«Le semeur est sorti pour semer... » Ces mots de la parabole éveillent en moi le souvenir encore tout proche de lycéens qui n'avaient que ce mot à la bouche : « sortir ». Ils le prononçaient avec une telle intensité que je ne pouvais pas ne pas l'entendre comme un appel chargé d'une exigence irrépressible en eux : « Mon père, est-ce que je peux sortir ce soir ? » Repris dans la bouche de leurs parents, ce mot était coloré d'un reproche : « Il ne pense qu'à sortir ! C'est à peine si on le voit quelques heures à la maison quand il rentre pour le week-end ! » Il me fallait alors reprendre devant ces parents les expressions de Françoise Dolto, faute de savoir en trouver de plus personnelles. Le mot « sortir » prenait alors un sens nouveau, riche de la croissance vers l'âge adulte qu'il se mettait à évoquer. L'évangile n'était jamais loin au cours de ces conversations. Il arrivait même parfois qu'il vienne explicitement au cœur de celles-ci, non sans provoquer un étonnement qui donnait à nos échanges une dimension nouvelle et inattendue au départ.
« Le semeur est sorti pour semer... » Est-ce à dire que cette parabole est aussi pour les adolescents, leurs parents et leurs éducateurs ? Elle est pour tout être humain qui cherche à entendre la Parole de Dieu, car elle est la parabole qui donne la clé de toutes les autres : « Vous ne comprenez pas cette parabole ? Alors comment comprendrez-vous toutes les paraboles ? » (Me 4,13). Michel Henry, dans son dernier livre, en fait une lecture rigoureuse et suggestive :

« Ce que sème le semeur, c'est la Parole de Dieu ( . ), la semence étant la Parole de Dieu, le lieu où elle est reçue