Zurbarân, Trad. C. de Montclos. Gallimard, coll. «  Maîtres de l'art », 1999, 149 p., 280 F.
Sur la terre comme au ciel, Zurbaran, Le retable de Jerez de la Frontera. Marne, coll. « (In certain regard », 1999, 141 p., 198 F.


Dans sa monographie sur Zurbarân, Arsenio Moreno montre bien comment, d'emblée, le grand peintre sévillan (1598-1664) s'est inscrit dans le cadre du concile de Trente qui prônait le recours à la beauté pour traduire et établir la présence divine : l'image est alors considérée comme un argument déclaré du discours de l'Eglise catholique. Pour Zurbarân, au contraire d'un Vélasquez, son contemporain, il semble bien que peindre soit du même ordre que communier ou prier. Sa manière ne tend pas à nous faire partager les mouvements de sa passion, mais à nous en offrir l'aboutissement.
Ainsi présente-t-il dans ses compositions une succession de formes ordonnées qui ne heurtent jamais le regard. En ce sens, on pourrait y déceler un aspect presque français, par ce souci d'une claire vision où chaque tableau est le fruit d'additions géométriques : pureté de lignes, douce tension de l'ensemble harmonie de la composition, sans tapage mièvrerie ni grandiloquence Peinture en quête de simplicité, d'une théâtralité effacée elle parait chercher, par ses harmonies de couleurs et de blancs éclatants, à inhiber toute violence, toute action, comme on le voit dans les oeuvres choisies dont quelquefois l'insistance sur les détails apparaît gratuite.
L'ouvrage d'Odile Delenda s'intéresse, quant à lui, à une oeuvre majeure de Zurbarân : le retable de Jerez de la Frontera en Andalousie commande qu'il effectua au milieu de sa vie pour un monastère de chartreux. Cet ensemble, salué et apprécié dès sa création, subit au cours du temps un démembrement en règle les musées de Cadix et de Grenoble s'en partageant aujourd'hui les toiles. Quand il se concentre sur les événements de la petite enfance du Christ Zurbarân offre une vision très humaine et non stéréotypée des personnages évangéliques. En dépeignant au centre du retable la bataille miraculeuse de Jerez, il ne vise pas l'élévation, car la ftontalité reste de mise. Cette scène guerrière forme une trouée dans l'ensemble, comme pour signifier que si l'histoire passe et s'évanouit dans nos mémoires, nous demeurons, ici et maintenant liés au Christ.