À qui se lance dans les Exercices spirituels (ES) de saint Ignace de Loyola, il est bien recommandé, à l'ouverture de chaque temps d'oraison, de demander une grâce adaptée au point où il en est de son parcours. Mais, à aucun moment, dans le déroulement des quatre semaines des Exercices, il ne lui est proposé de demander la force, bien qu'elle soit un don de l'Esprit.

À parcourir le livret des Exercices spirituels, on relève avec peine une dizaine d'emplois du mot « force »1. Mais on peut aussi y associer des occurrences de l'adjectif « fort » ou « forte » ainsi que des verbes « s'efforcer » ou « fortifier », et le substantif « effort ».

Dans les annotations au début du livret, le terme « force » apparaît aux numéros 7, 16 et 18, concernant le retraitant. L'accompagnateur, s'il voit le retraitant « désolé et tenté », doit lui donner « courage et forces pour l'avenir » (annotation 7). Un retraitant saisi par une « attache » ou une « inclination désordonnée » est appelé à « réagir de toutes ses forces, afin d'aller à l'opposé » (ann. 16). Les capacités et dispositions intimes des retraitants à faire les Exercices sont également évoquées : celui qui est « de peu de force » et « celui qui veut faire effort » (ann. 18). Pour cette annotation, Sylvie Robert2, dans sa traduction des Exercices, remplace l'expression « de peu de force » par « faible de santé » et l'expression « celui qui veut faire effort » par « qui veut trouver de l'aide ». La « force » et l'« effort » sont ici du registre des capacités physiques, morales ou psychiques.

Repérage

Ensuite, au fil des pages3, le mot « force » et les termes de même racine n'apparaissent qu'épisodiquement. C'est dans les règles pour le discernement des esprits, notamment dans celles de première semaine (ES 314-327), que l'on trouve le plus grand nombre d'occurrences, clairement associées à l'expérience spirituelle du retraitant. À l'inverse, on n'en trouve aucune dans les règles qui suivent pour un plus grand discernement des esprits (ES 329-336). À croire que, contre la tentation sous la forme du bien et les subtilités de la fausse consolation, la « force », qu'elle soit physique, psychique ou spirituelle, n'est d'aucun secours. Les deux dernières occurrences repérables se trouvent l'une dans les « notes sur les scrupules et insinuations de l'ennemi » (ES 345-351) et l'autre dans les règles pour « sentir avec l'Église » (ES 352-370). Là encore, la traduction de Sylvie Robert propose