Desclée de Brouwer, 2001,224 p., 20 €.

Etty Hillesum, cette jeune femme juive qui se proposait d'« aider Dieu » au sein de l'enfer des camps, a quelque chose à nous apprendre. Tirer cette leçon, nous inviter à lire et relire le journal laissé par Etty, tel est le but d'Ingmar Granstedt.
Paul Lebeau, dans Erry Hillesum, un itinéraire spirituel (cf. Christus, n° 182, avril 1999, pp. 222-223), s'effaçait devant les citations pour nous laisser entendre la voix d'Etty. I. Granstedt, qui a eu accès à davantage de lettres, puisqu'il a pu lire tous les originaux en néerlandais, se refuse à couper, choisir, morceler : il fait une lecture de la vie d'Etty pratiquement sans citations. Cinq axes sont retenus et entrecroisés : le contexte social, et notamment la persécution nazie ; le libre choix d'Etty de ne pas fuir ce « destin de masse » ; sa relation avec Julius Spier ; son rapport à Dieu ; son sens de « cette vie si bonne, malgré tout ». La dimension amoureuse est centrale dans cette étude. C'est de l'effort d'accueil, dans l'honnêteté et le dépassement, de cet amour qui flambe entre Etty et Julius, que naît la force spirituelle d'Etty, cette capacité d'amour étendue au-delà du cercle naturel.
Le rapport à Dieu vient ensuite. Non qu'il soit second. C'est Julius Spier qui l'introduit à Dieu, avant qu'elle le reconnaisse pour lui-même (« Il y a en moi un puits très profond. Et dans ce puits, il y a Dieu »), qu'elle trouve le courage d'« exprimer sa foi » et mette ce qu'elle sent être sa mission avant la satisfaction de son affectivité individuelle.
Dans le contexte présent, où « les horreurs de notre monde rendues visibles instantanément sur le petit écran nous laissent un sentiment d'impuissance », Ingmar Granstedt vient à point rappeler que « la vie, en son fond si inépuisable, est infiniment bonne à vivre ». Etty en est le témoin digne de foi.