Lorsque le retraitant, au cours d’une démarche selon les Exercices spirituels, prend au cours de la journée un temps pour l’oraison, convient-il qu’il emporte avec lui le texte biblique avec lequel il a prévu de prier ? C’est là une pratique assez courante. Elle l’est évidemment surtout pour les personnes dont la culture biblique est relativement maigre, et qui ne connaissent pas bien l’ensemble des « textes » ou « passages » bibliques qui leur sont proposés. Mais elle est aussi répandue chez ceux qui « connaissent bien leur Bible ». Ces quelques pages se proposent de réfléchir à cette question concrète, en tant qu’il s’agit d’une question pédagogique, mais aussi d’une question sur notre culture d’aujourd’hui.
Dans le parcours des quatre semaines des Exercices, cette question concrète se pose surtout, pensons-nous, à partir de la deuxième semaine. Sans entrer dans la discussion d’un point disputé, disons qu’il n’y a pas vraiment de rapport à la Bible au cours de la première semaine, du moins telle qu’elle est proposée dans le livret d’Ignace. Notre position contredit la pratique courante, certes, surtout lorsqu’on prévoit dans telle ou telle retraite une période dite « de fondement ». De fait, le livret des Exercices ne propose pas de rapport au « texte » au sens précis que nous avons dit. Il faut alors réfléchir à ce qu’engage couramment dans notre expérience culturelle la « lecture » d’un texte. Nous pourrons alors, en conclusion, proposer quelques suggestions pour la pratique concrète des retraites.
Le rapport au texte biblique
Il n’est jamais question, dans le livret d’Ignace, de « lire » les Évangiles (dans le livre biblique), ni même, tout simplement, de lire, sinon en deux occasions :
• La première fois, au n° 100, dans la seconde remarque qui suit l’Appel du Roi temporel, le livret introduit la possibilité, absente jusque-là dans la première semaine, de faire quelques lectures : de l’Imitation de Jésus-Christ, ou des Évangiles, ou de vies de saints. Il y a donc bien ici lecture d’un livre, mais non point durant le temps des oraisons. Cette lecture « occupe » le temps intermédiaire et, au vu de ce qui est suggéré, elle vise à tenir le retraitant occupé par la vie du Christ – celle-ci étant transparente dans la vie d’un saint ou d’une sainte –, à se tenir dans la proximité du Christ.
• Une seconde mention d’une « lecture » apparaît au n° 127, dans la première remarque qui suit les cinq premières contemplations de deuxième semaine, remarque qui vaut aussi pour toute la semaine et pour les deux suivantes : « Je ne dois lire que le mystère de la contemplation que j’ai à faire dans l’immédiat », sans lire « aucun mystère que je n’aie à faire ce jour-là ». La recommandation vise à ce que l’on s’en tienne bien au « point où l’on en est », sans donner prise à une curiosité de ce qui va venir après : au contraire, « se...
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