Le célèbre tableau de Rembrandt sur le fils prodigue évoque magnifiquement la parabole de Jésus qui, à travers la compassion du père vis-à-vis de son enfant, dévoile l'infinie miséricorde de Dieu (Lc 15, 11-32). Les évangiles rapportent par ailleurs plusieurs enseignements sur le pardon. Ceux-ci peuvent être implicites, ainsi lorsque Jésus, dans la synagogue de Nazareth, cite le texte d'Isaïe annonçant la libération des « captifs » et « une année d'accueil par le Seigneur » (Lc 4, 18-19). Mais d'autres passages utilisent le verbe « remettre » ou « pardonner » (en grec, aphiemi) : c'est le cas dans le Sermon sur la montagne, avec l'exhortation à demander au Père de nous pardonner et l'appel à pardonner nous-mêmes à ceux qui nous ont offensés (Mt 6, 12.14-15) ; c'est aussi le cas dans le discours de Matthieu 18, lorsque Jésus invite à pardonner « jusqu'à soixante-dix fois sept fois » et raconte l'histoire d'un homme qui, bien que sa dette ait été entièrement remise, refuse de remettre à son tour les dettes de ses débiteurs, cette parabole devant illustrer l'exigence de « pardonner à son frère du fond du cœur » (Mt 18, 21-35).

On ne cherchera pas ici à expliquer ces enseignements, mais on s'interrogera plutôt sur l'attitude même de Jésus : comment a-t-il pardonné dans les années de son ministère ? Surtout, comment a-t-il pardonné lorsqu'il s'est trouvé, aux jours de la Passion, dans la situation d'une victime innocente, injustement livrée aux mains des hommes ?

« Tes péchés sont pardonnés »

L'attitude de Jésus tranche par rapport au comportement habituel de son peuple. Certes, les Juifs de son temps croient que les péchés peuvent être remis. Jean le Baptiste proclame lui-même « un baptême de conversion en vue du pardon des péchés » (Lc 3, 3) 1. Mais Jésus, lui, va jusqu'à prendre des repas avec les pécheurs et les publicains ; il fréquente ceux qui sont considérés comme impurs et qui sont de ce fait exclus ; il ne les soumet pas à un rite