Dès la fondation de la Compagnie, les jésuites ont l'intuition qu'ils doivent donner la priorité au temps sur l'espace : être là où sont les hommes. Cette particularité signe une façon d'être et d'agir qui se retrouve dans les manières jésuites et ignatiennes d'habiter la ville aujourd'hui.

La ville fut toujours carrefour et lieu d'échange. Désormais villes mondes d'un monde devenu ville, nos métropoles sont plus que jamais façonnées par les infrastructures de communication. Les distances sont raccourcies par la vitesse. Les connexions internet nous lient instantanément à d'autres, proches ou lointains. Notre espace vécu semble s'affranchir de la limitation physique. Habitants d'une même ville, nous pouvons voyager côte à côte dans la même rame de métro, connectés sur nos smartphones, et vivre la quasi-instantanéité avec d'autres réalités de la planète, apparemment hétérogènes. Mais quand le lointain devient plus prochain que l'espace voisin, ne risque-t-on pas d'être voué à l'ignorance d'autrui ? Si nous sommes tous des hyperurbains, que reste-t-il de la cité ? Ce que montre David Mangin dans La ville franchisée1, c'est que, plus il y a circulation, plus les formes de l'habiter se conjuguent dans l'entre-soi. Et, dans ces flux, se structurent