Au Québec, où les jeunes désertent massivement les activités pastorales, vingt-deux intervenants (animateurs en pastorale jeunesse), accompagnés par des chercheurs universitaires et issus de diverses institutions ecclésiales, prennent au mot l'invitation du pape François à examiner nos manières d'être en mission et à sortir à la rencontre des jeunes. Le processus s'étale sur trois ans, en quatre cycles de recherche-action. Dès le premier cycle, et face à l'inconnu, les intervenants résistent à abandonner le « système pastoral d'encadrement » dont ils sont familiers. À la faveur des relectures successives d'expérience, et en entrant dans une démarche spirituelle, ils reconnaissent en eux des résistances à perdre leurs repères et à sortir à la rencontre des jeunes sur leurs lieux de vie. Au fur et à mesure des cycles suivants, retrouvant « sur la route » leur identité de disciples, les intervenants consentiront à l'inconfort de la mission et à l'émergence de nouvelles formes d'actions pastorales.

Il fallait donc une certaine dose de dépouillement et l'aveu d'une certaine vulnérabilité pour être en mesure d'écouter, c'est-à-dire de se mettre soi-même sous la conduite de l'Esprit, avec ceux à qui l'on est envoyé. Ainsi grandit la foi en l'Esprit et en l'Église qui « émerge » du travail de l'Esprit. C'est bien sur la route, et non par des programmes de pastorale préconçus, que l'Église est « instituée » : par des paroles échangées, par un dialogue de salut, par des gestes instituants. Il nous faut rechercher ces processus qui font naître l'Église. Non pour faire nombre, mais pour être au service des jeunes (par des paroles échangées) et servir l'Esprit : se laisser soi-même travailler par lui et, par là, devenir « compagnons des jeunes sur la route » (par le dialogue de salut), et introduire au mystère de l'Église ceux qui, parmi les jeunes, sont appelés à devenir des disciples (par des gestes instituants).

Ce texte est écrit par cinq théologiens partageant une même vision de l'Église, mais à partir de champs de compétences différents. On ne cherchera donc pas une continuité chronologique entre les parties, mais plutôt une succession d'approches thématiques, au risque de certains recoupements. En outre, on ne trouvera pas de cartographie détaillée des étapes de la recherche, des lieux visités, des situations et des personnes rencontrées. Seuls quelques verbatims, cités pour illustrer des questions théologiques, donnent une idée du contexte.

L'audace et le mérite des auteurs sont de dénoncer une certaine logique de puissance au nom de laquelle des structures ecclésiales chercheraient à affirmer leurs fonctions sociales. Ils montrent que l'Église est plutôt ce qui naît de toute expérience authentique de l'Esprit. Vision inspirante, qui encouragera les intervenants en pastorale de la jeunesse à redécouvrir leur identité baptismale, et les invitera à vivre leur mission dans une plus grande liberté intérieure.