Devenir grand-mère : une chance ?
Christine a la soixantaine et plusieurs casquettes : elle est cadre, elle est la fille de ses parents âgés, elle est la mère avec un petit dernier qui vient juste de quitter la maison, elle est la bénévole qui a pris un engagement à la mairie et elle est la femme qui s’est enfin octroyée, cette année, une heure de gym. Le téléphone sonne, jeudi soir. Une intuition la fait hésiter à décrocher : « Tu peux me garder Benjamin ce week-end ? On voudrait aller à la mer. » Elle repense alors à ce café-théâtre où les trois actrices enlèvent des perruques blanches, jettent leurs tabliers et leurs cannes pour apparaître en jean, louant le répondeur qui leur permet de ne pas être au service 24h sur 24 de leurs enfants. Elle réfléchit : « Que privilégier ? Sa fille et son couple ? La relation que ce temps ensemble va créer avec son petit-fils ? Ou elle-même, et ce dimanche, le premier qu’elle a de libre depuis deux mois ? » Aude a 45 ans. Habillée en Zara, venant de faire une formation, et entamant un nouveau métier qui la passionne, elle arrive effondrée à sa séance de psychothérapie. Elle s’allonge sur le divan et s’écrie : « Ma fille vient de m’annoncer que j’allais être grand-mère. Cela ne me fait aucun plaisir. Je me sens monstrueuse. J’ai la sensation qu’elle me repousse dans un placard aux accessoires, que je ne suis plus femme, que j’ai pris dix ans en une minute. Moi qui me suis sentie si mère, je ne me sens pas prête. » Je lui demande d’imaginer autour de ce mot de grand-mère : « Une cuisine sombre, avec ma grand-mère en noir et gris en train de faire cuire un ragoût. » Devenir grand-mère nous renvoie à nos propres images de grands-parents, à nos vécus d’enfant, a...
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