Lorsque Mark Zuckerberg renomme « Meta » son entreprise Facebook, en octobre 2021, nous sortons d'une année marquée par un usage intensif du numérique, une année pendant laquelle plus que jamais le « virtuel » a semblé coloniser le « réel », s'entretisser avec lui, vidant un peu plus l'antagonisme de sens entre les deux termes. « Meta » renvoie à « metaverse », un mot-valise composé de la racine grecque « meta » et du mot anglais « universe » : le métavers est un méta-univers, ou univers au-delà de celui que nous connaissons, un monde numérique structuré et ouvert. Un tel programme « métaphysique » nous confronte à une situation inédite : celle d'être totalement plongés dans un univers artificiel, un simulacre immergeant, qui semblerait achéiropoïète1, car il ne serait pas le fait d'un seul homme, ni d'une seule entreprise, mais de millions, voire de milliards d'utilisateurs et de concepteurs. Le métavers peut paraître comme l'aboutissement de la plongée de nos vies dans les images numériques depuis un quart de siècle.

Au cinéma, des mondes échappatoires

Ce projet semble réaliser les mondes décrits dans une série de films comme Free Guy (de Shawn Levy, 2021), Ready Player One (de Steven Spielberg, 2018), précédés par des œuvres aussi diverses que Matrix (des frères Andy et Larry Wachowski, 1999), eXistenZ (de David Cronenberg, 1999) ou Tron (de Steven Lisberger, 1982). Ces films s'inspirent de romans de science-fiction des années 1980, spéculant sur des techniques alors émergentes. La plupart, comme Le neuromancien de William