Docteure en théologie spirituelle, rédactrice en chef adjointe de la revue Christus.
A publié Marie de l’incarnation, honorer le singulier (Cerf, « Patrimoines », 2018).
L'HOSPITALITÉ INTÉRIEURE
CHRISTUS N°245
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Marie-Caroline BUSTARRET
Si notre écoute façonne notre rapport aux hommes et au monde, elle fonde aussi notre relation à Dieu. Jésus nous avertit : « Prenez garde à la manière dont vous écoutez », et il ajoute : « Car celui qui a, on lui donnera ; et celui qui n’a pas, même ce qu’il croit avoir lui sera enlevé » (Lc 8,18) associant ici écouter et avoir. Il y a des écoutes qui sont des façons d’ériger des barrières autour de nos idoles, écoutes qui ne sont pas accueil mais accaparement, écoutes qui sont appropriations de la Parole pour la faire sienne ou la mettre au service de nos propres élaborations. On croit « posséder » le vrai Dieu, la seule vérité, une bonne morale, la vraie foi… et l’on retourne incessamment au texte pour conforter nos certitudes. Ce faisant, nous construisons sur le sable et pensons élever un bel édifice mais, dès la première tempête, ce que nous croyons avoir nous sera enlevé... Et, il y a des écoutes qui sont réception, mise à disposition de nos facultés ; des écoutes qui laissent la porte grande ouverte à l’imprévu. Exerçons-nous donc à celles-ci, non pour accumuler mais pour creuser, non pour conforter mais po...
DEUX LIVRES LUS ET COMMENTÉS POUR VOUS PAR LA RÉDACTION DE CHRISTUS
12 JANVIER 2015
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Marie-Caroline BUSTARRET
Frédéric Fornos sj, b.a.-ba de la prière, Fidélité, Ed. Jésuites, 2014.
Cette année la prière peut s’offrir en cadeau ! C’est bien ce que le petit livre b.a.-ba de la prière permet. Cet ouvrage qui s’inscrit dans la tradition spirituelle de l’Eglise, se présente sous la forme de fiches claires et simples, agrémentées ici et là de dessins humoristiques. Il s’adresse à ceux qui commencent dans la vie de prière. Un véritable compagnon de route…
L’éducation, une promesse à tenir, Parole et Silence, 2014.
A l’occasion du centenaire des Centres Madeleine-Daniélou, un colloque s’est tenu au Collège des Bernardin en février 2014. Convaincus que les réflexions suscitées et les paroles échangées peuvent servir bien au delà du cercle restreint des enseignants, les organisateurs ont décidé de publier une bonne partie des interventions de ce colloque. Offrant ainsi à la lecture les espérances qui les habitent et les défis qu’ils savent devoir relever.
A QUOI SERT UN CHRÉTIEN?
CHRISTUS N°246
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Marie-Caroline BUSTARRET

On pourrait trouver surprenant de poser la question du rôle que les chrétiens ont à jouer dans nos sociétés en termes d’utilité : le chrétien doit-il vraiment servir à quelque chose ? Après avoir parcouru ce livre à la lecture aisée, la question apparaît dans toute sa légitimité. Sur fond de description d’un contexte bien connu de divorce entre l’Église et la société, l’auteur réaffirme la richesse et la force du message chrétien qui propose un humanisme au service de la vie. Cependant, l’intérêt de ce livre repose sur un appel adressé à chacun afin qu’il procède à une révolution intérieure : le sujet, nous dit l’auteur, n’est pas de changer le monde en général mais d’agir dans son monde particulier ; et ce monde-là, ajoute-t-il, commence par nous-mêmes. C’est un appel à l’évangélisation, certes, mais à une évangélisation comprise comme le renouvellement de nos propres terreaux intérieurs. Évangéliser n’est pas convertir, ce qui décharge le chrétien de cette si lourde responsabilité ! Évangéliser, c’est se rendre transparent à l’action de l’Esprit. Le chrétien n&rsq...
SON VISAGE ET LE TIEN
CHRISTUS N°246
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Marie-Caroline BUSTARRET

Parler de son expérience de Dieu, est-ce un pari impossible ? À en croire la multitude des croyants et des croyantes, il semblerait bien que l’exercice soit difficile… Et, pourtant, sans prétention, sans faire la leçon, Alexis Jenni, qui dit avoir « le goût de Dieu », ose une parole délicate et tout en finesse sur une réalité qu’il n’a su nommer que tardivement. Bien qu’ayant dans son enfance été confronté à une foi qui ne se disait pas et qui s’en trouvait opaque et pesante, il prend aujourd’hui le risque de mettre son histoire intérieure à l’épreuve du langage. Poussé par la volonté d’exprimer une foi « qui ne soit pas lourde ni obscure, mais forme de joie ; qui ne soit pas répétition des textes, application des règles, mais floraison d’images autour d’une source insaisissable ». Il y parvient avec le talent d’un écrivain qui sait faire voir l’invisible. Ainsi, vat- il chercher non pas à livrer un savoir mais à faire sentir ces instants fugaces où la vie s’ouvre sur une présence. La révélation de ce monde intérieur, qui nous habite tous, se fait par et dans le corps, un corps animé de l’esprit. Nos cinq sens sont les points de passage. « On ne croit pas...
L’AMOUR VAINQUEUR. DU SCANDALE DE LA CROIX À L’INDICIBLE DE LA RÉSURRECTION
18 MARS 2015
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Marie-Caroline BUSTARRET

Pour accompagner nos temps de carême, il peut être bon de se plonger dans la lecture des conférences spirituelles données par Mgr Pierre Debergé à l’Abbaye de Sylvanès lors de la Semaine Sainte 2014. L’auteur y livre quatre méditations sur les récits de la Passion et de la Résurrection et trace en parallèle un chemin de vie en Eglise.
MÉDITER AVEC SAINT BERNARD
20 MARS 2015
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Marie-Caroline BUSTARRET
A l’occasion du 9e centenaire de la fondation de l’abbaye de Clairvaux accompagnons notre prière quotidienne des pensées de saint Bernard. Une anthologie qui nous unit à la méditation des moines cisterciens et permet de se familiariser avec les écrits d’une figure spirituelle chrétienne majeure.
MÉDITER AVEC SAINT PAUL
23 MARS 2015
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Marie-Caroline BUSTARRET
L’auteur propose dans cet ouvrage un choix de textes extraits des épîtres de saint Paul. Une autre façon de redécouvrir le message de ce grand saint en savourant et méditant un court passage, au jour le jour et ce tout au long de l’année.
MA GRÂCE TE SUFFIT
CHRISTUS N°247
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Marie-Caroline BUSTARRET
Découvrir les failles et les faiblesses des disciples est une consolation dont nous ne devrions pas nous priver lorsque nous lisons les évangiles ! Tant de fois se révèlent vanité, couardise, intempérance et paresse… Loin de nous bercer dans l’illusion d’une sainteté qui serait une sorte de perfection morale désincarnée, les évangélistes nous dépeignent des hommes faillibles. Et pourtant, ce sont des saints donnés en exemple par l’Église. S’agirait-il d’imiter l’imperfection et de nous complaire dans notre médiocrité ? Certes non ! Nous sommes plutôt appelés à contempler cette fragile humanité offerte à nos regards. À faire nôtres leurs doutes et leurs incompréhensions. À reconnaître en nous, comme en eux, les lâchetés du Vendredi saint, la sidération muette du Samedi saint et la mise en mouvement joyeuse du dimanche de Pâques. Là réside la sagesse des évangélistes qui n’ont pas gommé les aspérités de ces chemins de foi. Car il y a bien ici un enseignement à tirer : la sainteté n’a rien à voir avec la perfection ! Nous le savons peut-être déjà, l’Église nous l’a dit et redit mais nous avons tant de mal...
SPORT DANS LA VILLE
CHRISTUS N°247
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Remi (de) MAINDREVILLE
Marie-Caroline BUSTARRET
Christus : Avant de parler de « Sport dans la ville », pouvez-vous nous dire quel est votre parcours personnel ?
Philippe Oddou : J’ai 42 ans, je suis marié et j’ai trois enfants. « Sport dans la ville », c’est ma deuxième famille. J’ai grandi à Paris dans un environnement plutôt privilégié : lycée, classe préparatoire, École supérieure de commerce. J’ai travaillé quatre ans en entreprise : deux ans chez L’Oréal, puis deux ans dans une banque.
Un tremplin pour l’insertion
Christus : Comment passe-t-on de la banque à « Sport dans la ville » ?
P. Oddou : Quand j’étais étudiant, je me suis retrouvé dans un environnement où l’on parlait beaucoup de business, d’entreprise et, au fond de moi, je sentais que cela ne répondait pas à mes aspirations profondes. À 20 ans, il n’est pas toujours simple de savoir ce que l’on veut faire de sa vie. Après un Volontariat international en entreprise (VIE) en Autriche, je suis rentré en France porté par le désir d’aider des gens qui n’avaient pas eu autant de chances que moi. Mon père, dirigeant d’entreprise, et ma mère, directrice d’école, m’ont énormément donné mais, enfant,...
Mots clés :
Corps
Connaissance de soi
Réalisation de soi
Epanouissement personnel
Estime de soi
Sport
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APPRIVOISER NOS JOURS
CHRISTUS N°248
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Marie-Caroline BUSTARRET
N’y a-t-il pas une lassitude à refaire tous les jours la même chose ? Après la pause estivale, il peut nous arriver d’éprouver un léger sentiment d’usure quand il s’agit de remettre les habits du quotidien. Pour la plupart d’entre nous, la vie semble faite de redites. Nos tâches au travail, à la maison, dans nos divers devoirs, sont pour une grande part des gestes répétés jour après jour. De nombreux jeunes d’ailleurs, lorsqu’ils envisagent la vie de leurs aînés, ne voient que cet aspect routinier. Cela explique la difficulté qu’éprouvent certains à se projeter dans un monde un peu gris en apparence. Or c’est véritablement entrer dans le réel que d’accueillir la succession répétitive des moments, comme on apprécie le va-et-vient des marées ou le retour des saisons qui chaque fois apporte un air de renouveau. Le quotidien est à apprivoiser et à goûter car la grandeur n’est pas forcément dans le grand. Il y a une beauté à faire bien et en conscience les plus petits gestes de la vie. Nos pieds, nos mains, nos yeux et nos oreilles sont les premiers compagnons d’une prière qui consiste à prêter corps et coeur à leur action : travailler, marcher, regarder, écouter… Le bon...
PEUT-ON CROIRE À L'AMOUR ?
CHRISTUS N°248
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Marie-Caroline BUSTARRET

Deux regards se conjuguent pour répondre à cette question curieuse et, qui sait, pertinente : « Peut-on croire à l’amour ? » Celui de la psychanalyse, avec Jean-Pierre Winter, et celui de la philosophie, avec Nathalie Sarthou- Lajus. Le premier tente de répondre à la question à partir de son expérience de praticien. Dans son discours, l’amour est un objet d’étude regardé à distance, parfois même une pathologie ! On peut éprouver quelque difficulté avec un propos qui, aux dires de J.-P. Winter lui-même, « traite de l’âme […] comme un chirurgien opère à “coeur ouvert” ». Cependant, sa parole de praticien permet de mettre au jour des motifs cachés de l’expérience. L’ambivalence de nos affects, le conflit de nos sentiments, les errements de la relation… tout cela prend relief sous le regard scrutateur du psychanalyste. J.-P. Winter présente l’amour comme un objet (l’autre aussi apparaît comme un objet) qui met en mouvement un sujet éminemment solitaire. Ce sujet va vers lui-même, dans l’illusion que la rencontre est synonyme de fusion : un plus un égalent un. Comme si l’amour était en fait le plus grand des égoïsmes.
Or, toute la force de l’amour réside dans le fait qu...
OÙ EST TON FRÈRE ?
26 OCTOBRE 2015
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Marie-Caroline BUSTARRET
Avant même que l’actualité récente ne mette la question des migrants et des réfugiés sur le devant de la scène, le pape François a souvent montré sa douleur devant le sort réservé à ces hommes et femmes poussés à quitter leur terre. Ce livre rassemble un choix d’interventions du pape à propos de ces drames humains. Des paroles fortes et souvent prophétiques face à l’indifférence du plus grand nombre.
MARIE GUYART DE L'INCARNATION
CHRISTUS N°249
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Marie-Caroline BUSTARRET

C’est une lectrice passionnée qui nous livre ici le fruit de sa « rencontre » avec celle dont « le mystère ne cesse de l’étonner ». En effet, depuis bien des années la théologienne et philosophe franco-québécoise, Thérèse Nadeau- Lacour, se confronte avec bonheur à l’écriture spirituelle et incarnée de la missionnaire ursuline récemment canonisée. Cet ouvrage est une trace inspirante de ce long compagnonnage. Nous saurons gré à Thérèse Nadeau- Lacour de brosser un portrait complet et juste de Marie de l’Incarnation. Dans une présentation chronologique de sa vie, Thérèse Nadeau-Lacour, révèle la profonde cohérence qui marque l’existence de la sainte. Marie est dite femme « mystique d’action ». Même s’il serait opportun d’expliciter ce que l’on entend par ces termes dont on qualifie certaines figures spirituelles, nous devons reconnaître que Thérèse Nadeau-Lacour honore ces deux dimensions. Elle montre justement à travers une lecture pertinente des écrits de l’ursuline, qu’action et mystique ne peuvent être séparées comme l’expression le laisse paradoxalement à croire.
Dans le respect de ce qui fait la force et la spécificit&eacu...
DES LIVRES À OFFRIR POUR LES FÊTES...
17 DÉCEMBRE 2015
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Marie-Caroline BUSTARRET
\r\n\r\n Maurice Giuliani, L’accueil du temps qui vient, Préface de Claude Flipo s.j., coll. Christus, Lessius, 2015, 344p.20€.\r\n \r\nLes éditions jésuites proposent une réédition des écrits du fondateur de la revue Christus, Maurice Giuliani. Cette compilation d’articles, effectuée par l’auteur lui-même peu de temps avant sa mort, constitue l’héritage spirituel de ce jésuite et une référence dans le domaine de la spiritualité ignatienne. Maurice Giuliani s’est employé, de longues années durant, à partager sa connaissance approfondie de l’accompagnement spirituel et des Exercice de Saint Ignace de Loyola. Des écrits conçus pour aider les hommes en quête de Dieu sur leur chemin spirituel…\r\n\r\n\r\n \r\n \r\nMacha Chmakoff, Les couleurs de l’Avent. Scènes d’Évangile Tome, Fidélité, 2015, 19,50€. DVD inclus et\r\nEric Monticolo, Gospel light. Évangile selon la lumière, Méditations d’Eric Vermeer, fidélité, 2015, 19,95 €.\r\n \r\nÀ offrir à Noël, ces livres, fruits de la prière des artistes, sont comme des méditations picturales.\r\nLe premier présente des scènes de la vie du Christ (Annonciation, Visitation, Magnificat, Nativité,...
LA CHARITÉ ASSISE
CHRISTUS N°250
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Marie-Caroline BUSTARRET
Les œuvres de miséricorde décrivent un mouvement de sortie de soi pour aller au-devant de l’autre « abîmé ». Or, une curieuse injonction à « supporter patiemment les personnes ennuyeuses » se glisse un peu comme par erreur dans ce paysage de la bonté. On pourrait objecter qu’il n’y a pas de commune mesure entre la noblesse du service aux démunis et l’insignifiance du simple fait de supporter. En outre, quelle idée curieuse que de mettre sur un même plan, les pauvres, les pécheurs… et les raseurs ! Le voisin de table qui monopolise la parole, nous abreuve de ses histoires et parle sans jamais rendre la politesse de son écoute, serait-il, à sa façon, un pauvre qui appelle notre charité ? Mais de quelle charité parle-t-on s’il ne s’agit pas de sortir de nous-mêmes pour porter nourritures et consolations ? Non, il ne nous est pas demandé ici de sortir mais de rentrer. Tenir notre poste et voir s’il y a en nous la place pour un autre ; ne pas quitter notre fauteuil mais au contraire nous y installer pour accueillir celui que nous voudrions fuir. Il est temps maintenant de retenir les pensées malveillantes et, après coup, la parole assassine qui, croit-on, panse l’irritation. Cette modeste « charité ass...
QUELQUES RECENSIONS DE LIVRES RIEN QUE POUR VOUS...
15 MARS 2016
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Marie-Caroline BUSTARRET
Didier Decoin, Il fait Dieu, Points Vivre, 2016, 1ère édition 1975, 144 pages, 6€70.
Les éditions Fayard rééditent le récit dans lequel Didier Decoin livrait l’expérience spirituelle vécue dans le « confort douillet » de sa maison. La nuit où tout a basculé pour lui. Un livre confession où l’écrivain passe à un ton plus personnel et nous livre le jour où pour lui « il a fait Dieu comme pour d’autres il fait jour ».
Marc Rastoin, Je suis venu jeter un feu sur la terre. Homélies pour l’année, Salvator, 2016, 190 pages, 19€.
Marc Rastoin, enseigne la Bible au Centre Sèvres, facultés jésuites de Paris, il propose ici un choix d’homélies prononcées à St Ignace. L’équivalent d’une année liturgique est ainsi parcouru pour accompagner une entrée dans l’Écriture Sainte.
Catherine Aubin, Les saveurs de la prière, Salvator, 2016, 128 pages, 14€90.
Le temps de carême est souvent l’occasion d’une quête : celle de la prière. Ainsi pour tout ceux qui cherchent le chemin de la prière, voici un petit livre qui à travers douze propositions se propose d’aider à trouver « la note j...
UNE « DOCTEURE EN THÉOLOGIE » À LA RÉDACTION DE CHRISTUS !
01 JUILLET 2016
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Marie-Caroline BUSTARRET
Vendredi 3 juin au Centre Sèvres), Marie-Caroline Bustarret a soutenu sa thèse en théologie spirituelle « Marie de l’Incarnation, honorer le singulier ».
C’est une analyse littéraire de la Correspondance de Marie Guyard de l’Incarnation (1599-1672). Veuve et mère d’un prêtre, Marie de l’Incarnation est connue pour être parti au Québec fonder des institutions éducatives, où elle fut en lien constant avec les jésuites.
Nous souhaitons le meilleur à Marie-Caroline, et nul doute qu’elle partagera aux lecteurs son intérêt et son goût pour cette grande spirituelle du XVIIe siècle.
OBSERVER ET ACCUEILLIR
CHRISTUS N°252
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Marie-Caroline BUSTARRET
On trouve chez les saints une puissance d'action face aux obstacles et ce parfois même dans une apparente faiblesse. Sur quoi repose cette puissance ? La lecture de Marie de l'Incarnation, récemment canonisée, peut nous aider à répondre à cette question.Au mois de mai 1672, une religieuse ursuline écrit du Canada au sujet de Marie de l'Incarnation : la fondatrice des Ursulines à Québec vient de rendre l'âme. Il est temps d'annoncer la nouvelle aux nombreuses relations du monastère. Dans une courte lettre, la religieuse loue les vertus de la mère décédée. Cependant, elle ajoute que l'humble constance avec laquelle Marie de l'Incarnation a porté ces qualités les a d'une certaine façon rendues transparentes à ses consœurs : « Cette continuelle égalité de vie où nous l'avons vue ne nous permettait pas d'en rien distinguer, […] pour admirable que fussent ses vertus, rien ne nous paraissait extraordinaire […]. »1Ces paroles révèlent en quelque sorte que les saints « ne se voient pas ». Il est à la sainteté une qualité de la lumière qui éclaire et fait voir, quand elle-même n'est pas visible. Peut-être, en effet, les saints ne se voient-ils pas car « être vus » n'importe pas...
LIRE UNE EXPÉRIENCE SPIRITUELLE
CHRISTUS N°252
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Marie-Caroline BUSTARRET
Vous l’avez vu tout de suite : Christus a changé. Après vingt-six ans, les lettres élégantes et italiques, qui inscrivaient en noir et rouge le nom de la revue, cèdent la place à une police plus arrondie et engageante. Sur le côté, un bandeau vertical arrête le regard et soutient l’annonce des titres et des rubriques, si bien qu’au premier coup d’œil, se découvre l’ensemble du numéro, dont l’organisation interne s’en trouve clarifiée.
D’autres changements apparaissent au fil de la lecture. Aider, jusque dans les détails les plus formels, à faire de celle-ci un acte spirituel est l’intention de ce changement. De même que la prière appelle une juste disposition du corps et de l’esprit pour aider l’ouverture du cœur, de même la lecture requiert, du côté du support, des aménagements, des repères, des alternances de couleurs et des informations qui soutiennent la lecture et engagent la méditation. Aérer la maquette pour permettre la respiration et offrir d’utiles pauses, créer des encadrés dans le but de rythmer la lecture, mettre de la couleur et des grisés pour apporter des repères, actualiser les noms des rubriques, proposer un sommaire plus explicite, des biographies plus vivantes…
Voilà ce...
ETAIT-CE MIEUX AVANT ?
CHRISTUS N°253
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Marie-Caroline BUSTARRET
Make America great again ! « Rendons sa grandeur à l'Amérique ! » Voilà le slogan qui a résonné outre-Atlantique, lors de la dernière campagne présidentielle. Nous affichons un sourire un brin moqueur devant ce qui nous apparaît comme le vain désir d'un retour à d'illusoires grandeurs passées. Comme si jamais nous n'entretenions nous-mêmes de telles chimères… Ce qui se vit sur le plan politique a ses résonances en nous quand nous appelons de nos vœux un passé révolu que nous imaginons meilleur. Un « C'était mieux avant… » monte si facilement à nos lèvres devant ce que nous percevons comme les dérèglements de notre temps. Certes, il y a une difficulté à vivre aujourd'hui mais ressentir un certain inconfort devant l'ici et le maintenant, n'est-ce pas le lot de toute génération ?
Les témoins de la puissance vitale qui anime l'arbre sont le feuillage, les fleurs et les fruits, ce n'est pas le bois (racines, tronc ou branches), simple transmetteur de la vie puisée dans une terre féconde. Et, c'est dans les fleurs et les fruits, pourtant si fragiles, que nous trouvons notre nourriture. Or, les fruits poussent et meurent pour laisser place à ceux des saisons nouvelles. Ainsi, succomber à la tentation de rejouer le...
UNE VIE SIMPLE
CHRISTUS N°254
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Marie-Caroline BUSTARRET

Albin Michel, 2017, 210 p., 15 €.
Ce livre, écrit à deux mains, est le portrait d'un lieu et même plus encore d'une communauté d'hommes et de femmes qui ont fait le choix de la vie monastique. En douze tableaux, il est donné d'entrer dans tous les aspects de cette vie qui s'invente depuis les années 1970. Ce lieu, situé au cœur du Piémont italien, non loin de Milan, c'est le monastère de Bose fondé, avec sa communauté, par Enzo Bianchi. Les douze chapitres sont autant de déambulations à la découverte du village monastique et de la communauté mixte et œcuménique qui vit là au rythme de la prière, du travail et de l'hospitalité. Toutes les portes nous sont ouvertes, tant celle de l'Église où se pratique la lectio divina, trois fois par jour et en communauté, que celle de la cuisine ou de la boulangerie car le soin de l'âme passe aussi par celui du corps. Ainsi, le corps et l'âme sont-ils nourris d'un pain frais et de légumes cultivés sur place, mais aussi de la beauté donnée en abondance ou façonnée par les hommes. La beauté est en effet un trésor auquel sont attachés les frères et les sœurs : « sans beauté, il n'y a pas de pauvreté chrétienne, il y a seulement de l...
LES CONSEILS DE L'ESPRIT
CHRISTUS N°256
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Marie-Caroline BUSTARRET

Patrick Goujon, historien de la spiritualité au XVIIe siècle et spécialiste de la spiritualité ignatienne, propose ici une démarche originale en éclairant notre compréhension des Exercices spirituels par la lecture de la correspondance d'Ignace. Il donne ainsi à découvrir, de façon concrète et vivante, la manière dont Ignace lui-même pratiquait ce qu'il a formalisé et synthétisé dans les Exercices. Dans cet ouvrage, l'auteur part de la question suivante : comment Ignace parvient-il à concilier l'usage de la liberté qui est le don que Dieu fait aux hommes avec la formulation de nombreuses règles tant de discernement que de vie ? En rappelant que la spiritualité ignatienne se fonde dans une conception de la relation entre Dieu et les hommes où Dieu veut l'entière et pleine coopération de la créature dans l'usage de sa liberté, ce livre révèle le ressort de l'articulation entre règle et liberté : la consolation, comprise comme aide de Dieu lui-même. La consolation n'est pas un affect confortable offert à notre satisfaction, mais un don de joie et de paix reçu de l'Esprit et une dynamique menant vers Dieu. La consolation est déjà présente dans les Exercices, c'est le point d'ancrage de la pédagogie d'Ignace. Par l'analyse de q...
JOURNÉE MONDIALE DU REFUS DE LA MISÈRE...
17 OCTOBRE 2017
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Marie-Caroline BUSTARRET
Face aux situations de très grande pauvreté, se lève peu à peu la prise de conscience suivante : il n’est plus possible d’agir seulement pour les personnes qui connaissent la misère, il faut également agir avec elles. Pour cela, nous devons affermir notre volonté de redonner la parole à ceux et à celles qui ne l’ont plus et nous mettre enfin à leur écoute. Cela signifie adopter d’autres attitudes dans nos pratiques d’aide aux plus démunis à savoir reconnaître enfin qu’ils sont les premiers experts dans la lutte contre la pauvreté et la multitude des servitudes qu’elle engendre.
Donner la parole et se mettre à l’écoute, c’est aussi adopter une attitude intérieure de distance respectueuse. C’est une façon d’accorder notre attention à l’autre à la manière de Jésus : c’est à dire, considérer que l’autre est, et doit demeurer, acteur de son salut. À chaque fois que le Christ dit « que veux-tu que je fasse pour toi ? » ou « ta foi t’a sauvé », il montre que la libération dont il demeure la source vient cependant aussi d’un germe de vie enfoui en chacun. Bien qu’il soit notre Seigneur Jésus se retire : il se refuse &a...
A L'ÉCOLE DU VERBE, APPRENDRE À VOIR
CHRISTUS N°257
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Marie-Caroline BUSTARRET
Dans un beau roman récemment paru1, l'auteur évoque avec un brin d'amertume un père qui savait parler, peu écouter et encore moins regarder. L'éducateur aurait probablement mieux fait de beaucoup regarder, bien écouter et très peu parler… Il en est de même de toute relation d'accompagnement : l'écoute y est certes essentielle, mais elle doit reposer sur une certaine qualité du regard. La sagesse de nos mots prend corps dans notre capacité à voir.Dans le récit de l'appel des premiers disciples en Jean 1,29-51 (que le Lectionnaire nous donne à lire en ce début de janvier), l'évangéliste nous fait découvrir Jésus. Dans ce passage, c'est bien le Verbe incarné qui entre en scène mais, ici, la parole cède insensiblement le pas à la vue. C'est dans un ballet de regards où il est question de voir et d'être vu que se nouent les relations. Regard de Jean le Baptiste qui témoigne : « Moi, j'ai vu. » Regard des disciples et de Nathanaël qui sont encouragés : « Venez et voyez. » Et regard de Jésus lui-même qui pose ses yeux sur ces hommes. Pas besoin de longs échanges pour percevoir en chacun l'élan qui le meut, il suffit à Jésus de sonder les profondeurs de leur âme afin d'y déceler le d&...
FIN DE LA SEMAINE POUR L’UNITÉ DES CHRÉTIENS - 2018
26 JANVIER 2018
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Marie-Caroline BUSTARRET

Hier s'est achevée la semaine pour l’unité des chrétiens, n’en retournons pas pour autant dans nos églises avec le sentiment satisfait du devoir accompli nous ne devrions pas avoir l’esprit au repos tant que nos querelles persistent.
On peut certes espérer que tous, là où nous sommes, nous avons porté pendant cette semaine, un désir particulier de rencontre, de prière commune et de partage.
On peut espérer que ce désir d’unité a habité nos prières et imprégné nos profondeurs, que nous n’y avons pas seulement participé du bout du cœur par pure obéissance à nos Églises, mais parce que nous voulons abriter en nous l’esprit de communion qui est celui de l’Évangile.
Espérons que nous ayons véritablement nourri le regret de nos divisions et versé de sincères larmes sur les blessures qu’elles infligent au Christ, Lui qui le premier nous a appelé à être unis.
Prions encore et toujours pour que nos conflits ne soient plus qu’un souvenir…
CETTE ANNÉE LA VIE CONSACRÉE A DES MILLIERS DE VISAGES
02 FÉVRIER 2018
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Marie-Caroline BUSTARRET
Comme chaque année la vie consacrée est célébrée le 2 février ; or en 2018, il se trouve que par un heureux concours de circonstances, cette fête tombe la semaine même où le pape reconnaît comme martyrs les dix-neuf religieuses et religieux décédés lors de la décennie noire en Algérie. La rencontre de ces deux événements sur notre calendrier, permet de donner chair à ce terme « consacré », en effet cette année la vie consacrée a dix-neuf visages. Dix-neuf vies, hommes et femmes, jeunes et vieux, prêtres et laïques ; dix-neuf cœurs à l’intime desquels a résonné de façon unique l’appel du Seigneur à se donner. Dans leur diversité ces histoires étaient en effet mues par un seul moteur, celui de l’Amour qui se donne jusqu’au bout. Cet amour-là s’est incarné en Algérie dans dix-neuf visages que nous pouvons ainsi associer à la vie consacrée aujourd’hui.
Cependant, n’énumérons pas ces dix-neuf prénoms sans évoquer aussi la multitude des autres noms : ceux des toutes les femmes et de tous les hommes qui ont partagé la vie, le service, le travail et les souffrances des futurs bienheureux. Faisons aussi tout particuliè...
PAS DE FOI SANS DISCERNEMENT !
01 MARS 2018
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Marie-Caroline BUSTARRET
« Si trop souvent nous n’avançons pas dans les voies spirituelles, c’est parce que nous vivons le quotidien de manière répétitive, sans recul et sans profondeur. Pour nous convertir nous attendons l’exceptionnel et parfois nous en voulons à Dieu de ne pas le placer sur notre route… Or, c’est aujourd’hui que Dieu nous attend, qu’Il est présent à nos vies, d’une présence humble et discrète qu’il nous faut apprendre à reconnaître. » (Christus n°137, page 51). Ces paroles de Michel Rondet résonnent dans toute leur pertinence en ce mois de mars alors que le Pape nous appelle à tenir bon dans la prière « pour que l’Église tout entière reconnaisse l’urgence de la formation au discernement spirituel au niveau personnel et communautaire. »
S’il y a une urgence dans la formation au discernement, c’est précisément parce qu’il nous faut apprendre à reconnaître que c’est aujourd’hui dans le quotidien le plus ordinaire que le Seigneur se rend présent et nous parle. Si nous passons nos oraisons à déplorer le manque de grands élans mystiques nous passerons à côté de la vraie conversion. C’est à dire celle où la fougue des commencements s...
COMMENT DONNER LA VIE ?
14 JUIN 2018
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Marie-Caroline BUSTARRET
Dans une lettre adressée aux catholiques chiliens, le pape appelle de ses vœux une Église qui ait des racines, une mémoire, un corps et un visage même. C’est à ce prix que nos communautés seront porteuses de vie en leur sein et pour d’autres. Or, le visage et le corps collectifs de notre institution ne prennent chair que dans le visage et le corps particuliers de chacun d’entre nous, du paroissien « du dernier rang » au prêtre qui prêche à l’ambon.
Mais avoir un visage et un corps qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire au delà de l’évidence ? Il nous est assez facile de décrire notre curé ou notre voisine de banc à la messe : leur taille, la couleur de leurs cheveux, de leurs yeux, l’intonation de leur voix, nous sommes même parfois en mesure de nommer quelques traits de leur caractère. Mais est-ce suffisant pour qu’ils soient plus que la fonction qu’ils assument à nos yeux : celle du prêtre ou celle de l’autre paroissien ? Et surtout, est-ce assez pour que leur vie féconde la nôtre ? Je ne crois pas. Car quelle que soit sa fonction ou son rôle, il faut que l’autre soit un homme ou une femme en chair, en os et en émotions devant nous pour qu’il contribue à notre vie. Qu’il accepte de s...
LES SENTIMENTS QUI NOUS GÊNENT
CHRISTUS N°259
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Marie-Caroline BUSTARRET
Nous sommes traversés de sentiments multiples, à certains d'entre eux nous accordons un traitement de faveur. Les accueillant avec reconnaissance, nous en faisons une fière promotion : la joie et la bienveillance, parmi tant d'autres, sont de ces émotions qui ont droit aux honneurs.
Certains sentiments, en revanche, restent « persona non grata ». Cependant, incapables de les anéantir ou simplement même de les ignorer, nous les confions à mi-voix dans le secret d'un confessionnal ou aux oreilles bienveillantes de notre accompagnateur. Est-ce parce que nous pressentons confusément qu'ils ont une place dans notre relation au Seigneur ? Non par défaut, en ce qu'ils seraient un frein à celle-ci, mais justement parce qu'il arrive qu'ils fassent retentir des alarmes salvatrices.
N'allons pas nous enorgueillir d'être habités par la colère, la tristesse ou le dégoût mais accordons-leur notre attention, non pour les canoniser mais pour en tirer profit. Évitons de porter d'emblée un jugement moral sur nos affects. La colère qui monte en moi de façon répétée face à telle situation dit-elle que je suis mauvais ou est-elle l'écho d'une blessure étouffée ? Mon sentiment d'orgueil impossible à taire est-il un péché à confesser ou la manifestation d'un besoin vita...
BIENHEUREUSE SIESTE !
12 JUILLET 2018
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Marie-Caroline BUSTARRET
Au cœur de l’été le dimanche 22 juillet, nous entendrons à la messe le récit du retour de mission des apôtres en Marc 6, 30-34. La foule est si grande, raconte l’évangéliste, que les apôtres n’avaient même pas le temps de se nourrir. Rien de bien anormale : ce détail nous rappelle à l’urgence de la mission et à notre devoir d’être tout aux autres. Apporter la parole qui sauve, le geste qui guérit et agir ainsi au nom de Jésus, tout cela prime sur le bien-être du missionnaire et sur son repos. C’est du moins l’interprétation que l’on peut faire de ce texte, et aussi de bien des récits de vie des saintes et des saints qui se sont donnés sans compter pour œuvrer à la charité. Sans que ce soit tout à fait conscient ou même voulu, il peut y avoir une injonction cachée derrière le bel appel à suivre le Seigneur adressé aux chrétiens de bonne volonté : donnez-vous sans répit jusqu’à l’oubli de vous-mêmes ! Ce qui conduit parfois ceux d’entre eux qui aspirent au repos, à nourrir un diffus sentiment de culpabilité enraciné dans l’idée que celui qui ménage son temps et sa monture n’est pas un très bon disciple du Christ&...
QUAND LE SILENCE N'EST PAS D'OR
CHRISTUS N°260
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Marie-Caroline BUSTARRET
Le silence est d'or, dit-on… mais de quel silence parle-t-on ? Car, comme ne cesse de le montrer l'actualité, il y a des silences qui sont plutôt de plomb. Parfois, en effet, sidérés devant ce qui aurait pu forcer nos cris, nous nous taisons par peur, par lâcheté ou tout simplement parce que nous sommes incapables de trouver les mots. Le silence, comme les sons, comporte bien des nuances. Il est la toile de fond de notre vie intérieure, c'est en son sein que nous nous mettons à l'écoute de l'Esprit. Il n'est pas exempt de mots et agit comme un révélateur car, adossé à lui, nous pouvons exprimer ce qui nous habite en profondeur et en vérité. Ce silence-là est un don.
En revanche, quand nous nous servons du silence par peur de nous confronter à la vérité, quelles que soient nos « bonnes raisons », il faut nous interroger. Prenons garde, dit Ignace de Loyola, car « c'est le propre de l'ange mauvais, "l'ange de lumière" », d'entrer dans les vues de l'âme fidèle et de sortir avec les siennes, c'est-à-dire en présentant des pensées bonnes et saintes en accord avec cette âme juste, et ensuite d'essayer peu à peu de faire aboutir les siennes en entraînant l'âme dans ses tromperies et ses intentions perverses » (Exercices spirituels, 332). Les fruits du silence pourraient-ils donc être corrompus ? Oui, car notre capacité à nous taire ou à prendre la parole n'est intrinsèquement ni bonne ni mauvaise, seules nos intentions et la visée qui nous anime le sont. Les paroles de Jésus,...
QUE PÈSERA NOTRE AMOUR ?
CHRISTUS N°261
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Marie-Caroline BUSTARRET
Voici longtemps déjà que je porte en moi l'interrogation suivante : que peut bien vouloir dire l'invitation faite dans le Nouveau Testament à prier sans cesse (Luc 21,36 ; 1 Thessaloniciens 5,17) ? À moins de passer vingt-quatre heures sur vingt-quatre dans l'oratoire, ce qui n'est ni possible ni même souhaitable, nous nous trouvons face à l'impossibilité de répondre à cette injonction. Alors peut-être faut-il reconsidérer ce que nous entendons par « prier ». Si nous limitons l'acte de prier à un dialogue fait d'un échange de paroles entre Dieu et nous, nous sommes dans une impasse : je ne sais pas pour vous, mais je suis pour ma part incapable de parler et écouter jour et nuit sans m'arrêter ! En revanche, si nous considérons que la prière est le seul moyen de l'échange amoureux entre le Seigneur et nous, que prier, c'est aimer, et si nous croyons Ignace quand il dit : « L'amour doit se mettre dans les actes plus que dans les paroles » (Exercices spirituels, 231), alors nous entrapercevons ce que peut être cette prière incessante.
Prier sans cesse, c'est marquer nos actions de l'empreinte du Seigneur et lester ainsi les mots de nos prières. Toute action est oraison si elle porte en elle la trace de Jésus, nulle tâche n'est indigne et chaque geste peut être un...
SAUVONS NOTRE ATTACHEMENT À JÉSUS CHRIST
CHRISTUS N°262
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Marie-Caroline BUSTARRET
La crise que traverse aujourd'hui l'Église laisse pantois : elle manifeste l'écart entre l'image idéale d'elle-même et la réalité de ses failles. La voix intérieure qui risque de l'emporter devant le scandale est celle de la confusion et du trouble. Certains croyants penseront : « Bien fait pour elle ! », d'autres seront pris d'affliction devant la révélation des turpitudes « familiales », d'autres encore seront saisis de compassion pour tous les membres consacrés humbles et sincères serviteurs du Christ emportés dans la tourmente et associés malgré eux au désordre de leurs frères. Pour beaucoup, ce sont tous ces sentiments contradictoires qui lutteront en eux : tristesse, colère, compassion, ressentiment, dirigés tous azimuts contre l'Église, ses représentants, la presse, etc. Or le trouble et la confusion, nous le savons, ne sont pas bons conseillers et ils paralysent : « Que faire ? Que dire ? Que penser ? »
Face à une telle situation, il est utile de nous remémorer que le propre du mauvais esprit est de susciter l'inquiétude en nous pour nous empêcher de progresser dans la suite du Christ. Tout désordre, quelle qu'en soit la cause, peut lui fournir un levier pour nous détourner de « la fin pour laquelle nous so...
QUE FAIT-ON MAINTENANT ?
CHRISTUS N°262
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Marie-Caroline BUSTARRET
« Qu'est-ce qu'on fait, nous, maintenant ? » Voici les paroles qu'un de mes neveux adressait inlassablement, du haut de ses quatre ans, à ses grands cousins et cousines lors des vacances d'été dans la maison familiale. Ce qui prenait la forme d'une question était en fait l'expression d'un désir. Il fallait, en effet, entendre ces mots de la façon suivante : « Je voudrais passer le temps qui vient avec toi. » L'exultation intérieure qu'il éprouvait à la présence de ses aînés restait informulée mais perceptible. Une soif de continuer à s'abreuver à cette même source naissait de la joie de la relation, joie qu'il savait recueillir en son for intérieur. Admirons la sagesse d'un tout-petit qui prêtait ses mots maladroits à une ébauche de prière d'alliance, et qui, ayant goûté la saveur sans égale de la rencontre, ouvrait celle-ci à l'après.
« Qu'est-ce qu'on fait, nous, maintenant ? » Cette phrase, reformulée dans les termes plus connus de la prière d'alliance (« Et demain avec toi, Seigneur ? »), pourrait conclure notre dossier sur la vie spirituelle en paroisse. Rappelons cependant que la « conclusion » dans la prière d'alliance n'annonce pas la fin mais le début.
R...
LA PRÉSENCE DE DIEU
CHRISTUS N°263
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Marie-Caroline BUSTARRET
La foi nous pousse à trouver Dieu tant dans l'ordinaire que dans le sublime de nos vies et, pourtant, la question demeure : « Où est Dieu ? » Car c'est plutôt l'absence de Dieu que nous ressentons. « Dieu, personne ne l'a jamais vu » (Jean 1,18), voici le paradoxe de notre foi en un Dieu révélé et caché.
Cependant, des hommes et des femmes ne cessent de témoigner qu'ils ont fait la rencontre d'un Dieu présent à leur vie. Cette présence les fait renaître à une vie sans changement apparent, parfois douloureuse, et cependant profondément renouvelée. Faire mémoire des traces de la présence divine dans son histoire personnelle permet de s'inscrire dans une Histoire qui nous dépasse : celle d'un peuple issu du désir de Dieu et qui n'a cessé de se tourner vers lui dans sa prière, même quand celle-ci devenait une simple plainte. En témoigne la grande tradition des psaumes qui prêtent aussi leurs mots à celui qui désespère de la présence divine.
Mais, l'expérience de s'ouvrir à cette Présence est indissociable de la prise de conscience douloureuse de ce qui nous en sépare. Quand les mystiques disent qu'ils sont en Dieu, c'est dans la foi qu'ils le disent. Dieu ne cesse de nous échapper car il nous appelle au-delà de toutes les...
TROUVER SON CENTRE
CHRISTUS N°264
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Marie-Caroline BUSTARRET
En réponse à la fatigue de nos vies hyperactives, l'expérience spirituelle relatée par Marie de l'Incarnation offre une autre image que celle de l'épuisement dans l'action, c'est celle d'une force et d'un équilibre intérieurs trouvés en Dieu.
« Qu'ils ne s'épuisent pas au travail,
Que le centre de gravité de leur vie ne soit pas
Dans les choses à faire mais en Dieu. »
Pedro Arrupe
La définition du terme « dépassement » contient l'idée d'un débordement des limites assignées à un « corps » et sollicite l'imaginaire de l'expansion. Le risque de l'expansion, quand elle ne trouve pas de terme, est l'épuisement des ressources propres ou, au pire, l'éclatement. Le mystique qui accepte de s'aventurer sur les rivages de l'aventure intérieure n'incarne-t-il pas à merveille la capacité à se dépasser mais ne risque-t-il pas aussi l'excès ? À plus forte raison si ce mystique est un homme ou une femme d'action prompt à se donner corps et âme pour la gloire de Dieu et le bien des hommes. Certains récits de vies saintes données en exemple peuvent susciter l'admiration certes mais aussi, peut-être, une once de découragement. Qui a l'énergie pour se jeter dans l'action comme celles et ceux qui...
AUTREMENT, DIEU DE RAPHAËL BUYSE
CHRISTUS N°264
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Marie-Caroline BUSTARRET

Membre de la fraternité diocésaine des parvis à Lille, écrivain que la revue Christus a la chance de compter au nombre de ses auteurs, Raphaël Buyse nous surprend et nous réjouit par cette belle prise de parole personnelle. Encore une fois, son style simple et direct fait mouche.
C'est l'histoire d'un prêtre. Ou plutôt, faudrait-il préciser, c'est l'histoire d'un prêtre qui ne craint pas de montrer qu'il est d'abord un homme, traversé lui aussi comme tous les hommes par des doutes, des joies et des peines. Alors que certains semblent croire que, pour être un pasteur « à la hauteur », il ne faut laisser apparaître aucun doute, Raphaël Buyse ouvre son récit par l'aveu d'une déroute (titre de son premier chapitre). Ce temps d'épreuve a bouleversé son image de Dieu : « Je l'avais ramené à mes désirs et à mes rêves » et de lui-même : « On a fait de moi un homme de Dieu, je me suis laissé faire sans résistance, j'y ai même cru. Je me suis pris au sérieux. » C'est dans le silence et le réconfort de la vie fraternelle bénédictine qu'il dit avoir été « ramené au cœur ». Là, il a renoncé à ses « évidences de prêtre hyperac...
QUAND JE SENS MON ÂME DÉFAILLIR
CHRISTUS N°264
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Marie-Caroline BUSTARRET
Il peut arriver que notre prière nous permette de débusquer en nous quelques fautes d'amour, c'est une grâce. Réjouissons-nous que le cadeau d'une plus grande lucidité nous ait été ainsi prodigué ! Or, comme souvent, le vrai combat commence seulement une fois que nous sommes entrés dans une plus grande familiarité avec les vues de Dieu. Car, au cœur même de ce don, peut survenir une tentation : celle d'entretenir en nous la désolation de nous-mêmes. Souvent le premier combat que nous avons à mener après une telle révélation n'est pas d'abord de lutter contre le manquement déploré mais bien contre le risque qui consisterait à fixer notre attention sur notre misère intérieure et, par là, à perdre notre point d'appui qui doit être en Dieu seul.
Si nous nourrissons cette désolation de nous-même ce n'est plus alors le bon esprit qui nous parle mais bien le mauvais esprit. Celui-là même qui œuvre de toute son énergie à nous tirer vers le bas. Désespérer de nous-même, c'est alimenter en nous ce qui blesse, même si la faute découverte est tout à fait réelle (le mauvais esprit est bien malin qui travaille toujours à partir d'une vérité pour la détourner à son profit, voilà l...
LE MOMENT CONTEMPLATIF, DE JEAN-CLAUDE LAVIGNE
CHRISTUS N°264
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Marie-Caroline BUSTARRET

Fort de la certitude que la vie mystique est pour tous, l'auteur de ce livre propose une déambulation à travers un paysage de la vie intérieure qu'il brosse touche après touche : « L'expérience intérieure », « Repères », « Lire », « Chemins », « Veilles », « Un vent favorable », « Le moment », « L'encontre enamouré », « Le regard impliqué ». Autant de chapitres (doublés à chaque fois d'un « écho »), autant de points d'étape.
Ce livre se présente à la fois comme une méditation sur l'expérience mystique offerte à tous que l'auteur appelle « le moment contemplatif » et comme un guide pour accompagner l'entrée dans l'expérience. Il pointe ainsi des moyens de la rencontre : lecture méditative de la Parole, silence, prière, confiance, abandon de notre volonté de tout maîtriser (y compris la grâce), faire de la place dans nos vies, lire mais aussi écrire pour garder mémoire des signes de la présence. Il met également en garde contre des idées fausses : ce n'est pas ce que nous faisons qui provoque la visite car Dieu ne se convoque pas, la...
L'EGLISE, DES FEMMES AVEC DES HOMMES D'ANNE-MARIE PELLETIER
CHRISTUS N°264
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Marie-Caroline BUSTARRET

Une fois de plus, Anne-Marie Pelletier s'empare avec la finesse qu'on lui connaît d'un sujet qui travaille un peu plus les esprits en ces temps de tempête ecclésiale : la place des femmes dans l'Église. Dès le titre, l'auteure donne le ton : l'Église ce sont des femmes et des hommes ; il ne s'agit donc pas de produire un pamphlet militant visant à éliminer les hommes du paysage, comme les femmes l'ont été. Non, le propos de la théologienne est de rappeler que le salut se joue dans un juste rapport entre femme et homme au sein du peuple de Dieu. C'est la promesse de la Création. C'est une question, pourrait-on dire, de vie ou de mort : choisissons la vie ! Or, nous rappelle l'auteure, notre société ecclésiale, marquée d'un androcentrisme et d'un machisme malheureusement universellement partagés (toutes les cultures, toutes les religions, de tout temps) a oublié l'impérieuse nécessité de faire entendre à parts égales les deux voix de l'humanité. Anne-Marie Pelletier ne cherche pas à réparer des torts, elle ne parle pas par souci militant d'égalité mais tout simplement parce qu'elle désire rappeler la vie promise dans le dessein créateur, énoncé dès la Genèse. Le livre commence par une courte traversée de l'histoire du discours magist&ea...
NE BOUDONS PAS L'ESPRIT DE FANTAISIE
CHRISTUS N°265
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Marie-Caroline BUSTARRET

Un matin de décembre, lors des premiers jours de l'Avent, inspirée par je ne sais quel esprit de fantaisie, j'ai décidé de changer de chemin pour me rendre au travail. Cet esprit qui me voulait sûrement du bien m'a ainsi mise sur la route d'une connaissance. Et, nous voici, deux femmes se retrouvant par un coup du hasard et s'embrassant sur ce coin de trottoir, toutes deux savourant le goût heureux des rencontres inopinées.Après ces retrouvailles fortuites, les embrassades de deux autres femmes sont remontées à ma mémoire, celles de Marie et d'Élisabeth qui ont accepté un jour d'emprunter un autre chemin que celui qui se dessinait pour elles. En son âge avancé, Élisabeth aurait pu s'estimer quitte du devoir de fécondité et goûter le repos des vieux jours ; et, face au défi d'une grossesse imprévue, Marie était toute légitime à s'en tenir à la fidélité envers la marche habituelle des choses et donc à refuser cette charge. Mais voilà pourtant que, confiantes, elles ont accepté de jouer le jeu de l'inattendu. Bien leur en prit. L'imprévu ouvre des failles par lesquelles la grâce s'invite dans nos vies pour notre bien et celui des autres ; quand c'est le moment, il faut savoir quitter la grand-route. Il en est de même pour nos habitudes intérieures...
LES PREMIERS CONFINÉS DE NOTRE HISTOIRE
CHRISTUS N°267
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Marie-Caroline BUSTARRET

Après la mort de Jésus, terrifiés par la violence qui s'est déchaînée contre leur maître et qui menace de se retourner contre eux, les disciples se terrent derrière les murs de leur maison. Ils sont anéantis par la peur contre laquelle les portes fermées de leur abri forment un inutile rempart. L'effroi s'insinue en eux au point de les rendre sourds à la bonne nouvelle de la Résurrection rapportée par les femmes. Ils refusent de prêter foi à ces témoignages qui confirment ce que Jésus lui-même leur avait pourtant annoncé. Ainsi terrassés par la peur, ils ne peuvent plus ni entendre ni croire ce qu'ils savent déjà : la dévastation n'est pas le mot final.
Seule la présence de Jésus en chair et en os va les sortir de leur sidération. Pourtant, la consolation qu'il apporte paraît bien maigre, quelques mots seulement : « La paix soit avec vous. » Jésus ne minimise pas ce qui s'est passé, il va même jusqu'à leur présenter les marques des sévices subis. Il ne garantit pas non plus que l'avenir sera plus léger. Il ne les rassure pas à bon compte. Il apporte juste la promesse d'une présence, sa présence, jusqu'aux confins du monde et des temps, promesse confirmée par le don de son Esprit. Et voilà que, sans que l'extérieur en soit moins menaçant, la peur a alors perdu son emprise et sortir est à nouveau possible.
La promesse que Jésus a faite aux disciples nous est également adressée. Quels que soient nos lendemains, qu'ils chantent ou qu'ils ne chantent pas, il sera là avec nous....
QUAND NOUS VEILLONS
CHRISTUS N°268
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Marie-Caroline BUSTARRET

Afin d'assurer sa garde, le veilleur met ses sens en alerte car, contrairement à l'insomniaque qui ne peut dormir, le veilleur ne dort pas parce qu'il ne doit pas dormir. Honorer la veille comme vigilance active, c'est parler d'une espérance vivante et permettre à la communauté des croyants d'incarner cette promesse dès aujourd'hui. La veille est loin d'une attitude passive qui consisterait à espérer un monde meilleur sans contribuer à sa venue.
« Veillez ! » La Bible et la tradition spirituelle font résonner cet appel. Veiller, c'est se tenir prêt à accueillir le Seigneur dans la confiance. C'est, dans un écart par rapport à son existence, adopter une attention profonde envers le monde et les autres, dans une pleine présence à soi. La vigilance qui incombe aux humains rejoint ainsi la veille que Dieu ne cesse d'assurer auprès de sa création. Car, si Dieu maintient et amplifie celle-ci, il délègue son geste créateur à l'homme. Porte-parole de Dieu, le prophète aussi se voit confier la tâche de veille en exerçant sa capacité à distinguer dans le monde la venue du Dieu libérateur et en osant sa parole pour annoncer ce Dieu. L'exemple de Jésus montre qu'être veilleur, c'est également être capable de saisir le juste moment pour annoncer ce qui est à venir. Dans l'attente de l'aube, tout croyant peut avoir à vivre le point crucial de l'existence où s'affrontent les forces de vie et celles de mort. De nombreux témoins attestent que ce qu'il a fallu pour vivre ces passages leur...
DIEU NE SAIT PAS COMPTER
CHRISTUS N°268
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Marie-Caroline BUSTARRET
La manie de se comparer aux autres est peut-être ce qu'il y a de mieux partagé dans la nature humaine. Elle apparaît très tôt quand surgit en nous la conscience douloureuse que nos proches sont dotés des aptitudes – ou des vertus ? – qui nous font défaut. Et nous menons ainsi nos vies en nous désolant devant ce que nous imaginons être les prouesses des autres : « Ah ! si seulement je pouvais prier autant, croire autant, aimer autant et me donner autant… » Or, encourager ces pensées, c'est succomber à une tentation subtile qui se nourrit de notre désir de bien faire et nous égare dans un dédale de devoirs mêlés de vains désirs de perfection. C'est là que naît le découragement.C'est ainsi encombrés d'un sentiment diffus mais tenace de culpabilité que nous allons au-devant du Seigneur. Nous agissons comme s'il exigeait de nous que nous nous présentions à lui avec nos bilans comptables à la main ! Ce faisant, nous projetons en lui une propension à tenir des comptes qui lui est pourtant étrangère. En Dieu, il n'y a ni calculs ni comparaisons.Pour bien faire, nous devrions bannir de notre dictionnaire ce qui relève de près ou de loin du vocabulaire comptable car nous ne sommes pas appelés à être « plus ceci&...
LES ÉCLATS DE LA COLÈRE
CHRISTUS N°269
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Marie-Caroline BUSTARRET

Si l'irruption de la colère dans la revendication collective constitue une menace, force est de constater qu'elle est également l'expression d'une révolte légitime face à l'injustice. L'Église, au sein de laquelle s'élève avec force la voix des victimes de violences perpétrées par ses propres membres, n'est pas épargnée. La colère est une émotion réactive qui surgit en soi ; elle ne relève ni du bien, ni du mal. Il est dès lors possible de la considérer dans ses éclats sombres et lumineux et dans ce qu'elle produit, même si longtemps la tradition philosophique et spirituelle a posé sur elle un regard de condamnation. Les Pères de l'Église s'entendent sur le fait qu'elle doit être extirpée de l'âme bien qu'ils lui reconnaissent parfois aussi un caractère légitime. La colère est en effet nécessaire quand elle se fait protestation contre le péché et l'injustice et est dictée par l'amour. Dans la Bible, l'ire est avant tout l'affaire de Dieu. En lui font écho miséricorde et colère qui, toutes deux, signifient l'attachement de Dieu aux êtres humains. La tradition biblique confesse un Dieu en qui la colère ne contredit jamais l'amour. Cette émotion est un signe du vivant en nous, cela explique qu'elle s'invite jusque dans notre prière. On trouve au cœur de la prière biblique le combat intérieur dont la vie spirituelle ne peut faire l'économie : ainsi, la voix du psalmiste porte-t-elle tant les humeurs belliqueuses de l'âme inquiète que la louange fervente de l'orant. Cependant,...
LA CONVERSION
CHRISTUS N°270
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Marie-Caroline BUSTARRET

La conversion de chacun est un événement pour tous. Même si les récits de conversion racontent une aventure personnelle, ils ont pourtant une portée collective, ce que révèlent tant de vies de saints. Si l'appel à la conversion répond à une quête spirituelle, parfois à un désir intime, si elle se propose comme un bouleversement inattendu, la tâche de tout converti consiste à la laisser prendre place dans son existence, à la soumettre à l'épreuve du réel et à celle de la rencontre de frères et de sœurs. La conversion se déploie et se renouvelle ainsi au long de la vie, dans la fidélité à soi comme dans l'ouverture à l'autre et à l'Esprit qui fait naître le désir et le purifie. Cheminer de la sorte, c'est entrer dans la dynamique même de l'Esprit qui fait toute chose nouvelle, c'est accueillir la nature « débordante » de celui-ci comme le feu qui se répand. L'histoire d'Ignace en témoigne : seul, puis avec ses compagnons, il n'a eu de cesse de chercher à ouvrir à d'autres la possibilité de la rencontre intime de Dieu, en entrant en conversation avec eux. Toute expérience singulière de conversion s'insère dans une histoire collective plus large et contribue à la féconder. La conversion personnelle relie à d'autres et c'est dans l'expérience de la relation qu'elle prend corps. La conversion se mesure à son fruit qu'est la communion, même si cette dernière n'est jamais acquise. Ce mouvement personnel de conversion, qui s'inscrit dans une dynamique collective toujours à parfair...
LA CONVERSION
01 AVRIL 2021
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Marie-Caroline BUSTARRET
La conversion de chacun est un événement pour tous. Même si les récits de conversion racontent une aventure personnelle, ils ont pourtant une portée collective, ce que révèlent tant de vies de saints. Si l'appel à la conversion répond à une quête spirituelle, parfois à un désir intime, si elle se propose comme un bouleversement inattendu, la tâche de tout converti consiste à la laisser prendre place dans son existence, à la soumettre à l'épreuve du réel et à celle de la rencontre de frères et de sœurs. La conversion se déploie et se renouvelle ainsi au long de la vie, dans la fidélité à soi comme dans l'ouverture à l'autre et à l'Esprit qui fait naître le désir et le purifie. Cheminer de la sorte, c'est entrer dans la dynamique même de l'Esprit qui fait toute chose nouvelle, c'est accueillir la nature « débordante » de celui-ci comme le feu qui se répand. L'histoire d'Ignace en témoigne : seul, puis avec ses compagnons, il n'a eu de cesse de chercher à ouvrir à d'autres la possibilité de la rencontre intime de Dieu, en entrant en conversation avec eux. Toute expérience singulière de conversion s'insère dans une histoire collective plus large et contribue à la féconder. La conversion personnelle relie à d'autres et c'est dans l'expérience de la relation qu'elle prend corps. La conversion se mesure à son fruit qu'est la communion, même si cette dernière n'est jamais acquise. Ce mouvement personnel de conversion, qui s'inscrit dans une dynamique collective toujours à parfair...
QUAND LE VOYAGE NOUS FAIT
01 OCTOBRE 2021
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Marie-Caroline BUSTARRET
Nous croyons être les artisans de notre vie intérieure et désirons mettre tous nos efforts au service de sa progression. Même s'il ne faut pas perdre de vue ce qui dépend de nous, l'essentiel n'est pourtant pas là. Il n'en demeure pas moins que nous peinons à accepter notre impuissance en ce domaine, car il est décidément bien difficile de se défaire de l'illusion que la croissance dans la foi serait le fruit d'une volonté bien exercée ! Après ces mois d'été où nous avons peut-être pris la route pour voir du pays, nous pourrions appliquer, à notre manière souvent volontariste de « mener notre embarcation » spirituelle, l'affirmation formulée en préambule d'un magnifique récit de voyage : « On croit qu'on va faire un voyage mais, bientôt, c'est le voyage qui nous fait1. » Certes, tout périple requiert une part de préparation et d'attention. Mais vient toujours le jour où, si nous voulons aller plus loin dans la découverte d'un pays nouveau, il faut essayer de mettre fin à la tentation de tout consigner, de tout comprendre et de décider de l'itinéraire jusque dans ses moindres détails. Il s'agit de se rendre simplement présent à ce qui est donné : une saveur inattendue, un paysage, des visages. Non plu...
JOURS DE ROYAUME
01 OCTOBRE 2021
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Marie-Caroline BUSTARRET
Labor et Fides, « Petite bibliothèque de spiritualité », 2021, 200 p., 18 €.Dès les premières pages de son livre, Marie-Laure Choplin, que certains lecteurs de Christus ont peut-être eu le bonheur de découvrir dans le numéro de juillet 2021 (n° 271, pp. 16-21), énonce clairement son intention : regarder « comment la vie se donne, imprévisible et déroutante » à travers les rencontres et dans nos jours tels qu'ils sont et non pas tels que nous rêvons qu'ils soient. Les jours « tels qu'ils sont » que Marie-Laure Choplin va considérer, ce sont les jours d'épreuves comme les jours de joie. La rencontre de l'autre, qu'il soit un étranger ou que l'intimité soit tout d'un coup possible, reste ce qui donne sens aux jours. Ici, l'autrice fait le choix d'honorer deux genres de rencontres bien particuliers : celles qu'il lui a été donné de faire en tant qu'aumônière d'hôpital et celles qui se jouent dans une relation amoureuse. Ce livre est porté par le désir de contempler et de faire contempler la vie qui naît de toute relation, même quand rôdent la maladie et la mort. Le Royaume, dit-elle, « se lève entre nous » dans l'espace qui nous relie. De n'importe quel lieu peuvent surgi...
QUAND LE VOYAGE NOUS FAIT
CHRISTUS N°272
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Marie-Caroline BUSTARRET

Nous croyons être les artisans de notre vie intérieure et désirons mettre tous nos efforts au service de sa progression. Même s'il ne faut pas perdre de vue ce qui dépend de nous, l'essentiel n'est pourtant pas là. Il n'en demeure pas moins que nous peinons à accepter notre impuissance en ce domaine, car il est décidément bien difficile de se défaire de l'illusion que la croissance dans la foi serait le fruit d'une volonté bien exercée ! Après ces mois d'été où nous avons peut-être pris la route pour voir du pays, nous pourrions appliquer, à notre manière souvent volontariste de « mener notre embarcation » spirituelle, l'affirmation formulée en préambule d'un magnifique récit de voyage : « On croit qu'on va faire un voyage mais, bientôt, c'est le voyage qui nous fait1. » Certes, tout périple requiert une part de préparation et d'attention. Mais vient toujours le jour où, si nous voulons aller plus loin dans la découverte d'un pays nouveau, il faut essayer de mettre fin à la tentation de tout consigner, de tout comprendre et de décider de l'itinéraire jusque dans ses moindres détails. Il s'agit de se rendre simplement présent à ce qui est donné : une saveur inattendue, un paysage, des visages. Non plus toucher mais se laisser toucher, non plus regarder mais se laisser regarder et, pour finir… se laisser accueillir. Car arrive le moment de se rendre à l'évidence : le « voyage » que nous avons entrepris est en train de nous transformer. Alors même que nous pensions le faire,...
JOURS DE ROYAUME DE MARIE-LAURE CHOPLIN
CHRISTUS N°272
-
Marie-Caroline BUSTARRET

Labor et Fides, « Petite bibliothèque de spiritualité », 2021, 200 p., 18 €.Dès les premières pages de son livre, Marie-Laure Choplin, que certains lecteurs de Christus ont peut-être eu le bonheur de découvrir dans le numéro de juillet 2021 (n° 271, pp. 16-21), énonce clairement son intention : regarder « comment la vie se donne, imprévisible et déroutante » à travers les rencontres et dans nos jours tels qu'ils sont et non pas tels que nous rêvons qu'ils soient. Les jours « tels qu'ils sont » que Marie-Laure Choplin va considérer, ce sont les jours d'épreuves comme les jours de joie. La rencontre de l'autre, qu'il soit un étranger ou que l'intimité soit tout d'un coup possible, reste ce qui donne sens aux jours. Ici, l'autrice fait le choix d'honorer deux genres de rencontres bien particuliers : celles qu'il lui a été donné de faire en tant qu'aumônière d'hôpital et celles qui se jouent dans une relation amoureuse. Ce livre est porté par le désir de contempler et de faire contempler la vie qui naît de toute relation, même quand rôdent la maladie et la mort. Le Royaume, dit-elle, « se lève entre nous » dans l'espace qui nous relie. De n'importe quel lieu peuvent surgi...
FIN DES DISCUSSIONS ENTRONS DANS LA CONVERSATION
CHRISTUS N°274
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Marie-Caroline BUSTARRET

Qui ne s'est jamais pris au jeu des échanges informels consacrés à « refaire » l'Église, à poser sur elle un diagnostic où se mêlent critiques et professions de foi ? Autant de discussions au cours desquelles nous remettons sans fin le sujet sur la table en tournant ainsi comme sur un carrousel, grisés un temps par l'illusion d'aller de l'avant mais conscients que ces tours de manège ne mènent nulle part !
En cette année de lancement d'un synode sur la synodalité, il nous est proposé de quitter nos plans imaginaires de réformes et de prendre part concrètement à la conduite de l'Église. Il ne s'agit plus d'émettre un avis mais de nous mettre à l'écoute de l'Esprit qui parle en chacun de nous et surtout entre nous… Pour l'entendre, extrayons-nous du brouhaha de la discussion et entrons dans la conversation, ce moment où nous prenons conscience que « nos paroles nous engagent et que nous devons leur être fidèles » (Albert Camus). Énonçons nos désirs, sans d'abord viser d'autre but que de les offrir à l'écoute des autres, et demandons en retour que ceux-ci nous fassent la grâce de formuler les leurs. L'enjeu est majeur, il s'agit de créer l'Église ensemble.
Elle est bien modeste la route que nous entreprenons, nous ne voyons peut-être pas où elle va. Et, même si nous pouvons parfois douter qu'elle mène quelque part, engageons-nous dans notre parole, car c'est ainsi que la conversation se fera créatrice.
LA SAVEUR DES JOURS ORDINAIRES
CHRISTUS N°276
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Marie-Caroline BUSTARRET

Au calme dans son oratoire, éclairé de la seule flamme d'une bougie, il fait rouler les mots du psaume sur sa langue comme il fait avec le vin pour en savourer chaque arôme. Il se répète ainsi les paroles d'un autre et se désole de ne pas, ou de ne plus, pouvoir les faire siennes. Il en égrène les formules, cherchant en vain à saisir des parfums qui lui échappent :
« Voyez et goûtez… goûtez et voyez… voyez… goûtez…
Goûtez et voyez le Seigneur est bon…
Goûtez et voyez le Seigneur… »
Dans la pénombre de sa chambre, il ne voit, ni ne goûte rien.
Maintenant qu'il a perdu le plaisir de s'agenouiller, que lui reste-t-il à savourer dans l'oratoire quand il s'y rend à la seule fin de tenir la promesse faite au temps des premiers élans ? Il ne retrouve plus la consolation, qu'il sait réelle, à maintenir son attention sur les lignes de sa Bible. Comment alors s'enivrer du nectar chanté par l'Écriture quand le Seigneur semble ne plus se donner, ni à entendre, ni à regarder, ni à savourer ?
Cependant, malgré le poids qui alourdit les mots de sa prière, il sait que les promesses du psalmiste ne sont pas vaines. Alors, il revient chercher la nuit et le silence d'où, croit-il, ne résonne qu'un monologue intérieur. Et il se tient là… fidèle. Il lit et relit le Livre pour s'imprégner malgré tout des récits et de la sagesse qui emplissent ses pages.
À cette lumière, il se surprend enfin un jour à considérer sa propre vie et à y chercher les traces d'une Présence. Et, comme pour un livre, i...
ENCEINTES DE LAURENCE AUBRUN
CHRISTUS N°276
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Marie-Caroline BUSTARRET

Préface d'Alice Ferney, Éditions de l'Emmanuel, 2021, 216 p., 17 €.
Comme le fait remarquer l'auteure de ce livre, deux expériences sont universellement partagées : la naissance et la mort. Sur la seconde, les philosophes se sont déjà largement penchés, alors que la première semble être un point aveugle de l'histoire de la pensée. C'est pour remédier à ce manque que Laurence Aubrun, elle-même philosophe, écrit ce livre. Et voici que le lecteur se trouve plongé, en ces pages éclairantes, dans l'expérience de la maternité, de son point de départ à son point d'arrivée (un point de commencement, à vrai dire). Il y découvre les moments d'une chronologie partagée par les femmes et les hommes. Neuf mois débordant sur le temps d'avant : celui d'un corps qui, chaque mois, se dispose à abriter une nouvelle vie. Neuf mois qui se prolongent dans le temps d'après : celui de l'accueil de cette vie. Neuf mois et une vie entière de bouleversements physiques et spirituels.
Le pari de l'auteure, remporté haut la main, est de nous faire « découvrir, de l'intérieur et par le corps, l'incommensurable puissance de la chair, de la vie et de l'amour » et de chercher une réponse à cette question majeure : « que signifie pour l'humanité de naître en relation ? » car « l'expérience de la maternité vient bousculer la représentation d'un individu fermé sur lui-même, isolé et unifié ». Ces pages en attestent, qui parviennent à s'adresser aux hommes dont on pourrait croire qu'ils sont exclus de l'expér...
LA SAGESSE DU COMBATTANT
CHRISTUS N°276
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Marie-Caroline BUSTARRET

Dès la rentrée, je me suis vue à nouveau happée par l'actualité et son triste rappel des affrontements qui déchirent les hommes. Loin de la presse, l'été a offert un répit mais est-ce parce que la voix des médias s'est tue pour moi que j'ai pu me rendre attentive à mes conflits intérieurs ? En effet, il nous est donné d'arbitrer des combats intimes sur des sujets mineurs, comparés aux événements du monde, mais qui demeurent cruciaux. Nous assistons, presque impuissants, à une rivalité au cours de laquelle ce qui, en nous, rechigne à choisir le bien s'oppose à ce qui, en nous, veut le poursuivre. Une part de nous-même sait ce qu'elle désire (servir, soutenir, pardonner, donner, s'amender, etc.) mais, bien qu'étant suffisamment lucide pour nommer la voie bonne, elle n'est pas assez forte pour se décider à s'y engager. Nous nous retrouvons ainsi spectateur et acteur d'un petit théâtre silencieux qui se joue à l'insu de tous.
Dans cette bataille, il est certes souhaitable que nous choisissions le bien : nous en ressortons fortifiés. Cependant, il nous arrive aussi de perdre la partie. La tête basse, déplorant notre faiblesse, nous empruntons alors un chemin qui a des airs de tristesse. Notre tâche n'est pas de refuser le combat intérieur, signe de santé spirituelle, et moins encore de nous en culpabiliser ; comme si, être saint, c'était être libéré de toute lutte intestine. La sagesse consiste à ne pas nous glorifier quand nous l'emportons et à ne pas nous désoler quand nous...
IMPOSSIBLE PARDON ?
CHRISTUS N°277
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Marie-Caroline BUSTARRET

Approchons le pardon avec prudence sans cependant le perdre comme fondement indispensable de la vie avec d'autres. Nous mettre à l'écoute des victimes de crimes conduit à entrevoir l'impossibilité du pardon. Le pardon relève de la grâce et, de ce fait, il ne peut se commander. Il nous revient donc de poser le pardon sur des bases qui permettent de l'envisager pour ce qu'il peut être : le fruit d'un désir humble et puissant, porté par le Christ.La justice restaurative opère un déplacement de perspective, en mettant les victimes au centre. L'Église elle-même pourrait s'en inspirer et repenser son discours sur le pardon, notamment sacramentel. Dans un esprit similaire, lors du Grand Pardon, le judaïsme enjoint les croyants à se présenter devant celles ou ceux qu'ils ont offensés. À travers ses multiples récits qui dévoilent la complexité des rapports humains, la Bible elle-même enseigne qu'il n'est pas de vivre ensemble sans la restauration des relations de fraternité. Confesser un Dieu qui entre en relation avec l'humanité et par là assume ce qui relève de toute relation – le risque de blesser ou d'être blessé – ne mène-t-il pas à poser la question : Dieu peut-il être le destinataire de notre pardon ?Par sa vie et sa mort en victime innocente...
UNE QUESTION DE SAVOIR-VIVRE
CHRISTUS N°278
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Marie-Caroline BUSTARRET
Chaque année, la longue traversée liturgique du carême et du temps pascal nous présente un paradoxe dont nous perdons parfois de vue le caractère inouï : celui d'une mort qui est pourtant vie. À travers les textes de l'Évangile que nous lisons jour après jour jusqu'à Pâques, il nous est donné d'assister à la progression d'une implacable logique funeste : petit à petit, la tension monte, les oppositions au Nazaréen s'affirment et les conflits se multiplient jusqu'au terrible dénouement. Pour nous, témoins accablés de ces événements, une question surgit alors : comment se fait-il que cette chronique d'une mort annoncée, par celui-là même qui va la traverser, soit un récit de vie ? De la même façon qu'il avait passé son chemin au milieu de la foule en colère (Luc 4, 30), Jésus affronte avec détermination l'hostilité croissante de ses opposants, annonçant quoi qu'il en coûte la bonne nouvelle dont il est porteur. Sa liberté ne s'exerce pas dans le choix d'un sort plutôt qu'un autre mais dans sa détermination à rester fixé sur la fin pour laquelle il a été envoyé parmi nous. Il trace son chemin, faisant sien ce qui advient. Il ne laisse pas cette mort à venir ronger la vie...
LES TRÉSORS DE LA PIÉTÉ POPULAIRE
CHRISTUS N°279
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Marie-Caroline BUSTARRET

« Dire le chapelet ? allumer un cierge ? caresser la roche de la grotte à Lourdes ? Très peu pour moi ! » Nous sommes parfois tentés de considérer la piété populaire avec méfiance. Or, la piété populaire n'est-elle pas riche de beautés et d'une force évangélisatrice. Cette manière de vivre la foi passe par le corps et se vit en fraternité, ose dire sa joie et ses peines. Elle recèle des trésors qu'il s'agit d'honorer : « Les expressions de la piété populaire ont beaucoup à nous apprendre et [...] elles sont un lieu théologique auquel nous devons prêter attention » (Evangelii Gaudium, 126). La piété populaire est d'abord un vécu à partager qui donne le goût de contempler ces manifestations colorées de la foi.L'expérience spirituelle est ici celle d'une capacité spontanée à s'appuyer sur Dieu, de qui vient tout secours ; c'est pourquoi la piété populaire tient une grande place dans le cœur des pauvres qui savent d'expérience combien nous sommes tous vulnérables. Si elle est l'apanage des cœurs humbles, la piété populaire n'est cependant pas la foi des ignorants, c'est la foi du peuple ; elle émane de lui et le constitue comme...
MUSULMANE, DISCIPLE DU CHRIST, DE CHAHINA-MARIE BARET
CHRISTUS N°279
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Marie-Caroline BUSTARRET

Ce livre fait le récit d'une conversion. Née dans une famille indo-musulmane, Chahina-Marie a grandi à Madagascar. À l'adolescence, elle vient en France poursuivre ses études et fait, à l'âge adulte, la rencontre du Christ. Commence alors un long parcours de conversion au christianisme. Portée par une conviction forte que sa foi chrétienne n'est pas en rupture avec la foi de son enfance, foi qui a fait d'elle la femme qu'elle est devenue, Chahina-Marie va persister (parfois contre vents et marées) à maintenir que son attachement profond au Christ est un accomplissement de sa foi musulmane. Ce qui devient une évidence pour elle au fil des années est loin d'être facile à accepter par nombre de chrétiens qu'elle rencontre, à commencer par certains qui seront amenés à attester de son chemin de foi en vue du baptême. Chahina-Marie tient bon et nous lui en savons gré. En effet, par les temps qui courent, il est indispensable que des témoins comme elle prennent la parole pour nous rappeler que les frontières ne doivent pas se transformer en murailles. Son multiculturalisme, profondément ancré dans son expérience de vie, frappe dès les premières pages. Il faut ce genre d'expérience et de témoins pour nous permettre de comprendre que les frontières et barrières ne correspondent pas à une réalité qui est toujours métissée. L'itinéraire de Chahina-Marie, enrichi par ce tissage des religions et des cultures, n'est pas sans évoquer celui d'un certain Gad Elmaleh. Ce dernier montre éga...