Arfuyen, coll. « Cahier », 2006, 101 p., 13 euros.

La Venue dont nous parle Gérard Bocholier a lieu au plus épais de notre chair contractée et souffrante où la mort « Gagne toujours/D’un pli d’un souffle ». Comment, dans cette impasse, « un flux soudain » tire-t-il « les vieux verrous d’ar­gile », c’est la vertu de ces vers denses de nous le dire en respectant, par leurs ellip­ses, le mystère de celui qui vient parmi nous toutes portes closes et nous offre « Son fruit mûr/Sur la nappe blanche ». Les mots sont les miettes tombées de la table où l’amour desserre nos coeurs et nos lèvres ; mais dans ces miettes, comme dans celles du pain eucharistique, le don tout entier nous est proposé.
La fidélité au réel qui caractérise toute poésie vraie se marque ici par le fait que la lumière n’advient pas au-dessus de la nuit ou seulement après elle, mais dans l’obscurité même du corps où transparaît l’effigie du Crucifié : « Le temps qui tout déchire/Fait entrer l’éternel// Fissures de beauté/De souffrance indicibles// Mar­ques des clous ardentes/Où s’engouffre le jour. » Les « graines de ciel » sont tou­jours à « mettre en terre ». Alors l’oreille attentive pourra percevoir ce que lui ap­porte la brise du matin de Pâques.