RENONCEMENT ET HAINE DE SOI
CHRISTUS N°216
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Remi (de) MAINDREVILLE
«Si quelqu’un vient à moi sans haïr son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses soeurs, et jusqu’à sa propre vie, il ne peut être mon disciple » (Lc 14,26). Cette parole de Jésus pose aujourd’hui question, et même si « haïr » indique ici plus une préférence qu’un sentiment violent, il n’empêche qu’au moment décisif Jésus préconise la capacité d’écarter des amours légitimes et naturels au profit de lui-même. Or cela ne semble pas avoir découragé ses disciples à travers l’histoire.
Comment comprendre cette parole ? De quelle haine s’agit-il ? Et comment a-t-elle été entendue et comprise au long des siècles ? Quelles formes de vie spirituelle a-t-elle nourries ? Comment s’est-elle traduite culturellement ? Il est difficile de répondre, parce que l’on rencontre peu la notion de haine dans la tradition spirituelle, mais aussi parce que, intimement liée à l’amour, la haine de soi peut être source d’illusion et aisément glisser d’une purification de l’amour à un enfermement narcissique sans avenir.
Dans les Écritures
La haine proprement dite bénéficie d’un enracinement scripturaire dense et fort d&eg...
Mots clés :
Ascèse
Corps
Désolation
Gloire
Sainteté
Tradition
Désert
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L'EXPÉRIENCE ARTISTIQUE
CHRISTUS N°211
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La rédaction
L’art est donné, il ouvre à plus grand que soi, il élève l’existence. Fruit d’un travail de création, il porte la marque de la gratuité. La relation à la nature, de bien des manières, vient signifier et cet élargissement et cette gratuité. La ville aussi y ouvre par sa beauté, même si l’agitation et les multitudes affairées la dissimulent souvent. Beaucoup de nos contemporains recherchent beauté et gratuité en pratiquant différents arts durant leurs loisirs. Chaque ville moyenne a son conservatoire ; les maisons de quartier sont investies par de nombreuses associations culturelles ; expositions, concerts, festivals se multiplient. Autant d’îlots de gratuité, de vacance, qui nous sont offerts pour nous initier aux arts plastiques ou à la musique, au théâtre ou à la danse. Autant de lieux et de moments dépaysants qui aident à découvrir des capacités créatrices parfois enfouies depuis l’enfance. Émerveillement de voir comment des émotions rentrées peuvent faire sens lorsqu’elles se cristallisent dans une oeuvre d’art, aussi modeste soit-elle. Émerveillement de découvrir autrui à cette aune et de voir le monde autrement, comme transfiguré. À cause de la tentation de la consommation qui vise...
Mots clés :
Art (cinéma, peinture, sculpture)
Gloire
Liturgie
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LA GLOIRE DU SENSIBLE
CHRISTUS N°211
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Jean-Marie Tézé
Cet article a paru dans Christus en juin 1970 au sein d’un numéro consacré à « L’art et la foi ». Il est considéré par beaucoup de chrétiens comme un des plus grands textes esthétiques de cette époque. Nous nous faisons une joie de le faire découvrir à une nouvelle génération de lecteurs, tant le regard et les intuitions du P. Tézé restent d’actualité.
On a l’habitude de considérer l’oeuvre d’art sous le double aspect de la forme et du sensible qu’elle organise. Mais on oublie souvent le plus important. Dès que cette organisation est parfaite, un troisième facteur surgit, essentiel, et qui englobe tout : « splendor formae », le resplendissement de la forme (saint Thomas) ou le rayonnement du sensible (Baudelaire), car les deux ne font qu’un.
Resplendissement de la forme
En tant qu’il est forme, organisation du sensible, figure déterminée, le beau est saisissable. On peut le calculer, l’enseigner. On peut le soumettre à toutes les analyses que l’on voudra : en faire ressortir les motivations profondes, établir les liens qui le rattachent à un niveau culturel, économique et même politique donné. Sous cet aspect, l’objet esthétique est situé dans l’espace et le temps....
Mots clés :
Art (cinéma, peinture, sculpture)
Esprit
Expérience spirituelle
Gloire
Images
Incarnation
Jésus-Christ
Résurrection
Sagesse
Temps
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DANS LA RÉSURRECTION DU CHRIST
23 AVRIL 2011

La mort avait jusqu'alors maté toute espérance ; si celle-ci s'était un moment levée, tout s'était toujours terminé dans un tombeau, dans la solitude, dans le découragement.
La mort, ce n'est pas d'abord l'arrêt d'un fonctionnement biologique. La mort s'oppose à la vie, tout comme la dérision et la jalousie s'opposent à la joie ; tout comme le murmure et le ricanement s’opposent à la louange.
La désespérance est meurtrière de l'humanité, du coeur humain qui veut oser des gestes de bonté et de fraternité. Car à quoi bon, se dit-elle, puisque je retombe dans l'ornière, que je n'ose pas la confiance …?
A quoi bon, puisque je ne réussis pas, puisque mon désir du bien n'est pas obéi... ?
Oui, la mort semble avoir tout pouvoir sur terre, ses habitants jouets de la violence, ballottés entre auteurs et victimes.
Croire que, dans la Résurrection du Christ, nous est révélé que la mort est morte, que la mort n'a plus aucun pouvoir : est-ce croyable, vivable ? Est-ce pour aujourd'hui ?
Il n'y a rien à démontrer, il y a seulement à passer sur l'autre rive, avec le psalmiste (22), qui crie dans la détresse Mon Dieu, Mon Dieu pourquoi m'as-tu abandonné, qui voit la mort arriver jusqu'au verset 22 sauve-moi de la g...
Mots clés :
Dieu
Evangile
Foi
Gloire
Jésus-Christ
Pardon
Passion
Péché
Religions
Vérité
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HOMMAGE À JEAN-MARIE TÉZÉ
04 SEPTEMBRE 2012
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Philippe Charru

Une amie de Jean-Marie Tézé s’est surprise un jour à lui demander au détour d’une conversation :
- Et la mort dans tout cela ?
Après un silence ému m’a-t-elle dit, il lui a répondu :
- J’ai peur d’être submergé par trop de beauté…
et il ajouta :
- On est si mal préparé pour cela !
Pourtant la quête qui fut la sienne fut jalonnée par la rencontre, tour à tour émerveillée et douloureuse, de ce qu’il appelait « l’excès du sensible ».
Rencontre émerveillée, qu’on pouvait surprendre sur son visage, lorsque résonnait en lui une forme ou une couleur, un instant musical ou un texte poétique. L’émotion le saisissait alors et pouvait mettre son corps tout entier en mouvement. La « sensation pure » éprouvée, était pour lui naissance du rythme, ample respiration, élargissement intérieur. Il aimait dire que la beauté est océanique. Impossible à circonscrire, elle nous révèle notre capacité d’accueillir en nous, plus grand que nous.
Rencontre émerveillée, mais rencontre douloureuse aussi, à raison même de cet ébranlement de tout l’être, quand surv...
Mots clés :
Art (cinéma, peinture, sculpture)
Catholicisme
Compagnie de Jésus
Création
Expérience spirituelle
Gloire
Images
Spiritualité ignatienne
Vocation
Lumière
au-delà
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"SUIS-JE À LA PLACE DE DIEU?" (GN 50,19)
CHRISTUS N°246
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Jean-Louis SKA
« Suis-je à la place de Dieu ? » est la question que Joseph pose à ses frères qui, après la mort de leur père, viennent invoquer sa clémence, en se prosternant devant lui et se déclarant ses esclaves (Gn 50,15-18). La situation est critique puisque les frères craignent que Joseph se venge d’eux, à présent que leur père n’est plus là pour garantir une paix relative entre les divers membres de la famille. « Nous sommes tes esclaves » (Gn 50,18 [1]) fait certainement écho, en fin de parcours, aux rêves de Joseph qui avaient été une des premières causes du conflit (Gn 37,5-11 : les gerbes des frères se prosternent devant la gerbe de Joseph ; le soleil, la lune et onze étoiles se prosternent devant Joseph). Le père et les frères avaient immédiatement compris le sens de ces rêves : « Vas-tu régner sur nous en roi ou vas-tu nous dominer en maître ? » (37,8) ou encore : « Quel rêve as-tu fait là ? Allons-nous avoir, moi, ta mère et tes frères, à nous prosterner à terre devant toi ? » (37,10). Or, les frères viennent une dernière fois se prosterner devant Joseph pour implorer son pardon et s’offrent à devenir esclaves de leur frère en 50,18. La fin du récit reprend don...
Mots clés :
Gloire
Fraternité
Egalité
Royauté
Sagesse
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