Christus : En quoi, selon vous, cette exhortation apostolique serait, comme le pensent beaucoup, un événement spirituel ?
Remi de Maindreville : Parce que, me semble-t-il, dans la ligne de celles de Paul, l’exhortation du pape François est très incarnée, très vivante, et touche l’esprit et le cœur de chacun. Ce texte, qui fait suite à un synode sur la « nouvelle évangélisation », n’est pas un plan d’action ni un discours sur la mission, il est en lui-même un envoi en mission. Et il dit dès le début, dès la première phrase, que la mission procède d’une rencontre intérieure, ce qui est donc très spirituel. Dans l’exhortation, en effet, on voit se joindre et se croiser des fils qui touchent la vie individuelle, la vie de prière, son comportement par rapport à la religion, par rapport au monde. Elle renvoie chacun à soi-même, tout en étant repris dans une vision beaucoup plus globale, plus collective. L’Église, pour le pape, est faite de gens qui se laissent traverser par l’Esprit.
Françoise Le Corre : J’ajouterais que, pour moi, c’est un texte renversant : il renverse jusqu’à nos inquiétudes, jusqu’à nos angoisses pour l’Église. La joie qu’il révèle surgit de ce renversement de l’Évangile. Ce n’est pas une lecture doctrinale, morale, mais une voix à entendre. C’est le porte-parole de la voix de l’Évangile, ou mieux, son porte-voix. D’ailleurs, certains de ses mots sont très sensibles : la « fraîcheur », le « parfum » de l’Évangile, la « guérison ». Nos propres structures de pensée, la façon dont nous voyons le monde, la façon dont nous avons peur pour