Dans une société secouée par de grandes idéologies, la foi est convoquée à se situer et à prendre parti. Ma génération a connu l'affrontement au marxisme et à l'existentialisme Les trois fameux « maîtres du soupçon » (Marx, Nietzsche et Freud) poussaient les chrétiens à répondre, à réagir, donc à rendre compte de leur espérance à la hauteur des contestations et avec une égale ardeur intellectuelle. Certes, le christianisme n'est pas une idéologie, mais il bénéficie, dans le dialogue, de la force de débat qu'elles impulsent. Les idéologies, dit-on, ont trépassé. Rien n'est moins sûr. Cette mort est manifeste pour les grandes pensées qui ont agité les esprits voici déjà plus de quarante ans. Leur succède une autre idéologie, plus largement répandue, mais de moins haute élévation. Une idéologie douce, plastique, tolérante aux variations, sans contenu nettement identifiable, répand un unique style de vie où se mêlent la loi du marché et de la consommation, l'attention méticuleuse aux intérêts particuliers et à l'exotisme le bien-être personnel et des élans humanitaires. Elle passe pour individualiste. Erreur : c'est la société qui s'est organisée pour être individualiste. En prime, l'affectivité du sujet détermine ce qui lui paraît vrai. Mais nul ne peut rien sur les grandes orientations économiques ni sur les cours de la Bourse. Les exaltations sentimentales consonent avec l'austérité anonyme qu'elles s'évertuent à compenser.
Comment penser cette platitude ? Les grandes oppositions soulèvent de fortes réactions. Mais tant de médiocrité enfante l'indifférence. Qu'est-ce qui pourrait mouvoir des engagements ?

L'indifférence des autres


L'indifférence : qui en parle ? D'abord, ceux qui ne sont pas indifférents. Il s'agit de celle des autres, aux yeux des défenseurs d'une cause. Les personnes engagées, chrétiens en tête,