Il ne se passe rien en Algérie, Bayard, 2001, 100 p., 98 F.
L'Algérie au cœur, Parole et silence, 2001, 143 p., 92 F.


Depuis quelques mois, les témoignages les plus divers sur la guerre d'Algérie ou sur l'après-libération, viennent nourrir réflexions ou discussions. En voici deux exemples bien différents.
Celui de Pierre Gibert relate ce qu'a vécu un appelé du contingent en 1958-1959. C'est un cri d'indignation et de souffrance, servi par un puissant style caustique, un art d'évoquer, par flashes éclairant la réalité, ce qu'ont vu ou fait par la force de la discipline militaire, ces jeunes soldats. Au milieu de populations pour lesquelles ils n'éprouvaient aucune hostilité, ils ont vécu dans la peur et la pitié. Participant à des opérations meurtrières sans but compréhensible, soignant leurs blessés, choqués par les morts, s'occupant aussi des torturés, ils ont essayé de survivre moralement devant un bain de sang inutile et accablant. Ce cri qui cherche à appeler les choses par leur nom, réclamant vérité et justice, se veut purificateur et peut aider à retrouver des chemins de paix.
Le témoignage de Jean-Yahia Franchimont se situe plus tard. Il raconte simplement la vie d'un prêtre qui a voulu accompagner les Algériens devenus indépendants. Educateur-né, il s'est d'abord concacré, à Alger même, aux jeunes analphabètes venus nombreux des montagnes de grande Kabylie. Plus tard, avec l'Education Nationale algérienne, il a voulu fonder des écoles dans ces coins les plus inaccessibles, y faisant nommer comme maîtres des jeunes qu'il avait formés. Un amour de tous ses frères, un don total de soi, jusqu'à épuisement, se révèlent à travers des missions héroïques...
Discrètement suggérée, avec son ton d'amicale familiarité, la place de la Croix apparaît. Comme Pierre Claverie, l'auteur se sait situé sur une ligne de fracture. Là encore s'ouvre pour l'Eglise un authentique chemin de paix.