ANIMALITÉ : L’INTIME ÉTRANGETÉ
CHRISTUS N°241
-
Françoise LE CORRE
Il faut remonter très loin dans la mémoire collective occidentale pour retrouver des représentations de complicité heureuse, paisible et innocente, entre l’homme et l’animal partageant un même monde et vivant dans une proximité sans heurts. Images d’une humanité accordée à l’ensemble de la Création, projections d’un rêve très enfoui, que rien ne parvient à étouffer complètement.
Images de rêve
De cette sensualité harmonieuse, simple et naturelle, non encombrée d’elle-même, évidente comme le sont les évidences des songes, la tapisserie de la Dame à la Licorne (Musée de Cluny) est une illustration parfaite ; elle a justement les cinq sens pour objet. Aux côtés de la licorne et du lion, qui veillent auprès de la Dame, gambadent les lapins et les singes ; les renards et les loups ne font pas oublier les agneaux, la genette voisine avec le héron, la Dame nourrit le faucon. À cette subtile et élégante fête des sens, tous participent. Il n’y a ni rivalité, ni envie, ni domination. Toute violence est effacée, toute frontière inutile. L’île bleue aux pieds de la Dame semble n’être qu’un surcroît de beauté ajouté aux arbres et aux mil...
PRÉSENCES ANIMALES
CHRISTUS N°241
-
Annie WELLENS
Arrêt sur images : la première, une photographie, inaugurale quant à ma relation aux animaux, remonte à 1947, année de ma naissance. Elle serait aujourd’hui montrée du doigt comme l’exemple même d’un comportement parental fautif : âgée de quelques mois, je dors dans mon berceau en compagnie d’une chatte couchée sur mes pieds. Certes, il ne s’agit pas d’une chatte quelconque, mais de Caroline qui a « gardé » la maison familiale désertée, rive droite de la Sèvre Niortaise à Marans, lorsque mon père était prisonnier de guerre en Allemagne et ma mère « évacuée » en Vendée. Une si bonne gardienne (la maison fut retrouvée intacte) ne pouvait que protéger un nourrisson. De ce lien originel avec Caroline, je n’ai aucun souvenir personnel, sinon sous forme de l’histoire racontée par mes parents et attestée par la photographie, ce qui n’interdit pas le travail souterrain des impressions sensorielles enfouies.
Les images suivantes, non photographiques, datent de mes quatre ou cinq ans et demeurent toujours vives en ma mémoire :
• Un énorme coq blanc échappé de la basse-cour familiale pourchasse la petite fille que je suis. Je tombe et je hurle.
• Une p...
HUMAIN ET ANIMAL : RECHERCHER LA PAIX
CHRISTUS N°241
-
Brigitte PICQ
Parmi les nombreuses « contrariétés » que Pascal décèle dans l’être humain, figure celle qui se joue entre le sentiment de sa grandeur et la conscience de sa bassesse. Par le premier, l’homme se voudrait l’égal des anges, alors que par la seconde, il se ravalerait au rang de l’animal. Mais, pour Pascal, aucune de ces deux attitudes prise séparément n’est juste. Ainsi écrit-il : « Il est dangereux de trop faire croire à l’homme combien il est égal aux bêtes, sans lui montrer sa grandeur. Il est encore dangereux de lui trop faire voir sa grandeur sans sa bassesse. Il est encore plus dangereux de lui laisser ignorer l’un et l’autre, mais il est très avantageux de lui représenter l’un et l’autre. Il ne faut pas que l’homme croie qu’il est égal aux bêtes, ni aux anges, ni qu’il ignore l’un et l’autre, mais qu’il sache l’un et l’autre ». Deux dangers menacent donc la condition humaine : se vouloir ange ou bête, ne se savoir ni l’un ni l’autre. Entre les deux, les Pensées tracent une voie étroite. Si l’on en croit Pascal, un jugement lucide conduirait à reconnaître ces deux tendances en l’homme et à les faire cohabiter.
Cette situation de...
UNE HUMANITÉ RÉCONCILIÉE PAR LE CHRIST AVEC DIEU
24 FÉVRIER 2014
-
Claude TUDURI
En marge du numéro sur L'homme et l'animalité, une frontière à discerner, nous proposons la lecture de ce texte de saint Athanase d'Alexandrie. La profondeur et l'authenticité de la paix est bien ce qui distingue radicalement l'homme de la bête, une humanité réconciliée par le Christ avec Dieu des passions jalouses et des superstitions haineuses de l'animalité livrée à elle-même. Le Verbe fait chair purifie le cœur de ses idoles et éveille la conscience du sujet à un travail de la raison qui le rend libre des errances et des soubresauts d'une vie sensible séparée de Dieu, c'est-à-dire aliénée par l'appétit de l'imaginaire, un imaginaire à la fois social et individuel.
« Quel homme [sinon le Christ] a pu parcourir de telles distances, et aller chez les Scythes, les Ethiopiens, les Perses, les Arméniens, les Goths, chez ceux qui habitent, dit-on, au-delà de l'Hyrcanie, chez les Egyptiens et les Chaldéens, peuples qui pratiquent la magie, superstitieux outre mesure, aux mœurs sauvages, pour leur prêcher la vertu, la continence et l'abandon du culte des idoles, - comme l'a fait le Seigneur de tous, la puissance de Dieu, Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui non seulement leur a prêché par ses disciples, mais les a persuadés dans leur âme d'abandonne...
Mots clés :
Paix
Parole de Dieu
Parole d’homme
Prière
Animalité
Lire la suite