« Comment ne pas faire mémoire avec reconnaissance envers l'Esprit de l'abondance des formes historiques de vie consacrée suscitées par lui et présentes aujourd'hui dans le tissu ecclésial ? Ces formes ont l'aspect d'une plante aux multiples rameaux, qui plonge ses racines dans l'Evangile et produit des fruits abondants à tous les âges de l'Eglise » 1. Puisque « l'histoire est autant explication que description et reconstitution » 2, il peut être opportun de considérer les origines de certains types de vie consacrée 3, depuis les ermites du désert égyptien jusqu'aux nouvelles « communautés plurielles ». Cette évolution n'étant certainement pas terminée, la connaissance du passé permet de mieux affronter les problèmes présents et de préparer l'avenir. En effet, certaines étiquettes affichées de nos jours témoignent d'un flou dans les définitions : par exemple, le label « moniale » est employé assez librement par des femmes qui font de l'évangélisation des plages, l'été, ou bien qui travaillent à mi-temps en entreprise.
 

Au commencement était la vie monastique


Au commencement était la vie monastique elle est en fait présente dans toutes les grandes religions. Des hommes ou des femmes se séparent du groupe ethnique ou social pour vivre sous la direction d'un maître, menant une forme de vie austère, caractérisée par des veilles, des jeûnes et des mortifications corporelles Ce phénomène monastique est différent de l'institution sacerdotale, qui est nécessairement plus intégrée à la structure même de la société 4.
Les premiers moines chrétiens s'installèrent dans les déserts du Moyen Orient pour pousser à l'extrême l'imitation du Christ et des apôtres dans leur recherche de Dieu Antoine est considéré comme leur père, et pour Athanase (cf. sa Vie de saint Antoine, composée en 357) c'est sa séparation radicale d'avec le monde qui le distinguait des autres chrétiens. L'histoire personnelle d'Antoine est aussi un reflet de l'évolution générale du monachisme de l'érémitisme vers le cénobitisme. Après une vingtaine d'années passées dans un isolement extrême, il sortit de sa solitude et accepta des disciples.
De manière générale, le groupe informel évolue vers une communauté structurée ; c'est le résultat de l'expérience et l'expression d'une prudence. Lorsqu'un mouvement prend de l'ampleur, il faut organiser et accepter des compromis, voire des compromissions. Ces difficultés, cette tension existentielle, donnent naissance à des règles de vie dans les communautés et à un corpus législatif dans l'Eglise. Ce même phénomène explique les réformes, parfois violentes, qui ont jalonné l'histoire de la plupart des Ordres, comme celle du Carmel, entreprise par Thérèse d'Avila et Jean de la Croix au XVIe siècle.
Quand ils s'installeront en Europe au IVe siècle, les moines éliront domicile dans des forêts à défricher ou des ma...

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