La mer est une actrice clé du commerce mondial. Au moins 90 % du commerce international – en tonnage comme en valeur – se fait par voie maritime : c’est par bateau que le pétrole du Moyen-Orient part en Asie, tout comme le pétrole russe arrive en France, ou que le gaz qatari est exporté. La France exporte, par bateau, une part importante de sa production céréalière, le Brésil fait de même avec sa production sucrière. 65 % des produits qui remplissent nos supermarchés (hors nourriture) viennent de Chine et sont transportés dans des navires porte-containers géants. Géants, le mot n’est pas trop fort ! Si l’on décidait de remplacer un de ces géants des mers, un porte-containers de 18 000 « boîtes », par une flotte d’airbus A380, il faudrait affréter environ 3 000 avions pour remplacer un seul de ces navires. De façon générale, on peut retenir l’équation : un bateau est égal à un ou plusieurs milliers d’avions.


À la pointe de la mondialisation

Environ mille containers arrivent chaque jour d’Asie au port de Marseille Fos, et plus de deux mille au Havre. Ils traversent la mer Méditerranée dans son axe Est-Ouest en transitant par le canal de Suez et le détroit de Gibraltar pour gagner le nord de l’Europe. Pour des raisons culturelles et sociales, peut-être avons-nous une image des échanges en Méditerranée selon son axe Nord-Sud : les tentatives de migration en sont un exemple poignant. Il est bon de se souvenir que la Méditerranée est, d’est en ouest, un des grands axes du commerce maritime mondial.
Voici une lapalissade : il n’y a pas de bateaux sans marins. Ce qui n’en est plus une, c’est que le domaine de la marine marchande est à la pointe de la mondialisation. La Mission de la mer française écrit dans son rapport d’orientation de 2007 : « Dans le cadre de la globalisation de l’économie mondiale, l’organisation de la flotte de commerce s’est fortement libéralisée. La mondialisation de cette flotte peut être considérée comme pratiquement achevée. » Concrètement, cela implique que la notion d’armement maritime a considérablement évolué. Un navire peut être la propriété d’un consortium financier, sans rapport direct avec le monde maritime. La gestion du navire est confiée à un manager, c’est-à-dire à une société experte en domaine maritime. Le navire est immatriculé dans un pays qui, le plus souvent, n’a pas de rapport direct avec le pays de l’armateur. C’est ce qu’on appelle les « pavillons de complaisance ». Plus de 65 % des navires naviguent sous de tels pavillons, dont beaucoup d’ailleurs sont de haute qualité. « Pavillons de complaisance » ne signifie pas nécessairement « bateaux-poubelles ».
Il faut des marins sur ces navires. Pour les trouver, la société managériale fait appel à des sociétés de main-d’œuvre dans de nombreux pays fournisseurs de marins au long cours. 25 % des marins dans le monde sont philippins. Ils sont suivis par les Ukrainiens, les Russes, les Indiens, les Chinois, les Birmans, etc. Il faud...
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