Éditions de Corlevour, 2007, 140 p., 15 euros.

Il y a des textes bibliques que l’on rumine paisiblement, les yeux clos. Et d’autres que l’on garde dans la bou­che, comme un noyau d’olive que l’on tourne et retourne jusqu’à ce qu’il ait produit toute sa saveur. C’est à ce genre de texte que l’auteur, poète, essayiste, dramaturge, traducteur de Ruysbroeck, s’attache de préférence.
Chemin de parole est un ouvrage d’herméneutique sur des récits bibli­ques qui résistent, invitant à un dépla­cement du regard, une écoute oblique. Ainsi, le sacrifice d’Abraham introduit le tragique au coeur de Dieu. Et Jacob, au gué du Jaboc, alors qu’il s’apprête à affronter la colère de son frère, va naître dans un combat contre lui-même par une sorte de baptême de larmes qui re­joue, en sens inverse, le drame des deux premiers frères, Caïn et Abel : « Comme si l’humanité se relevait de sa chute, se lavait de son premier meurtre » pour accéder à la fraternité.
Cette sorte de lectio divina au style somptueux des récits d’Élie, Judas, La­zare, Marthe et Marie, fait vibrer le texte d’harmoniques que nous n’avions pas encore entendues. Comme on entend Mozart pour la première fois quand il est joué par un interprète de talent.