Arfuyen, coll. « Les carnets spirituels », 2001, 116 p., 12,20 €.

Avec ce premier volume d'une nouvelle collection, les éditions Arfuyen offrent une heureuse occasion de découvrir sur texte ce que fut la spiritualité janséniste. Trop souvent, le jansénisme n'est connu que par les caricatures de la littérature de polémique ou par les manuels d'histoire. Or, avant que la politique et les rieurs ne s'en mêlent, le jansénisme hit d'abord un revival spirituel, né du besoin de réforme qui s'était manifesté dans l'Eglise.
Cet opuscule, rédigé par Saint- Cyran en 1641, dans le fort de Vincennes où l'avait emprisonné Richelieu, permet de se familiariser avec cette spiritualité farouche, propre à séduire des chrétiens épris de rigueur spirituelle et morale. On la saisit en sa source sous la plume de celui qui en fut le premier apôtre.
Avec son ami Jansen, Duvergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran, avait, des années durant travaillé les Pères de l'Eglise saint Augustin surtout. Une conception de l'expérience chrétienne en était née, marquée par un pessimisme fonder sur la « nature » humaine.
On connaît le système : radicalement vicié par le péché originel, l'homme ne peut produire par lui-même que des actes mauvais. La grâce seule peut lui faire accomplir des oeuvres de salut. Ecartelé entre les chaînes du péché et celle de la grâce l'homme ne peut plus qu'invoquer sans cesse son Dieu par « l'oraison brève et fréquente » qui, seule, « fait sentir les effets de la délivrance par le Christ ».
Cette vision tragique de la condition humaine n'est pas sans grandeur. On comprend qu'elle ait longtemps séduit, le talent de Pascal aidant, l'Université française : l'admiration qu'on lui portait, au même titre qu'à la tragédie grecque, permettait d'éconduire d'autant plus courtoisement la foi religieuse dont elle était censée être la plus haute expression...
Il est passionnant de saisir, dans le texte même de Saint-Cyran, les motifs de cette spiritualité (il ne saurait eue question de mystique) qui pense enrichir Dieu de tout ce qu'elle retire à l'homme