Le choix de ces sept verbes ou actes – avoir faim, partager la table, se souvenir, remettre, anticiper, « avaler Jésus » et bénir – s’est fait en regardant ce qui dans la célébration de l’eucharistie apparaît rappelé, représenté, dit et reçu, et qui peut configurer la vie de ceux qui y participent. En réalité, plus que d’« accès », il faudrait parler de « circularité », car essayer de vivre ces verbes nous fait pénétrer dans l’eucharistie, même si le mystère que nous célébrons ici nous incite à les vivre dans notre existence quotidienne.

 Avoir faim

Dans une très nombreuse assemblée de religieuses, au cœur d’une maison en pleine campagne, un évêque célèbre l’eucharistie. Tout était d’une extrême solennité. Les rubriques de la cérémonie étaient scrupuleusement observées et l’homélie traitait de l’Église une, sainte, catholique et apostolique, à raison de dix minutes par adjectif. Dans le jardin, les oiseaux piaillaient en s’installant dans les arbres à la tombée du jour, et je me suis mise à penser que si Jésus avait été assis parmi les fidèles en bon laïc qu’il était, il se serait sans doute levé et aurait proposé à l’évêque avec beaucoup de respect s’il n’aurait pas l’amabilité de se taire un petit moment afin que tout le monde écoute les oiseaux. Cela m’inonda de consolation, qui atteignit son comble lorsqu’à l’offertoire le servant de messe trébucha, bouscula le calice, renversa le vin, et l’agitation que cela provoqua fit que cela commença à vraiment ressembler à un repas.
 

C’est qu’à force de styliser les symboles, de respecter les rites et de soigner la liturgie, nous courons le risque d’oublier qu’à l’origine de ce que nous célébrons, il y eut un repas d’adieu et que ce à quoi nous sommes invités n’est ni un spectacle, ni une représentation, ni une conférence, mais un repas fraternel. Et pour manger, la première chose dont on a besoin, c’est d’avoir faim. Cette réalité de la faim, effrayante dans les deux tiers de notre monde et qui devrait empêcher le tiers restant de dormir, a beaucoup à voir avec un certain « état de veille » qui maintient le désir éveillé.

Parmi toutes les stratégies pastorales auxquelles nous prêtons main-forte pour motiver les gens à participer à l’eucharistie (et nous motiver nous-mêmes, s’il y a lieu), celle qui invite à prendre contact avec l’authenticité de notre désir est la grande oubliée. Et pourtant, c’est celle qui touche la zone la plus profonde de notre être. Il est vrai qu’elle requiert un travail d’élagage que nous ne sommes pas toujours disposés à effectuer, tant le Désir – avec une majuscule – est affaibli et endormi par les petits désirs parasites que se charge de nous inoculer la société. Et ainsi, pris au dépourvu, nous les laissons envahir des zones de notre être qui devraient être l’espace de ce désir qu’exprime si bien le symbolisme de l’Ancien Testament :
Mon âme te désire dans la nuit,
mon esprit au plus profond se lève tôt pour toi,
et avec quel désir pour te nommer et te remémorer ! (Is 26,8-9)
Ma gorge a soif de toi, ma chair a faim de toi,
comme une terre sèche, brûlée, sans eau. […]
Je me rassasierai comme de graisse et de beurre
et mes lèvres te loueront dans la joie ! (Ps 63,2.6)
Combien j’ai désiré manger avec vous cette pâque
avant de mourir ! (Lc 22,14)
Mais nous, nous sommes sans appétit et apparemment repus, pris par mille distractions, et le profond désir du Seigneur et son Règne nous apparaissent trop exigeants, et leur prétention à être le tout de notre vie une exagération propre aux premiers temps restés bien loin derrière nous.
« Quand le fils de l’homme reviendra, trouvera-t-il du désir sur la terre ? », pourrait-on dire en paraphrasant Luc 18,8. Car peut-être suffit-il à notre bonheur, dorénavant, de programmer un voyage ou de projeter des vacances, d’être au courant des dernières nouvelles, de réussir à être connu ou reconnu par une douzaine de personnes en plus, d’obtenir les félicitations d’un chef, de n’avoir pas une minute libre (l’agenda rempli nous inonde d’un prestige stressé qui se porte beaucoup), d’écrire l’article qui fera parler, ou de trouver – enfin – cette automobile qui soit à la hauteur de notre importance… Il est difficile d’« avoir faim ».
Alors qu’Élie cheminait dans le désert vers l’Horeb et défaillait en marchant, un ange le réconforta avec du pain et de l’eau, « et avec la force de cet aliment, il marcha quarante jours et quarante nuits, jusqu’à parvenir à l’Horeb, la montagne de Dieu » (1 R 19,8). Nous aussi expérimentons la faim lorsque nous sommes en marche vers quelque « Horeb », ou que nous sommes usés par le travail pour le Royaume, par le souci pour les autres, par le combat pour un monde plus humain et pour ouvrir des voies à l’Évangile ; mais la question de savoir si nous montons ou descendons, agrippés à la barre du cheval de manège qui tourne autour de nous, nous paralyse dangereusement et nous empêche de recourir à ce Pain qui soutient nos forces.
 

Partager la table

« Tu ne seras pas l’ami de ton ami avant que vous n’ayez mangé ensemble une portion de sel », dit un proverbe arabe. Et cela suppose du temps partagé, une conversion prolongée, des confidences. Partager la table est le grand symbole de la capacité de convivialité, de la réconciliation et de l’inclusion, et, depuis l’Ancien Testament, les banquets sont la meilleure métaphore de ce que Dieu prépare à son peuple :
Le Seigneur des armées prépare
pour tous les peuples sur cette montagne
un festin aux plats succulents,
un festin de vin vieux ;
des plats garnis, des vins généreux.
Le Seigneur Dieu anéantira la mort pour toujours,
il séchera les larmes de tous les visages
et l’opprobre de son peuple l’éloignera de tout le pays,
le Seigneur l’a dit. (Is 25,6-8)
 
L’image que choisit Jésus pour nous parler de ce qui est central dans le Royaume n’est pas la vision extatique et béatifique qui a contaminé de platonisme nos images de la vie éternelle, mais un banquet, un repas festif. Son geste qui consiste à partager la table avec des gens marginaux n’était pas un acte eucharistique au sens strict du terme, mais il préfigurait et préparait l’eucharistie comme le point culminant de quelque chose qui avait été conçu et exprimé dans ces repas où les derniers étaient accueillis et avaient même une place de choix.
La première communauté rappelait ce geste, profondément subversif, précisément parce qu’il incluait juifs et non-juifs, hommes libres et esclaves, femmes et hommes, pauvres et riches, comme le rappelle l’exégète Rogelio Díaz Mateos :
Partager le pain exprimait et créait la fraternité parce que ce geste supprimait les barrières discriminatoires. Ce n’était pas un rite d’évasion ou de claustration, mais un engagement et une prise de position face à une société divisée en groupes opposés. Partager le pain était uni au souci que les pauvres et les démunis de la communauté puissent manger, et cela non seulement pour des raisons humanitaires, mais surtout dans l’urgence de former une Église concrète, qui a le devoir de rejeter la distinction entre riches et pauvres.
 

Se souvenir

Le thème du souvenir est associé pour moi à un soir de Jeudi saint à l’École biblique de Jérusalem, durant la procession où l’on porte le Saint Sacrement à l’autel. Les célébrants étaient nombreux, presque tous de grands professeurs d’Écriture sainte et, entre le simple style gothique de l’église, les habits dominicains, l’allure impressionnante de ces hommes, la science que l’on supposait derrière chacun d’eux et les voix graves et bien timbrées avec lesquelles ils chantaient le Pange Lingua, l’impact esthétique était extrêmement fort.
Et à ce moment-là, j’eus la sensation – et que les liturges me pardonnent – que toute cette beauté était ambiguë. C’est vrai qu’elle ouvrait un chemin vers la transcendance, mais elle était aussi une menace par sa capacité à nous distraire subtilement de l’essentiel. La solennité, l’encens, le latin, le gothique, les cierges et les fleurs pouvaient nous éloigner de l’histoire dramatique dont nous faisions mémoire : un Galiléen traîné dans les rues de Jérusalem, torturé dans des caves, hué par la foule, condamné par les autorités, exécuté publiquement en dehors de la ville.
Je suis consciente que c’est un thème délicat, mais si nous osions l’aborder, peut-être arriverions-nous à reconnaître notre tendance à conduire tout ce que nous avons à notre portée vers l’esthétique, la ritualisation, la majesté, la privatisation ou la « lightisation ».
Car « partager le pain » est bien plus qu’un geste rituel, c’est une façon de manger qui exprime une façon de vivre. Nous faisons mémoire de Jésus pour continuer à faire ce qu’il a fait : « partager sa vie », « se vider jusqu’à la mort », selon l’expression du quatrième chant du Serviteur (Is 53,12). C’est de cette mémoire que naît notre fraternité, et l’on « reconnaît Jésus à sa manière de partager le pain » seulement lorsque le style de vie qu’il exprima en se livrant devient présent, ne fût-ce qu’en germe, chez ceux qui prétendent le suivre.
 

Remettre

C’est un verbe qui apparaît étrange à notre culture, car s’y conjuguent précisément ses contraires : s’approprier, garder, retenir, accumuler, posséder. Habitués à la logique du calcul, de la mesure et de la prudence, il ne nous est pas facile d’entrer dans la logique de l’eucharistie où nous célébrons la plus grande profusion, le total gaspillage. Mais c’est précisément ce qu’il nous appelle à célébrer et à vivre : « Faites ceci en mémoire de moi. » Il ne dit pas : « Méditez », « écrivez », « réfléchissez théologiquement », « composez des hymnes », « brodez des ornements », « organisez des processions », « tenez des congrès », mais, simplement : « Faites-le. » Non pas comme une exécution mimétique, mais comme quelque chose qui naît du dedans, de ce recoin secret de notre vérité ultime.
Grâce au récit de la Cène, nous savons (pouvons « connaître intérieurement », dirait Ignace de Loyola) ce que Jésus avait au fond de lui avant sa mort. Sans l’eucharistie, il serait possible de penser qu’il est mort par une sorte de « logique de la nécessité ». Nous savons qu’il n’en fut pas ainsi : la nuit où il allait être livré, quand sa vie était en danger mais qu’il n’était pas encore arrêté et avait encore la possibilité d’échapper à une mort qui était sur ses pas, il fit le geste de se mettre tout entier dans le pain qu’il partagea et fit passer la coupe avec le vin d’une vie qui allait se répandre jusqu’à la dernière goutte. Et ce geste et ces paroles, rappelés dans chaque eucharistie, nous permettent de pénétrer le mystère d’une volonté de remise de soi qui devance la perte de soi : personne ne peut lui arracher la vie, c’est lui qui la remet volontairement (cf. Jn 10,18). J’ai toujours pensé que si les explications liées à la « satisfaction » (« l’offense infinie » et un dieu névrotique ayant besoin d’une victime qui fournirait une réparation adéquate) sont gravées de manière indélébile dans le peuple chrétien, c’est qu’elles nous permettent de nous laisser en dehors d’un prétendu « règlement de compte » entre le Père et Jésus. Et cela nous apparaît bien plus commode que de faire de sa remise de soi un style de vie, un chemin pour le suivre, un appel péremptoire à continuer à vivre de manière eucharistique, c’est-à-dire à échapper à la spirale de la convoitise et de la possessivité pour entrer dans la danse de la vie qu’on ne retient pas, dans l’étrange joie de s’offrir et de se donner, de « dé-vivre », de remettre tout ce qu’on est et possède.
 

Anticiper

Le retard de la venue du Seigneur et du Royaume fut bien difficile à accepter pour les premiers chrétiens. Derrière beaucoup d’images des paraboles que nous appelons « eschatologiques », se cache la tentative de déchiffrer une réalité déconcertante (cf. les termes de « nuit », d’« absence », etc.). Voilà pourquoi la foi des premiers chrétiens a eu besoin, comme la nôtre, de diriger son regard vers « les choses ultimes », de les écouter, les symboliser, les imaginer, les transformer en paroles prononçables. À ce profond besoin d’« anticiper », de goûter déjà, ici, quelque chose de ce qui sera définitif, répond « littérairement » l’Apocalypse et « sacramentellement » la célébration eucharistique, comme l’écrit le philosophe Xavier Zubiri : L’Hébreu, vivant parmi les choses, les voit toutes comme des promesses : pour l’Hébreu, la pierre n’« a » pas de dureté, n’« est » pas dure au sens que le Grec donnerait à ces mots. La pierre, que pour cela nous disons dure, se présente à lui comme demeurant ferme dans l’avenir, comme s’y comportant solidement. La pierre « est » dure, ce qui signifie : la pierre demeurera. Ainsi la vérité n’est-elle pas un attribut du présent, mais une promesse du futur […]. La vérité n’est pas cachée derrière le mouvement, comme en Grèce, mais derrière l’histoire. La vérité est une question de temps. Ce que les choses sont, leur destin, seront transparents quand viendra la « consommation des siècles ».
« La vérité est une question de temps. » L’eucharistie révèle ce que sera notre futur : une humanité réconciliée et fraternelle, une table pour tous où circuleront le Pain et la Parole, une communauté réunie autour du Ressuscité et participant de sa Vie. En nous y approchant à partir de l’expérience douloureuse d’un monde divisé et brisé, notre espérance se reconstitue en célébrant par anticipation la réalisation du rêve de Dieu sur le monde.
Vivre l’eucharistie comme une anticipation utopique, comme une « maquette » du monde voulue par le Père, nous fait revenir à notre quotidien en étant davantage capables de pardonner et d’être pardonnés, davantage décidés à travailler pour élargir des espaces où chaque homme et chaque femme trouvent leur place autour de la table commune, davantage disposés à être pain partagé et présence réelle de l’amour de Dieu pour ces derniers.
 

« Avaler » Jésus

J’ai eu beau chercher, je n’ai pas réussi à trouver un verbe moins âpre qu’« avaler », qui ait au moins l’avantage d’être dans notre vocabulaire familier : « Je vais l’avaler tout cru », « Cette pilule, j’ai encore du mal à l’avaler », « Je l’ai encore là » (et nous montrons notre gorge). Il nous est facile de tirer la langue ou de présenter la main pour communier et avaler le Pain, puis de revenir à notre place en nous recueillant et rendant grâce le mieux que nous pouvons.
Mais de temps en temps nous devrions changer l’expression « communier » par celle d’« avaler Jésus » afin de nous rendre un peu plus compte de ce que signifie « avaler » sa mentalité (metanoeite : « Changez de mentalité » [Mc 1,15], soit : « Ayez les mêmes sentiments que le Christ Jésus » [Ph 2,5]), ses préférences, ses choix, son style de vie, son étrange manière de vivre, de penser et d’agir. Je me rappelle une coutume dévote que l’on m’avait inculquée enfant et qui s’appelait « faire une communion spirituelle » : elle consistait à confier son cœur au tabernacle (on recommandait beaucoup de le faire en voyage, à la vue d’un clocher) et à désirer recevoir Jésus spirituellement puisqu’on ne pouvait le faire sacramentelle- ment. Un bon exercice serait de faire quelque chose de semblable en ouvrant l’Évangile au hasard. Et quand nous lisons, par exemple : « Celui qui voudrait être le plus grand parmi vous, qu’il soit votre serviteur » (Mt 23,12), « Je ne dis pas de pardonner jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix sept fois » (Mt 1,22), « J’ai pitié de ces gens, donnez-leur à manger » (Mc 6,34.37), « N’amassez pas de trésor sur la terre » (Mt 6,19), « Les prostituées vous précéderont » (Mt 21,31), « Prêtez sans rien attendre en échange » (Lc 6,35), etc., faire le geste intérieur d’« avaler » tout cela, de communier avec, de désirer au moins nous mettre en accord avec Jésus, grandissant en affinité avec lui, demandant au Père – avec la pauvreté de celui qui s’en sait incapable avec ses seules forces – de « nous mettre avec son Fils » et d’avoir « part avec lui » (cf. Jn 13,8), le « Premier-né d’une multitude de frères… ».
 

Bénir

C’est le verbe central de l’eucharistie et la moelle de notre vie. Le mot grec eucharistia, « action de grâces », a eu plus de fortune dans le Nouveau Testament qu’eulogia, « louange », l’autre mot avec lequel la Bible grecque traduit la berakah hébraïque (« bénédiction »). Or lorsque nous disons « eucharistie », nous recueillons tout l’héritage de bénédiction, de louange et de reconnaissance débordante qui parcourt l’ensemble de l’Ancien Testament. L’une des expériences les plus heureuses d’Israël est de reconnaître que la bénédiction de son Dieu lui accorde vie, fécondité, protection. Dire « bénédiction », c’est dire « cadeau », don gratuit (la « bénédiction » de Dieu est de l’ordre du « bienfait », dit l’exégète Alonso Schökel) et les croyants dans la Bible réagissent en donnant une « bénédiction ascendante » qui adresse au Seigneur leur louange et leur action de grâce. La bénédiction est donc le terme qui condense la richesse et l’originalité de la tradition où Jésus a appris à prier. À travers elle, le croyant israélite entre dans une triple relation avec Dieu, avec le monde et avec les autres. En répétant avec insistance tout au long du jour : « Béni sois-tu, Seigneur, Dieu de l’univers, pour… », il reconnaît Dieu comme origine de tout ce qui existe, le monde comme un don à accueillir et les autres comme des frères avec lesquels il faut participer à l’unique banquet de la vie.
 « Bénir signifie révéler l’ultime identité des choses, leur profonde intériorité, qui consiste à nous faire entrer en relation avec le Créateur » (rabbin Baruk Garzón). Les objets, l’activité, le travail, les relations, l’épaisseur de la vie, peuvent devenir opaques et entraver toute occasion de rencontre. Mais la bénédiction réussit à rendre la réalité translucide : elle illumine notre regard et le fait parvenir jusqu’à Dieu qui est son origine.
L’eucharistie est née dans ce contexte : « Il prit le pain et, après avoir prononcé la bénédiction, il leur en donna… » (Mc 14,22 ; cf. Mt 26,26 ; Lc 22,15 ; 1 Co 11,24). Elle est pour nous l’occasion de convertir toute notre vie en bénédiction, de « traîner » jusqu’à elle tout le poids de notre reconnaissance, tout ce qui en nous et dans toute la création est appelé à se transformer en chant, en « un hymne à sa glorieuse générosité » (Ep 1,14).
Nous avons entre nos mains et dans le cœur le choix de vivre « au rythme de la médisance » – plaintes, ressentiment et désenchantement – comme Israël au désert (cf. Ex 16–17) ou « au rythme de la bénédiction », en découvrant dans la vie, au-delà de son opacité, la présence qui faisait frissonner Jésus d’allégresse (cf. Mt 11,25) quand dans ses préférences il se sentait en « affinité » avec son Père.
L’eucharistie nous invite à communier avec sa bénédiction, sa joie nous est offerte comme un pain qui se partage : « Celui qui viendra, je lui donnerai une manne cachée. […] Je suis à la porte et je frappe : si quelqu’un écoute ma voix et m’ouvre la porte, j’entrerai dans sa maison et je dînerai avec lui et lui avec moi » (Ap 2,17 et 3,20). Nous sommes au moins capables de faire ces gestes élémentaires : mettre la table, être éveillés, rester en silence, veiller, reconnaître une voix, ouvrir la porte, accueillir reconnaissants cette manne cachée.
(Traduit par Yves Roullière)