Cerf, coll. « Lire la Bible », 2004, 136 p., 23 €.

Régis Burnet enseigne aux universités de Paris VII et VIII. II vient de publier un « Que sais-je ? » sur le Nouveau Testament, et on se souvient de son Paul, le bretteur de l'Evangile (Desclée de Brouwer, 2000) qui nous restituait toute la chair d'un personnage hors du commun. Et le voilà qui trace le chemin allant de la pécheresse repentie des Evangiles à l'épouse de Jésus Ce chemin est plein d'enseignements sur la manière dont les croyants s'approprient les figures des saints, se fabriquent leurs reliques, afin de servir leurs intérêts du moment.
Longtemps, Marie-Madeleine a été la figure de la repentance, celle qui avait été pardonnée, « car elle avait beaucoup aimé ». Le Moyen Age l'avait voulue ermite en Provence. Ses reliques auraient été transportées à Vézelay, faisant la richesse de l'abbaye qui les avait accueillies. Comment est-on passé de cette vénération pieuse aux revendications à succès et non moins fantaisistes d'aujourd'hui? Ainsi Madeleine est-elle tour à tour présentée comme la première apôtre écartée par une Eglise misogyne, un véritable Graal, l'épouse de Jésus ayant porté sa descendance, une égale féminine du Christ, co-Messie, une des Trois de la Trinité, etc !
Le jeu de piste auquel se livre l'auteur est passionnant et révélateur de l'évolution des mentalités. Hélas, au point actuel, une composante du message évangélique a disparu : si Marie-Madeleine n'est plus pécheresse, le pardon de Jésus n'est plus à la source de son rayonnement, la grâce a été évacuée. Cette grâce essentielle pour nous, qui nous permet de croire que l'accueil du pardon de Jésus peut restaurer notre dignité d'hommes.