Vie chrétienne, 2006, 97 p., 13 euros.

Les premières pages de la Bible ont une facture et un statut très particuliers. Elles proposent un mystérieux savoir, qui vaut pour toutes les générations, sur la relation de l’homme à la création et à son créateur, ainsi que sur la relation entre l’homme et la femme, devant Dieu. D’être placées au commencement, elles éclairent l’aventure humaine de chacun.
Mais la pensée analytique, qui se tient extérieure à son objet, n’est pas de mise ici : c’est l’intelligence du coeur qui importe, et qui appelle le lecteur à un engagement personnel. Lire ne va jamais sans risque : il s’agit toujours d’être présent avec son être, ses forces vives, et ce qu’on a compris de la bonne vie. La vérité du texte, et tout particulièrement de ces pages, n’est pas dans l’exactitude des faits rapportés mais dans la foi, l’espérance, la charité qu’ouvre et confirme l’entrée dans le monde du texte.
C’est avec une grande maîtrise et un savoir-faire éprouvé, que Bruno Régent, jésuite et enseignant au Centre Sèvres, invite à entreprendre la méditation du récit de l’origine (Gn 1,1-2,4), qui se déroule en sept jours, et rapporte dix paroles de Dieu. Pour chacune de ces paroles sont proposés, chaque fois, des clés de lecture, de libres commentaires, des dessins évocateurs, des suggestions d’exercice, des pistes pour prolonger. Car il est plusieurs manières de lire, c’est-à-dire d’écouter en soi et dans sa vie l’écho de la parole originaire, de la confronter aussi à d’autres passages bibliques. La structure ferme de ce petit ouvrage est une invitation en actes à permettre à la parole de vie de retentir dans l’histoire du lecteur, invité à mobiliser sa propre expérience de l’existence, et à la laisser être mise en question ou confirmée.
Une grande attention aux mots de l’auteur biblique, une heureuse mise en perspective des dix paroles du récit dans leur construction, une familiarité avec les recherches contemporaines de l’exégèse savante (notamment à la lecture initiée par Paul Beauchamp) offrent des matériaux appréciables pour oser lire le récit des commencements seul (par exemple dans une retraite personnelle dans la vie) ou en groupe. Les exercices proposés mettent en oeuvre les sens et ouvrent à une appropriation savoureuse d’un texte qui n’aura jamais fini de féconder la vie des croyants.