Le regard de saint François sur la création inspire une approche renouvelée de l'écologie. Frère Éric Bidot, en s'appuyant sur des sources franciscaines, relève un lien possible entre imitation du Christ et retour à la création, entre foi et écologie. On entre dans l'itinéraire par une affirmation : le Cantique de frère Soleil, œuvre écrite à la fin de la vie de François, concentre l'essentiel de son expérience de Dieu. Celle du dénuement, dans lequel jaillit la louange la plus pure. Celle de la communion aux souffrances du Christ, dans laquelle il reçoit dans son corps les stigmates de la Passion. La suite de l'ouvrage développe une conviction : par la foi vécue comme dénuement, et dans la communion au drame du salut, l'homme retrouve sa place dans la création.

Ainsi l'homme, vu sous la figure de saint François, est fait pour la louange à condition d'être frère de chaque créature. À condition de mendier sa place dans le « concert des créatures » et de « dire à l'autre qu'il est nécessaire à ma propre vie » (p. 63). Cette orientation de fond expliquerait le dénuement radical pour lequel opte François dès sa conversion : il loge dans des grottes, symboles de la maternité de la Terre, à qui nous devons tant. Dénuement également compris comme tâche de nous réconcilier avec toutes les créatures et de nous mettre à leur service. Vision de l'existence dans sa totalité, où « sœur Mort », parce qu'elle accomplit notre dépouillement ultime, est elle-même notre alliée.

On pourrait craindre que, pour saint François, les créatures ne soient que des symboles abstraits ou les « vestiges » (selon saint Bonaventure) d'en haut. Ainsi les astres nous ramèneraient au « Bien suprême », le feu serait un objet de fascination élevant à la louange et les oiseaux des messagers des réalités spirituelles. Mais François, en embrassant le lépreux, fait un pas de plus : il consent à la vulnérabilité comme gage de communion avec toutes les créatures. La fraternité universelle est pour lui la forme par excellence de l'Incarnation.

Nous comprenons alors que louer et communier aux souffrances de la création, c'est « voir toute chose en Dieu ». François, en changeant de regard sur la création, peut quitter ses richesses, comme son père, et s'en remettre à l'évêque seul, figure du Christ et de l'Église, qui le reconduit au Père. Entre ce monde et le monde de Dieu, un dépouillement, un pèlerinage et une guérison, pour finalement renoncer à posséder et consentir à servir : « C'est par le service que l'on s'insère dans le monde des créatures, que l'on gagne droit de cité dans l'être et donc aussi droit à la parole » (p. 191).

Parler d'écologie après saint François, c'est retrouver un rapport intérieur à la création, contempler Dieu dans ses créatures et en être affecté dans sa chair. Au point de tisser des relations intimes avec elles et de devenir pour chacune d'elles, un frère, une sœur.