La Parole de Dieu qui prit chair en Jésus n’est pas morte avec lui. A la Pentecôte, l’Esprit d’amour vient confirmer la résurrection de Jésus et prendre chair nouvelle des apôtres réunis avec Marie. Un Corps nouveau est en train de naître engendré d’une Parole qui brûle, retourne et relie ceux qui l’écoutent, tandis que son souffle de liberté ouvre à l’infini nos espaces intérieurs et cosmiques.  Evénement immense et pourtant minuscule, car c’est dans la banalité de la vie ordinaire quotidienne que l’extraordinaire se manifeste et prend chair. L’Esprit de Dieu, l’Esprit qui a accompli l’Ecriture en Jésus-Christ, est en même temps l’Esprit qui accomplit l’incarnation. Mais ce n’est plus dans la figure historique de Jésus que s’incarne la Parole. L’Evangile, la Bonne Nouvelle du chemin d’humanité que Jésus a tracé, nous permet d’en relire les marques, les joies et les peines dans nos propres vies, qui deviennent ainsi plus lumineuses, plus incarnées et porteuses de la chair du Christ.
 
Christian de Chergé (1) aimait vivre et écrire que l’Esprit « qui achève toute sanctification » (Prière eucharistique IV), l’Esprit qui « accomplit les Ecritures », est en même temps celui qui « préparait longuement cet accomplissement. Les deux s’entremêlent, dit-il, non seulement parce que la majorité des hommes restent  hors de l’Eglise, mais aussi parce qu’en chacun des baptisés, en chacun de nous, le passage à l’Evangile est toujours à reprendre ».  L’ouverture et l’écoute qu’appelle ce passage, les liens de service et de réciprocité fraternelle qui se tissent, le style de vie personnel et communautaire qui se cherche et s’affine, les ratées et erreurs qu’on reprend, les drames aussi avec la compassion et les gestes qu’ils occasionnent, les choix qui nous coupent parfois de nos proches, témoignent de la vie brûlante de la Parole évangélique qui prend chair, et de l’Esprit d’amour qui accompagne et rassemble, sans oublier quiconque.
 
C’est à la résurrection de la chair, porteuse d’une vie éternelle et gratuitement donnée, que l’Esprit de Pentecôte nous invite à croire. L’Eglise en témoigne dans sa naissance toujours nouvelle.
 
Remi de Maindreville s.j.

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(1)    C. de Chergé, Dieu pour tout jour, p. 396