Au fil des années, le nom de Bruno Régent devient familier à ceux qui aiment les Écritures. Prenant appui sur les travaux de Paul Beauchamp, de Marie Balmary et d'André Wénin, l'auteur reconnaît aussi qu'il rédige ses textes avec seulement devant lui une bible ouverte et un écran tout blanc. Après ses derniers commentaires de la Genèse et de quelques paraboles, puis son stimulant guide De la vie spirituelle : repères (Fidélité, 2017), voilà qu'il se penche ici sur l'itinéraire d'Abraham et de Sarah. Sa méthode est originale : paragraphe après paragraphe, il interviewe les personnages en présence et, de temps à autre, le narrateur. Chacun s'exprime comme s'il se confiait au micro de l'auteur, ce qui donne à la lecture un ton familier, presque joyeux, malgré des drames pathétiques. En effet, dès les premières pages, on est frappé par l'imbroglio familial dans lequel s'emmêlent les destinées d'Abraham et de Sarah. Le fameux changement de nom d'« Abram » en « Abraham » et de « Saraï » en « Sara » devient le fil rouge du récit et met au jour d'étonnants secrets cachés au détour de versets apparemment anodins. Et voici qu'on découvre, étonnés, à quel point le grand appel divin amorçant le dialogue inaugural entre Dieu et l'Humanité va de pair avec la libération personnelle d'un homme et d'une femme. La traduction bien connue de l'appel d'Abraham par Marie Balmary (« Va vers toi-même »), répétée à l'envi dans ce monde où chacun se cherche, est complétée ici d'un bienvenu « Sors de toi-même ». La saga d'Abraham est un livre non seulement à lire mais à partager en petits groupes car il viendra éclairer la vérité de nos relations, les nôtres ou celles de nos proches, parfois bien compliquées, en se gardant toutefois d'une lecture biblique trop psychologisante. Ce qui fait la valeur de ce petit livre.