Desclée de Brouwer, coll. « Temps et visages », 1998, 188 p., 98 F.

Claude-Henri Rocquet est un conteur. Quel que soit le genre littéraire visité, le théâtre (cf. Christus, n° 169, janvier 1996, pp. 85-86), la poésie (Nativité, Eolienne, 1997, 60 p., 70 F), le rédt (L'Enfance de Salomon, dit par Jean David, Studio SM, 1998, 70', 143 F), et même l'essai, il tente de nous faire pénétrer, par le seul pouvoir d'une langue comme coulant de source, dans l'intimité des personnages de la Bible. Plus récemment, comme pour atteindre une plus grande universalité, il tend à relier les scènes bibliques à sa terre d'élection, la Flandre, à laquelle le rattachent ses propres souvenirs d'enfance et la fréquentation assidue de Bruegel et Bosch. C'est d'ailleurs par Bosch, qui fut proche des courants de la devotio moderna, que Rocquet a vraiment rencontré Ruysbroeck, qu'il présente ici en poète. A vrai dire, le maître de Groenendael est l'objet, depuis plus d'un siède, d'un net regain d'intérêt de la part d'un certain nombre d'écrivains, belges surtout, envoûtés par sa langue de feu. Dans cette lignée, Rocquet s'applique à reconstituer le visage, ou plutôt la présence de Ruysbroeck, dont on sait fort peu. Il en ressort l'image d'un homme de recueillement, modeste mais ferme, d'une rudesse pétrie du seul amour de Dieu. La beauté de ses écrits (que Rocquet analyse dans la seconde partie) doit être perçue comme un surcroît d'inspiration que seul, depuis, un Jean de la Croix sans doute atteignit.