Le cinéma est une fenêtre ouverte sur le monde et un miroir du cœur humain. Il n’est pas nécessaire que certaines fictions traitent de sujets explicitement religieux pour qu’elles soient profondément spirituelles.

Cinéma et spiritualité : ces deux mots peuvent sembler contradictoires. N’allons-nous pas au cinéma pour oublier les soucis de la vie, pour nous changer les idées ? Pourtant, si le spirituel est une dimension fondamentale de toute personne, la somme de ses inspirations et aspirations, et si le cinéma est à la fois une fenêtre ouverte sur le monde et un miroir du cœur humain, tous deux doivent pouvoir se rencontrer.

Où est donc le spirituel au cinéma ?

Dès la naissance du cinéma, les sujets religieux ont inspiré des réalisateurs. La Bible est un réservoir inépuisable de récits et de personnages à mettre en scène et ces récits tentent toujours des réalisateurs de toutes convictions. La vie des saints est aussi une grande source d’inspiration.

Mais les films à thème religieux sont-ils seuls porteurs de spiritualité ? Jean Collet, théoricien du cinéma, longtemps journaliste à Télérama, aux Cahiers du cinéma et à Études, écrit : « Presque toujours, ce sont des cinéastes extérieurs à toute religion qui ont réalisé des films vraiment spirituels. »1 Et, un peu plus loin, il assure : « Le cinéma est spirituel par nature. » Déjà, en 1951, Robert Bresson affirmait : « Le vrai langage du cinéma est celui qui traduit l’invisible… Je tente de traduire plutôt des sentiments que des faits ou des gestes. J’essaie de substituer un mouvement intérieur au mouvement extérieur. »

Aujourd’hui, Eugène Green, réalisateur de films singuliers (La religieuse portugaise, La sapienza, Le fils de Joseph), leur fait écho. Il explicite sa recherche spirituelle dans Poétique du cinématographe : « À un moment clef de toute fiction, écrit-il, il y a une conversion : un cœur s’éveille à l’amour, un être du monde s’en retire, un suicidaire se consacre à la vie. Quel que soit le sujet, le cinématographe est toujours conversion : dans les fragments de la matérialité du monde dont le film est composé, le spectateur découvre une présence réelle qui lui fait voir ce à quoi il demeurait aveugle. »2

Nombreux ont été et sont encore les cinéastes soucieux de révéler cette présence réelle. Ils sont trop nombreux pour que nous puissions ici les citer tous. Les vingt premières années du XXIsiècle n’ont pas vu s’amenuiser cette lignée de grands créateurs attachés à rendre visible l’esprit qui est en l’homme, avec Terrence Malick, Eugène Green, les frères Jean-Pierre et