Si la fidélité est une exigence de toute foi authentique, faut-il craindre qu'elle ne soit ébranlée par la confrontation avec d'autres croyances ? On comprend, certes, qu'elle puisse être éprouvée par une telle confrontation, et qu'elle risque même de chanceler si elle manque de racines profondes. Mais, dans la mesure où elle se nourrit de la parole de Dieu et d'un loyal attachement à l'Église, ne doit-on pas plutôt penser qu'elle s'affermira ou s'approfondira à la faveur du dialogue avec autrui ?

Nous nous proposons d'abord de recueillir, sur ce point, la précieuse expérience du mouvement œcuménique. Nous nous demanderons ensuite ce qu'il en est non plus dans le dialogue entre chrétiens séparés, mais dans le cadre des débats entre le christianisme et les autres religions. Il sera alors possible de dégager, au terme, l'exigence spirituelle de la fidélité dans la situation pluraliste de notre temps.

L'œcuménisme

On a cru pendant des siècles que la fidélité à l'Église catholique impliquait un jugement unilatéral sur les « schismatiques » et les « hérétiques » : ils s'étaient séparés de la véritable Église et portaient à eux seuls la responsabilité de cette séparation ; ils devaient donc être condamnés – sauf si, reconnaissant enfin leur péché, ils demandaient leur réintégration dans le corps ecclésial. Il y eut bien des efforts de rapprochement, mais ils n'entamèrent pas la conviction généralement reçue : le devoir de fidélité exigeait que l'on restât intransigeant vis-à-vis des individus ou des groupes séparés de l'Église.

Or, le mouvement œcuménique, tel qu'il s'est développé depuis plus de cinquante ans, procède d'une autre conviction, que le pape Jean Paul II a fortement soulignée dans son encyclique Ut unum sint de 1995 : « L'aspiration de toute communauté chrétienne à l'unité va de pair avec sa fidélité à l'Évangile » (n° 15). De fait, loin que les efforts en vue d'une réconciliation ecclésiale apparaissent comme une concession de la foi catholique, ils s'enracinent dans une conscience aiguë de ce que le Christ demandait dans le