Que peut-on dire de la vocation prophétique de l'Église ? Le prophète est certainement celui qui parle. Si l'Église a un rôle prophétique, elle a sûrement à l'exercer par la parole. Mais elle connaît aujourd'hui une grave défaillance de la parole. Si parler a quelque sens, comme j'espère le montrer, ce ne peut être que lorsque quelqu'un, quelqu'un de singulier, parle. Sans auteur, personnel ou collectif, c'est-à-dire sans quelqu'un qui s'engage et signe, il n'y a pas de parole véritable. Aussi, plutôt que de discourir sur la fonction prophétique de l'Église, j'engagerai ma propre parole. Une parole et une seule, parmi d'autres. L'acte même de parler est déjà un geste fraternel, parce que je parle toujours à quelqu'un – me fût-il inconnu – et que je respecte en lui, comme en moi, l'ardent désir de connaître la vérité et d'en vivre. Ainsi la parole la plus « subjective » est-elle sans doute, par la relation qu'elle instaure, ouverture à l'universel.

Sous l'indifférence, la souffrance

Or l'Église ne parle pas, ou trop peu. Je veux dire : ne parle pas vraiment, car elle