Je me souviens de mon cinquantième anniversaire Ma femme m'avait invité au restaurant pour fêter ce demi-siècle passé comme un éclair, et nous nous apprêtions à rentrer chez nous lorsqu'elle m'a demandé de repasser au théâtre, prétextant, si je m'en souviens bien, un vêtement oublié II était minuit Je ne me doute de rien La nuit, un théâtre respire et bruit comme un navire II y a comme des fantômes Ça craque et ça vit Je ne m'étonne donc pas qu'elle insiste pour que je l'accompagne jusque dans la salle du bas La lumière s'allume d'un coup, et je vois, surpris comme un gamin, cinquante de mes amis du théâtre réunis pour m'accueillir J'ai eu du mal à retenir mes larmes
 

Une drôle d'amitié


L'amitié peut être violente. Au théâtre, elle est souvent cruelle. Le metteur en scène donne ce qu'il a de plus fort et de meilleur, il s'offre avec une impudeur qui n'est finalement seulement supportable que par le pouvoir que sa position lui confère. C'est-à-dire qu'il est maître de la parole et qu'il indique le cap sans vaine discussion. Il noue avec les comédiens des liens d'une intensité inimaginable. Il se met nu et il les voit nus, prenant la boue