Préf. N. Capelle.
Salvator, 2009, 224 p., 20 euros.

 
La question de l’identité est devenue cruciale en ce temps où l’individu est devenu « incertain », où les âges de la vie et le métissage des cultures sont en pleine recomposition. Robert Comte, frère des Écoles chrétiennes, respon­sable de formation dans les diocèses de Lyon et de Saint-Étienne, rédacteur à la revue Catéchèse, s’est longuement affronté à ce problème et nous livre une synthèse de valeur, inspirée de ses travaux et de nombreuses lectures, en particulier de Ricoeur, Kierkegaard, Erik­son, Beauchamp, Levinas, et d’autres auteurs d’outre-Atlantique.
Ces références n’empêchent pas notre auteur (c’est son charisme) de nous offrir un parcours clair, pédago­gique et convaincant sur l’élaboration de l’identité personnelle : les lieux, les temps, les relations où se tisse l’identité ; ses étapes et ses remaniements ; les sources et les dimensions de l’identité chrétienne, etc. L’« identité narrative » de Ricoeur lui sert de fil conducteur. On note en particulier l’éclairage bi­blique : c’est dans l’histoire et par la mémoire qu’Israël prend conscience de son identité, qui est sa vocation même, et c’est par la relecture de cette his­toire que le croyant s’y « retrouve ». Des pages très justes aussi sur l’appel et la réponse : l’identité se trouve, car chacun est toujours précédé, et elle se construit, car il lui faut répondre. Elle se reçoit comme un don, « ce qui nous soulage du fardeau d’avoir à nous réa­liser par nos propres forces et d’avoir à nous justifier », mais elle est aussi le fruit d’un discernement, de choix et de renoncements courageux. Le rôle de la communauté y est finement montré – ce groupe de personnes qui partagent un passé commun, le comprennent pour interpréter le présent et s’ouvrir l’avenir, et expriment leur identité dans une narration commune.
L’accent mis sur le « narratif » éclaire le parcours. C’est dire l’importance de l’écoute, peut-être insuffisamment souli­gnée : un récit suppose un écoutant. On narre son histoire à autrui. C’est induire la place de l’écoutant, du compagnon de route, de l’accompagnateur spiri­tuel. Dans la prière, elle est exprimée devant Celui de qui toute paternité tire son nom.
Un livre de valeur dont la triple di­mension anthropologique, théologique et spirituelle devrait éclairer bien des formateurs dans le domaine social et ecclésial.