Dieu propose à l'homme le bonheur. Comme le fiancé du Cantique, il vient lui dire « Lève-toi, ma bien-aimée, car voilà l'hiver passé » (2,10). Il faut souvent du temps pour qu'il s'éveille au murmure de cette voix qui l'appelle par son nom, pour découvrir quel bonheur lui est déjà donné. Aussi, son cœur se raidit, éteignant la joie commençante. Dieu, lui, comme le père du prodigue, l'attend et l'espère, sans jamais influencer sa réponse. Il guette au loin le retour de l'homme qui est allé au bout de ses doutes et de ses égarements.
La désolation atteint l'homme à partir de ce qui fait le tissu de son existence : les personnes avec lesquelles il est en relation, les événements qui s'enchaînent, les difficultés qui s'imposent et éprouvent sa sensibilité. Ceci constitue le terrain où des mouvements intérieurs de découragement et de trouble peuvent l'assaillir. Dans l'épreuve de la désolation, le temps est comme arrêté, l'énergie nécessaire au déploiement de la vie et à la créativité se trouve figée. Il n'y a plus de perspective, plus de dynamisme. Les soucis semblent dominer et peuvent pousser à perdre confiance en soi et en l'autre. La vue se brouille, le jugement s'enténèbre, les choix sont rendus difficiles, le repos et la paix troublés. Il est normal d'éprouver de tels mouvements ; mais se laisser inquiéter et accaparer par eux, voilà la désolation. Le propre d'une désolation spirituelle, c'est la perception de ces mouvements dans leur relation à Dieu. La certitude de sa Parole, la confiance en sa présence, sa bonté, sa force, tout disparaît, au point que l'âme se sent « séparée de son Créateur et Seigneur » {Exercices spirituels 317).
Quand l'homme est ainsi enfermé dans la désolation, ne sachant plus où