AU SERVICE DE LA MULTITUDE
CHRISTUS N°262
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Anne-Marie PETITJEAN
Dans cet entretien, une théologienne partage sa vision de ce qui fonde la vie spirituelle en paroisse. Pour cela, elle s'appuie sur l'expérience d'un engagement concret sur le terrain et sur sa réflexion concernant l'Église, qui a fait le cœur de son travail théologique.
Christus : Vous êtes religieuse auxiliaire du sacerdoce, enracinée depuis longtemps dans des paroisses du nord-est parisien, et théologienne, notamment en ecclésiologie. De ce fait, vous avez un regard particulier sur les paroisses au croisement de ces deux caractéristiques. Que pouvez-vous nous en dire ?
Anne-Marie Petitjean : Je suis en effet théologienne et engagée dans l'œcuménisme : c'est véritablement l'orientation de ma vie et cela détermine sûrement mon regard sur beaucoup de choses. J'habite dans la banlieue nord-est de Paris. Puisque j'enseignais l'ecclésiologie au Centre Sèvres, j'ai cherché un lieu d'Église où je pouvais avoir une vie ecclésiale cohérente avec cet enseignement que je prodiguais et un enseignement nourri de ce qui, aujourd'hui, fait la vie d'un diocèse et de ses paroisses. Du fait de la tradition pastorale de ma congrégation et des liens fraternels que nous entretenions avec le diocèse de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), c'est ce dernier qui m'a accueillie et qui m'a donné une miss...
LE DERNIER REPAS DE JÉSUS
CHRISTUS N°268
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Anne-Marie PETITJEAN

Les paroles dites par Jésus au moment de son dernier repas révèlent le secret de ce que fut sa vie filiale et fraternelle et, en conséquence, le style de vie de celles et de ceux qui se reçoivent de Lui.
Durant le confinement, bien des prêtres, dans le but de contribuer à nourrir la vie de foi des communautés dont ils sont les serviteurs, ont filmé qui des adorations eucharistiques, qui des bénédictions de rues ou de villes avec l’ostensoir. Le pain eucharistique ainsi offert à la vénération est, du fait de la conception de nos ostensoirs et du fait peut-être d’habitudes respectables, un pain inentamé, non rompu et isolé de ce pour quoi il fut et est donné, à savoir être mangé par un nombre certain de convives, pour qu’ils deviennent ainsi le Corps du Christ?: « Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain » (1 Corinthiens 10,17).
Par ailleurs, et ceci explique cela, la tradition occidentale, à la suite des débats concernant le mystère de la présence du Christ se donnant ainsi aux siens, a porté toute son attention sur ce qu’on appelait « le miracle eucharistique » et sur les mots « CECI est mon corps, CECI est mon sang ». Leur inscription en majuscules au cœur des prières eucharistiques, soit dans les missels, soit sur les petits panneaux se trouvant autrefois sur les autels (les « canons d’autel »), en témoignait et en témoigne encore. Cette affirmation de foi (à laquelle, bien entendu, nous tenons)...
"IL ENTRA POUR RESTER AVEC EUX..."
CHRISTUS N°272
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Anne-Marie PETITJEAN

Quand bien même le Christ semble-t-il absent à nos yeux, il reste réellement présent dans notre histoire. Cette présence s'exprime et expérimente de diverses manières – Parole, Pain, Fraternité – qui se renvoient les unes aux autres.
Parole, Pain, Fraternité… Le récit d'Emmaüs « imprime » en nous la logique même du trépied porteur de ce numéro de Christus. Sur le chemin des disciples, les Écritures deviennent cette Parole qui brûle le cœur tandis que la fraction du pain « eucharistié » et sa donation signent l'identité de Celui qui s'est rendu présent sur leur route pour les renvoyer vers leurs frères.
Diverses formes d'une présence
En ce geste, symboliquement et « en raccourci » (saint Irénée), tout est dit du Christ, de son rapport au Père et de ce qu'il est pour nous : ouverture radicale et don de soi. Leurs yeux s'ouvrent mais, aussitôt, le Ressuscité disparaît à leur regard. Ils retournent alors à Jérusalem pour confesser sa Résurrection. Ils ne sont plus seuls, ils savent qu'il reste effectivement et mystérieusement avec eux : ils l'ont entendu et l'entendront parler au travers des Écritures, ils reviennent et n'en finiront pas de revenir en hâte vers leurs frères. Dans le texte de Luc, la présence eucharistique n'est pas isolée d'autres formes de présence. Celle-ci est, certes, réelle, mais elle est aussi – tout autant, mais autrement – réelle en ces autres moments. Luc donne ainsi à entendre qu'il est divers modes de présence de Celui qui n'est entré dans l'Histoi...