Ce livre nous aide à relire la lettre aux Hébreux avec un regard neuf. L’auteur prend le temps d’expliquer ses choix de traduction pour redonner de la saveur à un texte trop bien connu. Il rafraîchit notre lecture. Il propose même quelques néologismes et expressions originales pour être au plus près de la dynamique des mots. Nous pouvons évoquer ici le choix de parler du « type de sa propre endurance » (pour « expression de son être », He 1,3), du « pionnier de la foi et du perfectionneur de la foi » (pour « l’initiateur de la foi et qui la mène à son accomplissement », He 12,2), de « l’homologie » (pour « la profession de foi », He 3,1), de « chose effroyable [pour “terrible”] que de tomber aux mains du Dieu vivant » (He 10,31) ou encore « nous ne sommes pas des hommes de dérobade » (pour « faire défection », He 10,39), etc.
L’auteur souligne le caractère concret et événementiel de la vie du Christ qui fait les siècles, comme les grands personnages ont fait leur siècle. Il se confronte à la question du sens du sacrifice du Christ. Il souligne que c’est sa confiance, sa foi indéfectible, que Jésus offre à son Père. « La matière du sacrifice n’est plus du sang, ni une victime : c’est une foi parfaite. » Les souffrances et le sang n’en sont que « l’écrin ». En cela, il sort le coeur de l’épître de sa gangue. Mais peut-on se contenter de cette métaphore ? Si la foi et l’endurance du Fils sont magnifiées, quelle est la figure du Père qui se dessine dans cette dynamique, lui qui va jusqu’à faire de la mort un moyen pédagogique pour conduire à la perfection et qui menace des pires châtiments ceux qui ne suivraient pas cet exemple ?
Si, comme le souligne de manière remarquable Marie-Dominique Dognin, la véritable offrande sacrificielle est celle de la volonté, ne faut-il pas la situer à Gethsémani ? Le Fils, en se livrant ensuite au nom du Père, aux mains des hommes jusque sur la croix, accomplirait alors la volonté du Père d’aller à la rencontre de ceux qui sont le plus éloignés de Lui, la volonté de descendre au plus profond des enfers pour délivrer ceux qu’ils enferment. Un autre visage du Père se dessinerait qui ressemblerait davantage à celui du Fils. Sa miséricorde n’en serait que plus éclatante et la racine du péché n’en serait que mieux éradiquée car, comme le formule très justement l’auteur, « la racine du péché est une défiance envers Dieu ».
Comme on peut le voir, le mérite de ce livre est de raviver et de renouveler quelques questions clés que tout un chacun peut se poser à la lecture de l’épître.  
 
Martin Pochon