Ce prêtre atypique nous coupe le souffle. Animé d'une soif d'absolu sans contours, Jean Daligault (1891-1945) se passionne pour Dieu, l'art et la mécanique. A l'âge où ses contemporains assemblent en tremblant une TSE lui se construit tour à tour une automobile, un bateau, et un avion de tourisme.
Mais c'est l'art sous toutes ses formes qui l'habite, et c'est en ce domaine qu'il excelle : la démarche artistique et la démarche religieuse ne sont-elles pas un même élan vers le sacré ? L'abbé réalise aquarelles, sculptures, gravures, croquis, avec une rapidité d'exécution, un graphisme un talent qui forcent l'admiration. Mais s'il est non conformiste en avance sur son temps, souvent provocateur en plaçant la liberté au-dessus de tout il demeure attaché à l'Eglise. Ce jeune prêtre doué, séduisant, rempli de joie de vivre aimé de ses fidèles, semble promis à un destin paisible et heureux lorsque survient 1 940. Il refuse la défaite et fonde un réseau de Résistance. La Gestapo l'arrête ; il est déporté en 1942. C'est alors qu'il se révèle : torturé, affamé, tuberculeux, il poursuit une résistance spirituelle acharnée Son opposition est bouleversante : avec des moyens de fortune, il ne cesse de peindre jusqu'à sa mort à Dachau. Dans l'enfer de ce qui sera pour beaucoup la déréliction absolue, il devient le grand peintre qu'il désespérait d'être à l'époque de la liberté.
Christian Dorrière nous séduit dès les premières pages par ce récit apparemment tout simple qui se révèle captivant. La personnalité inattendue de l'abbé, sa disponibilité intérieure, son héroïsme, sont décrits avec pudeur, voilée par un sourire discret même au sein de l'horreur. L'iconographie saisissante révèle un homme de Dieu et une oeuvre inoubliables.