Remi de Maindreville : Parce que, me semble-t-il, dans la ligne de celles de Paul, l’exhortation du pape François est très incarnée, très vivante, et touche l’esprit et le cœur de chacun. Ce texte, qui fait suite à un synode sur la « nouvelle évangélisation », n’est pas un plan d’action ni un discours sur la mission, il est en lui-même un envoi en mission. Et il dit dès le début, dès la première phrase, que la mission procède d’une rencontre intérieure, ce qui est donc très spirituel. Dans l’exhortation, en effet, on voit se joindre et se croiser des fils qui touchent la vie individuelle, la vie de prière, son comportement par rapport à la religion, par rapport au monde. Elle renvoie chacun à soi-même, tout en étant repris dans une vision beaucoup plus globale, plus collective. L’Église, pour le pape, est faite de gens qui se laissent traverser par l’Esprit.
Françoise Le Corre : J’ajouterais que, pour moi, c’est un texte renversant : il renverse jusqu’à nos inquiétudes, jusqu’à nos angoisses pour l’Église. La joie qu’il révèle surgit de ce renversement de l’Évangile. Ce n’est pas une lecture doctrinale, morale, mais une voix à entendre. C’est le porte-parole de la voix de l’Évangile, ou mieux, son porte-voix. D’ailleurs, certains de ses mots sont très sensibles : la « fraîcheur », le « parfum » de l’Évangile, la « guérison ». Nos propres structures de pensée, la façon dont nous voyons le monde, la façon dont nous avons peur pour l’Église, tout cela doit être bouleversé par le vent de l’Esprit. Alors jaillit la joie. Renversante et débordante. La mission, c’est ce qui déborde de ce que l’Esprit a mis en nous de cette joie, de cette confiance. Et le pape joint des mots qui sont ceux de la sensibilité. Il parle beaucoup de la beauté de Dieu, de ses merveilles. Ce texte ravive la foi d’une façon extraordinaire, en remettant au centre ce qui doit être au centre. Il parle d’ailleurs souvent de la hiérarchie des choses : il y a les périphéries, les détails, l’organisation... Il faut bien les régler, mais, pour cela, il fait confiance aux évêques et, plus généralement, à tous ceux qui sont en charge d’affronter les situations particulières ; charge à lui de reconduire vers le centre. Évoquant la charge pastorale, il dit que, par moments, le pasteur est devant le troupeau pour donner la direction ; à d’autres, il est au milieu pour encourager, aider, entendre ; et, à d’autres encore, il est derrière. Quand il est derrière, c’est pour ramasser ceux qui sont un peu à la traîne, ceux qui ont du mal, mais c’est aussi parce que le troupeau a un odorat, du flair : il faut parfois lui faire confiance. Ce qui est aussi sage que plein d’humour !
Un texte écrit pour chacun d’entre nous
Christus : Ce texte a-t-il confirmé, ou infirmé, le sentiment premi...
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