Éditions du Gerfaut, 2005, 128 p., 15 euros

Il faut être d’une audace un peu folle pour proposer au public d’aujourd’hui des poèmes d’une aussi haute exigence et inspiration. Cette folie, le P. Cassingena-Trévedy la puise dans la mer qu’il sillonne plusieurs fois par an auprès de marins pêcheurs du Croisic (Loire-Atlantique). Rien de païen dans cet amour, car la mer est notre « sainte Parente », créature qui « ressasse en [ses] nausées / Tous les avatars et toutes les misères », mais qui nous conduit « tellement plus loin que nous-mêmes » que nous nous promettons « au grand jamais de n’être plus médiocres ».
Nous ne voyons guère qu’un Hopkins ou un Claudel qui se soient livrés à de telles empoignades avec les mots et les éléments, surmontant les plus vertigineux paradoxes : « Et si le Très-Haut, après tout, n’était pas vertical, / Mais comme toi, son reflet, son aquatique expression, / Plénitude, / Et s’il n’était pas plus séant de l’appeler Très- Profond ? » Investissant avec brio tous les genres poétiques (des chants de marins au sonnet ou au vers libre), François Cassingena- Trévedy nous donne à lire un singulier journal de bord, en nous faisant passer sans discontinuer du rire aux larmes : « Pardon, j’ai pêché ; tu vois, j’ai encore des écailles / sur mon tablier d’or. »