui t'ai fait sortir du pays d'Egypte, de la maison de servitude... »), la référence n'est ici plus la même : cesser le travail, c'est imiter Dieu lui-même « qui s'est reposé le septième jour ». Le repos du sabbat, comme sortie de l'occupation servile, fait entrer dans le repos de Dieu même.
Cesser le travail, certes, mais pour quoi faire ? La tradition a toujours tenu de manière très ferme à l'obligation du sabbat, et en a développé le sens et les aspects de manière très riche. Le repos du sabbat, la liberté qu'il ouvre, fournissent l'occasion de la louange de Dieu dans la prière personnelle et collective, permettent de consacrer du temps à l'étude de la Torah (cf. Ps 119). Par là est concrètement vécue la rencontre de Dieu, la familiarité avec lui :
 
« Viens, bien-aimé, à la rencontre de la fiancée, accueillons le visage du sabbat » 2.

Le repos et la liberté du sabbat introduisent à la présence à Dieu. Cesser le travail, mettre fin à la servitude, est une démarche dont l'intention est de trouver le repos dans la rencontre gratuite et amoureuse de Dieu. Cesser le travail : tout travail ? En tenant fermement, et avec raison, à la prescription sabbatique, la tradition a couru le risque de durcir l'obligation, de la rendre plus opaque quant à sa visée, par les débats sur son contenu : le sabbat est la cessation du travail, mais qu'est-ce qui est travail et qu'est-ce qui ne l'est pas ? De tels débats restent vifs au temps de Jésus, qui les affronte : « Le Fils de l'Homme est maître du sabbat » (Le 6,5).
Le « travail » caractéristique de Jésus pendant la période galiléenne est de soigner et de guérir. Une telle activité est-elle un travail, et, de ce fait, passible de l'interdiction sabbatique ? La question, qui peut paraître moderne, est posée dans l'épisode de l'homme à la main sèche, un jour de sabbat, à la synagogue : « Est-il permis le jour du sabbat défaire le bien 3 plutôt que le mal, de sauver 4 une vie plutôt que de la perdre ? » (Le 6,8). Ce qui apparaît ici, c'est que le « travail » de Jésus prend, du fait du lien avec la thématique du sabbat, une dimension nouvelle, celle d'une oeuvre de l'ordre de la création ou de l'ordre du salut ; bref, d'une oeuvre de Dieu. L'évangile johannique explique cela plus amplement, en faisant comprendre comment l'activité de Jésus est l'oeuvre même de Dieu. De la guérison de l'infirme à la piscine de Bethesda, encore un jour de sabbat, Jésus dit : « Mon père est à l'oeuvre jusqu'à présent, et j'oeuvre moi aussi » (Jn 5,17).
Si le sabbat permet d'entrer dans le repos par la cessation du travail, en libérant de la servitude qui y est inhérente, il permet aussi — dans la révélation de ce qu'est réellement l'oeuvre de Jésus — de trouver le repos en ouvrant concrètement notre faire au faire de Dieu. Le repos du sabbat ne tient pas seulement à la cessation du faire mais aussi à ce que cette cessation permet de reconnaître celui qui fait effectivement les choses à travers notre faire. Cesser de faire pour laisser faire. C'est là un vrai repos, plus vrai que la simple absence de faire, mais non sans passer par cette cessation. Le vrai repos auquel conduit l'attachement au sabbat est cette dépossession du faire (qui est mien) dans un laisser faire (Dieu). C'est ainsi que nous sommes libérés de la peine, de l'inquiétude du faire : « Prenez sur vous mon joug, et vous trouverez le repos » (Mt 11,29). Paradoxalement, ce chemin « infini » qu'est l'observance régulière du sabbat conduit au vrai repos du septième jour, celui de Dieu même, ainsi que nous l'assure la version du Décalogue en Ex 20. Celui-là même que la Lettre aux Hébreux nous assurait être, en chaque « aujourd'hui », l'objet de la promesse.
 

Le repos de l'esprit


Plus difficile à trouver que le repos du faire est le repos de l'esprit. C'est vers les sages qu'il faut ici se tourner, mieux : vers la Sagesse Car la Sagesse est — tardivement, il est vrai, dans l'histoire biblique — quelqu'un, une personne, que l'on peut choisir pour « compagne de vie » :
 
« Rentré chez moi, je me repose auprès d'elle, car la fréquenter ne cause pas d'amertume, ni de peine vivre en son intimité, mais plaisir et joie » (Sg 8,16).

Non seulement Dame Sagesse peut être envoyée nous aider et peiner avec nous (9,10), mais, en certains passages, elle ouvre quelques-uns de ses secrets. Ecoutons le discours qu'elle tient en Si 24. Elle se dit « issue de la bouche du Très-Haut » : on peut alors l'identifier à la Parole de Dieu, créatrice de toutes choses, ou bien au souffle de Dieu, à son esprit (Gn 1). Mais si elle est « comme une vapeur », si elle « demeure dans les deux », si elle siège sur la « colonne de nuée », c'est qu'elle est — ramassant en elle ces trois symboles traditionnels — médiatrice de la présence de Dieu 5. Heureuse perspective. Parole ou esprit, Dame Sagesse surtout, introduit à la présence de Dieu.
Dame Sagesse a beaucoup voyagé :
 
« J'ai fait le tour du cercle des deux, parcouru la profondeur des abîmes, dans les flots de la mer, sur toute la terre, chez tous les peuples et toutes les nations, j'ai régné. »

Dame Sagesse est en effet « mobile » : c'est là une de ses principales caractéristiques (Sg 7,22). Et en tout son parcours, ce qu'elle trouve et visite, ce en quoi elle se retrouve, en tous peuples et nations, c'est évidemment le meilleur de leur sagesse, les plus beaux de leurs monuments, la fine pointe de leur culture ou de leur intelligence : le temple de Karnak en Egypte, l'Acropole d'Athènes, les sites de Petra... Unique sagesse, elle « règne » sur toutes les sagesses particulières. Au fond, la Sagesse ressemble un peu à un touriste : elle voyage pour voir de ses yeux les plus belles merveilles du monde. Cette image un peu risquée aide à faire comprendre quelque chose de l'aventure de l'esprit humain : lui aussi est mobile, pénétrant ; lui est aussi curieux du meilleur ; lui aussi désire visiter le plus fin des cultures ; lui aussi s'engage ainsi dans des rencontres fécondes. Comme la sagesse, l'esprit est mobile, toujours en mouvement. Le touriste, on le sait d'expérience, est infatigable, insatiable. Telle est peut-être la peine de l'esprit : passer toujours d'une chose à une autre, jamais satisfait de ce qu'il voit (ou photographie !) ; bref, perpétuellement inquiet : le mouvement l'emporte. Et si le touriste s'arrête quelque part, pour tranquillement contempler ou jouir de quelque chose, il n'est plus un touriste.
L'esprit, toujours en mouvement, cherche aussi (c'est son désir) un lieu où se reposer. Ainsi de Dame Sagesse : « Parmi eux tous, j'ai cherché le repos... » Si l'aventure de l'esprit est celle de la mobilité et du voyage, l'esprit aspire au repos, comme un accomplissement de sa mobilité. Où donc, et comment, Dame Sagesse trouvera-t-elle le repos, où pourra-t-elle s'installer, demeurer 6 ? « En Israël, en Sion, la cité bien-aimée, j'ai trouvé mon repos. » C'est la ville sainte qui est le lieu où s'accomplit le voyage de Dame Sagesse. Plus encore, « dans la Tente sainte », c'est-à-dire dans le Temple où elle « officie ». Le lieu du repos de l'esprit, c'est la liturgie. L'esprit trouve son vrai repos en la présence de Dieu. La liturgie est paradoxalement une activité (Yopus divinum, dira la tradition monastique) qui est en même temps passivité. Elle prend l'esprit dans une activité-passivité par où il entre dans le repos, en la présence de Dieu.
Mais comment la Sagesse a-t-elle trouvé le lieu de son repos ? Le Créateur de toutes choses lui a donné un ordre, et elle a obéi. Si l'esprit trouve son repos dans la liturgie, il ne trouve pas ce repos de lui-même, par un acte de sa volonté propre Non, il le trouve parce qu'il lui a été montré, paroe qu'il y a été invité et qu'il s'est rendu à cette invitation. Parce qu'il a obéi, est sorti de lui-même en faisant confiance à la voix qui le convoque, il trouve son repos. Mouvement et repos, activité et passivité, telle est l'aventure de l'esprit (humain !) qui trouve ce repos en ce lieu singulier qu'est la liturgie parce qu'il obéit à l'appel de la présence. Mais poursuivons notre lecture. En ce lieu, la Sagesse s'enracine et grandit. La Sagesse se compare alors aux arbres pleins de gloire de la terre d'Israël, puis elle énumère les parfums qu'elle offre, non sans achever sa liste avec l'encens de la liturgie, dans le Temple ! Ce qui repose l'esprit et lui permet de dégager un exquis parfum, de donner le meilleur de lui-même, c'est de s'enraciner quelque part, dans une singularité. Il peut alors en inviter d'autres sous son ombre, en rassasier (satisfaire !) d'autres par ses fruits, inviter : « Venez à moi, vous qui désirez (...) et rassasiez-vous de mes produits. » Mais elle conclut :
 
« Ceux qui me mangent auront encore faim, ceux qui me boiront auront encore soif, celui qui m'obéit n'aura pas à en rougir, et ceux qui oeuvrent par moi ne pécheront pas. »

Si l'aventure de l'esprit est telle que nous l'avons dite, alors la réflexion du sage s'approfondit. Le repos accomplit la mobilité de l'esprit, laquelle a pour moteur ce qui est de l'ordre du désir : faim et soif. Certes, l'esprit peut trouver le repos, mais aussi repartir si son désir se réveille, non satisfait. Et ce n'est pas de consommer les fruits de la sagesse qui l'apaise Obéir à la sagesse délivre de la honte et du péché dans l'ordre de l'agir, mais ne permet pas encore d'apaiser le désir qui met l'esprit en mouvement. Avec Dame Sagesse, on reste encore en attente. En attente de quelqu'un qui pourra nous combler : « Qui boira de l'eau que je lui donnerai n'aura plus jamais soif » (]n 4,14), dira Jésus à la Samaritaine ; puis, à la foule rassemblée à la fête des Tentes : « Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi ; et il boira, celui qui croit en moi » (7,37).
 
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Eprouvée dans notre vie tant par l'errance que par les combats pour l'avenir, tant par le courant d'une activité sans fin que par l'incessant mouvement de l'esprit, l'inquiétude signifie le désir, la quête de tout notre être vers le repos. Dans la Bible, le repos apparaît lié à la promesse et, dans un premier temps, il prend la forme d'une cessation du mouvement. S'arrêter, pour se reposer, être libre. Mais le repos n'est pas seulement de l'ordre de la cessation : fin de l'errance dans l'installation ou fin de la lutte dans la paix, fin du travail dans le loisir ou fin du voyage dans la fixation. Le repos est atteint à travers la cessation, parce que celle-ci ouvre accès à la présence de Dieu mais aussi de l'autre : l'ami, le proche. L'autre nous invite à entrer dans le repos avec lui, ce repos promis par Dieu : le repos du septième jour, où l'on n'entre que par l'écoute. Car le vrai repos ne réside pas dans la cessation mais dans la présence : « Et notre coeur est sans repos, tant qu'il ne demeure en Toi. »



1. Cependant, la prescription du sabbat, nettement plus longue que les autres, contient un interdit « Tu ne feras aucun ouvrage » Cf A de Médina, « Le repos du septième Jour », Christus, n° 107, juillet 1980, pp 297-307.
2. Ouverture de l'office du sabbat à la synagogue
3. Allusion probable à l'acte créateur. « Dieu vit que cela était bon »
4. Cest ici que le terme « sauver » est employé pour la première fois dans l'évangile de Luc
5. La « vapeur » renvoie à l'Esprit qui planait sur les eaux (Gn 1,2) , la « demeure dans les cieux » fait référence au modèle de la Tente de la présence (Ex 25,40 , Sg 9,8 , Hb 8,5) , la « colonne de nuée » signifie la présence de Dieu au désert. Triple symbole de la présence de Dieu au monde et au peuple
6. On retrouve les verbes du repos « davidique »