Comment interpréter le phénomène de l’expansion des Églises évangéliques ? Je propose de considérer ce phénomène comme un révélateur de soifs spirituelles, ainsi que d’une manière d’y faire droit aujourd’hui.
L’essor de ce que les sociologues ont appelé un « christianisme de conversion » a une ampleur mondiale (l’Église catholique est traversée elle aussi par des courants de ce type : charismatiques, communautés nouvelles). Tous les continents sont touchés. On recenserait aujourd’hui, d’après Sébastien Fath, spécialiste de la question, plus de 200 millions de chrétiens évangéliques, et ce chiffre double si l’on ajoute celui des pentecôtistes. En France, ils étaient moins de 100 000 en 1950, ils sont aujourd’hui plus de 350 000. Le phénomène est particulièrement sensible dans les banlieues, mais il ne faudrait pas considérer qu’il est l’apanage des milieux populaires. En fait, le « christianisme de conversion » touche tous les milieux.
Bien entendu, il est facile de n’y voir que manipulation, secte ou entreprise commerciale. Réagir de cette manière reviendrait à s’interdire d’entendre de ce qui se dit là. La réaction symétrique qui consisterait à presser toutes les communautés catholiques d’adopter un style « christianisme de conversion » ne me semble pas plus sage : il n’est pas sûr que nous y gagnerions en fidélité à l’Évangile, et puis nous avons à honorer également, en tant qu’Église catholi­que, d’autres manières d’être chrétiens, en prenant garde de n’en disqualifier a priori aucune.
 

Les composantes de la mouvance évangélique


Le courant évangélique est multiple. On peut distinguer en son sein cinq grands types, qui correspondent en partie à des strates historiques. Le socle est constitué par les Églises issues des « réveils » européens de la Réforme (au XVIIe siècle, les mouvements piétiste et baptiste, au XVIIIe siècle, le méthodisme), qui se retrouvent au sein de la Fédération