Lessius, coll. « Au singulier », 2009, 495 p., 24 euros.

Est-il besoin de présenter Pedro Arrupe (1907-1991) qui a occupé une place de première importance dans l’Église postconciliaire ? Ce Basque, après avoir commencé des études de médecine, décida d’entrer dans la Compagnie de Jésus. Cependant, la situation pour les ordres religieux étant devenue difficile en Espagne, il doit poursuivre ses études de philo­sophie et de théologie dans d’autres pays. Celles-ci achevées, il est envoyé au Japon où il arrive avant le déclenchement de la Seconde Guerre mon­diale. Il est à Hiroshima quand explose sur cette ville la bombe atomique. Médecin, aidé des novices dont il est le Père Maître, il donne aux blessés les premiers soins. Cette expérience, on s’en doute, le marquera à jamais. Devenu provincial, il participe à la 31e congrégation générale de son ordre et, à sa grande surprise, est élu préposé général.
Se situant résolument dans la mouvance du concile Vatican II, aidé de ses collaborateurs, il entreprend de transformer profondément la Compagnie qui s’était un peu endormie dans un certain conservatisme. Ce grand vent de renouveau en affole beaucoup en Espagne et ailleurs. On s’interroge sur certaines de ses décisions. Au Vatican, on s’inquiète. Pedro Arrupe n’en a cure : il convoque une nouvelle congrégation pour poursuivre les travaux de la précédente et creuser ses orientations. Paul VI intervient et met en garde la Compagnie. Pedro Arrupe en souffre. À la mort de ce pape, des évêques dénoncent les engagements de quelques jésuites qu’ils jugent trop politiques. Jean-Paul II prête l’oreille à ces rumeurs et ses relations avec le préposé général se tendent. Pedro Arrupe pense devoir alors présenter sa démission à la congrégation générale. Le pape ne le lui permet pas, et quand le préposé général est atteint d’une thrombose cérébrale, il nomme un Délégué pontifical, le P. Dezza, pour le suppléer. Devenu aphasique, le P. Arrupe vivra ses dernières années d’une manière admirable.
Ce sont ces diverses étapes de la vie de Pedro Arrupe que retracent les divers auteurs, jésuites et autres, de cet ouvrage. On le montre présidant les 31e et 32e congrégations générales, on réfléchit sur son mode de gou­vernement, on le présente comme grand acteur de l’Église postconciliaire dialoguant avec les cultures et cherchant à mieux fonder la vie des religieux. Mais les parties les plus intéressantes sont sans doute les dernières qui présentent les difficultés rencontrées par Pedro Arrupe, difficultés qu’il a vécues comme une « passion ». C’est ainsi que l’on peut comprendre la « biographie intérieure » rédigée par son secrétaire le P. Ignacio Iglesias. Comme on l’a écrit : « Pedro Arrupe n’était pas un doux rêveur mais un prophète aux mains nues, choisi par Dieu pour l’évangélisation des temps que nous vivons. »