Dans le langage courant, l’ordinaire rime plutôt avec le quelconque, l’absence de relief ou de couleur particulière. A fortiori en temps de crise, où la succession de jours sans relief inquiète plus qu’elle ne lève d’espoirs pour l’avenir. C’est tout l’inverse dans la foi où l’ordinaire a goût d’inédit, de nouveauté : le bon vin de Cana donne au quotidien le parfum des noces de l’Agneau avec son peuple. L’eau vive du puits de Jacob donne aussi à nos gestes les plus répétitifs le sens insoupçonné d’une vraie rencontre.

Le « Temps ordinaire » de notre liturgie célèbre le temps de l’Esprit qui fait craquer nos étroitesses et enflamme nos énergies. Chaque jour peut être une manifestation du salut de Dieu. Cadeau précieux dans les temps difficiles, car il donne à chercher dans le présent ce qui peut être signe d’avenir et le mettre déjà en œuvre. Dans la foi, en effet, l’avènement de jours meilleurs ne fait pas table rase du passé au profit de modèles qui s’imposent par leur attrait. Il se déroule dans la modestie, quand nous consentons à voir disparaître ce qui ne porte plus de vie, et à reconnaître ce qui donne joie d’espérer dans les hommes. Le combat intérieur que cela appelle nous dit l’enjeu pascal de ce chemin où l’extraordinaire, la Bonne Nouvelle, se donne et se reçoit dans la banalité quotidienne.