Labor et Fides, coll. « Petite bibliothèque de spiritualité », 2002, 128 p., 19 €

On ne peut que recommander ce parcours digne de tout éloge qui nous restitue la figure si attachante d'Etty Hillesum, avec une rigueur impressionnante qui tranche sur le lyrisme facile et approximatif de bien des commentaires. L'auteur écoute attentivement la résonance biblique qui parcourt le Journal et les Lettres de Westerbork et qui rythme l'écriture de manière de plus en plus dense.
Sans doute l'importance de Rilke est-elle sous-estimée, qui est pourtant une référence majeure de l'évolution d'Etty. Cependant, E. Frank ne la « christianise » pas comme certains l'ont fait imprudemment. Non seulement elle montre comment une annexion de ce « chemin inattendu » au monde chrétien est préjudiciable et injustifiée, mais, avec un discernement spirituel et « pastoral » certain, elle souligne que le vrai danger est la récupération d'Etty par la mouvance New Age. Etty ne propose-t-elle pas (en bon thérapeute qu'elle est) les « éléments d'une sagesse pour être plus heureuse », ce dont la « recherche de soi » contemporaine est fort friande et qu'elle obtiendra au prix d'une lecture laïcisée ou « athéiste » de cet itinéraire hors-norme ? À moins qu'à ne considérer que sa découverte d'un « Dieu faible » ou ne fasse d'Etty, comme Hans Jonas, le porte-parole prophétique d'un nouveau Concept de Dieu après Auschwitz, réputé radical et moderne.
L'ouvrage reste aussi minutieux et probe dans l'analyse que passionnant dans sa démarche Un regret cependant : l'enquête aurait pu prendre en compte ce qu'Etty aura reçu des traditions spirituelles aussi bien juive que chrétienne (la devotio moderna essentiellement) ; mais ce serait sans doute un autre livre !