Myriam TONUS

Laïque dominicaine formée en théologie, a travaillé dans l’Enseignement catholique, aumônière en hôpital psychiatrique, chroniqueuse dans la presse et à la radio.
A publié L’Évangile dans la chair (Fidélité [Éditions jésuites], 2021).
IL ÉVEILLE MON OREILLE POUR QUE J'ÉCOUTE
CHRISTUS N°266HS
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Myriam TONUS
Ce jour-là, le gamin de cinq ans est rentré de l'école et a dit à sa grand-mère qui le garde : « Tu me racontes encore l'histoire de “Parle Seigneur ton serviteur écoute” ? » Comme elle lui demande où il a entendu cette histoire, le petit explique qu'en classe, la maîtresse a réuni les élèves qui le voulaient près du coin prière et qu'elle leur a lu, dans le plus grand silence, l'histoire de Samuel1. La grand-mère ouvre alors la Bible et lit ce passage comme elle le ferait d'un conte. L'enfant écoute gravement puis, après une pause, demande : « Tu connais encore d'autres histoires comme celle-là ? » Zachée va prendre le relais de Samuel… Après quoi, manifestement satisfait, le gamin conclut : « C'est beau, hein ! »Entre les motsLa grand-mère ne saura jamais ce qui a ravi à ce point les oreilles de son petit-fils. Les histoires, pour un enfant, c'est chose sérieuse et l'on ne passe point son temps à les décortiquer, les expliquer, les analyser une fois qu'elles sont racontées. Ce qui est certain, c'est que « ça parle ». Suffisamment pour apaiser les craintes, pour faire rêver, pour grandir. Est-ce parce que l'oreille de l'enfant n'est pas encore assourdie par le tumulte permanent du mo...
PASSER L'IMPENSABLE
CHRISTUS N°277
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Myriam TONUS
Sortir de la culpabilisation et entrer dans un autre dynamisme, celui de l'amour. Nul être humain ne doit être méprisé parce qu'il n'a pas pu pardonner ou demander pardon. Celui-ci est un horizon, tout comme l'agapè. « Le pardon, ce n'est pas pour moi. Ce ne sera jamais possible. » Cette conviction est celle d'un homme emprisonné pour meurtre. Cela fait plus de dix ans déjà qu'il purge sa peine et il participe régulièrement au groupe de prière et de parole organisé dans le cadre de l'aumônerie. Ce jour-là, la rencontre s'ouvre par le psaume 102 : « Bénis le Seigneur, ô mon âme, n'oublie aucun de ses bienfaits ! Car il pardonne toutes tes offenses et te guérit de toute maladie » (Ps 102, 2-3). L'homme est assis sur sa chaise, tête baissée, et il répète : « Personne ne pourra jamais me pardonner ce que j'ai fait. Je ne me pardonne pas à moi-même. Comment le Seigneur pourrait-il me pardonner ? » Puis, après un silence : « Non, il ne me pardonnera pas non plus. » Un autre détenu lui dit que Dieu ne condamne jamais définitivement ; l'aumônier cite la phrase de saint Jean : « Si notre cœur nous condamne, Dieu est plus grand que notre cœur et il connaît toute chose » (1 Jn 3, 20). Mais l'homme secoue doucement la tête en silence, comme s'il ne pouvait accepter que ces paroles le concernent. Pardonner. Donner par-delà. Par-delà la faute, par-delà l'inexpiable, restaurer l'être humain dans sa dignité : cela paraît impossible. Le pardon, tout spécialement dans l'Évangile, désignera...